Femmes députées au Royaume-Uni

 

L’annonce des résultats dans la circonscription de Paisley & Renfrewshire South : trois femmes, deux hommes candidats. Victoire de Mhairi Black, SNP, qui bat le député travailliste Douglas Alexander et devient à 20 ans la députée la plus jeune en 350 ans (voir la video)

Après les élections législatives du 7 mai dernier, et au-delà de la victoire attendue du SNP en Ecosse et non-attendue des Conservateurs en Angleterre, l’augmentation du nombre de femmes élues aura-t-elle un impact à Westminster? Malgré l’absence de législation sur la parité, y a dorénavant 29% de femmes à la Chambre des Communes, trois fois plus qu’en 1992, et 50% de plus qu’il y a dix ans.

Le Royaume-Uni rejoint les pays européens suivants où le pourcentage de femmes au parlement dépasse 30% : Suède, Finlande, Pays-Bas, Portugal, Italie, Belgique, Allemagne (Source INSEE).

Presque tous les partis ont participé à cette nouvelle donne – le parti conservateur (68 sur 331) 18%, le parti travailliste (99 sur 232) 42.5%, les nationalistes écossais (20 sur 56) 33.3%. Les libéraux-démocrates perdent cependant quarante-huit sièges au total, dont 7 détenus par des femmes, et n’ont aucune députée. L’unique député-e des verts est une femme. Il est à remarquer également que trois leaders des sept partis principaux (partis nationalistes écossais et gallois et les verts) pendant la campagne électorale étaient femmes.

La géographie des sièges gagnés par des femmes est révélatrice. Le nord de l’Angleterre, l’Ecosse et Londres sont les régions qui ont élu le plus de femmes, ces régions sont urbaines. Les régions plutôt rurales en ont élu le moins (Sud-Ouest, Est). L’Irlande du Nord semble à la traîne en matière de féminisation du corps politique, avec seulement 10% de députés.

Il reste à découvrir les poste que ces femmes occuperont, comme ministre (Theresa May vient d’être confirmée au Ministère de l’Intérieur), comme ministre dans le cabinet fantôme, comme leader de parti lors des débats à la Chambre. Nicola Sturgeon, chef du SNP, First Minister de l’exécutif écossais, dirige déjà une des parties du royaume.

Il reste à voir également quelles femmes vont émerger avec le changement de leadership après la démission des trois leaders des partis ayant perdu des sièges : les travaillistes, les libéraux-démocrates et UKIP (le parti indépendantiste). Les noms de trois femmes sont mentionnés parmi les huit candidatures éventuelles pour le parti travailliste : Yvette Cooper, ancienne ministre de l’intérieur du cabinet fantôme, Liz Kendall et Stella Cressy, toutes trois élues en premier en 1997 dans la vague nouveau-travailliste.

Royaume-Uni : les élections législatives et le SNP

Deux nouvelles brèves sur les élections législatives britanniques et l’Ecosse :

Le Chef du Gouvernement écossais, leader du SNP, Nicola Sturgeon, qui a annoncé le programme de son parti hier, est représentée différemment selon les sources : le quotidien The Independent met en avant sa déclaration concernant un budget anti-austérité pour l’ensemble du Royaume-Uni – le SNP est plus radical que les travaillistes en matière économique et sociale – la femme d’un ministre conservateur qualifie le possible futur gouvernement de coalition Travailliste-SNP de « dictature communiste« . Le ‘tabloid’ Daily Mail met en avant l’annonce que si les Conservateurs gagnent les élections et tiennent leur promesse d’un réferendum sur la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne (BrExit), et si ce réferendum confirme une volonté de quitter l’UE, alors l’Ecosse, gouvernée par le SNP, demandera (à nouveau) son indépendance. Cela fait beaucoup de si…

Voir aussi le vidéo de son discours dans l’article en ligne du Daily Record.

– sur RFI cette semaine:

Royaume-Uni: les élections législatives vues d’Ecosse

La Grande-Bretagne est lancée dans une campagne sans pitié alors que les élections législatives du 7 mai prochain s’annoncent plus incertaines que jamais. Les leaders des cinq principaux partis de l’opposition s’affrontent ce jeudi soir lors d’un débat télévisé. Parmi eux, la nouvelle dirigeante du parti écossais SNP, Nicola Sturgeon. Malgré leur défaite au référendum sur l’indépendance, les nationalistes écossais bénéficient d’une popularité sans précédent et menacent sérieusement le parti travailliste jusque-là très puissant en Ecosse. Muriel Delcroix s’est rendue à Glasgow, la deuxième plus grande ville écossaise qui avait voté oui à l’indépendance en septembre.

L’Ecosse déciderait-elle de l’avenir du Royaume-Uni?

Demain soir les leaders de sept partis politiques participeront à un débat en direct sur la chaîne ITV.

Comme en 2010, aucun parti semble ne pouvoir obtenir une majorité absolue des 650 sièges au parlement de Westminster. Malgré les succès du parti de l’extrême droite UKIP dans des partielles récentes, selon les derniers sondages, les quatre partis qui sortiraient des urnes avec la possibilité de former une coalition seraient les Conservateurs (282), les Travaillistes (279), les Libéraux-démocrates (28) et le parti nationaliste écossais (30) (BBC Newsnight ce soir). Si c’est le cas, même une coalition de deux partis ne suffiront pas à former un gouvernement sûr d’une claire majorité (326 sièges).

Devise du souverain : Honni soit qui mal y pense

L’ironie de la situation est évidente. Il y a six mois, le referendum en Ecosse a rejeté l’indépendance souhaitée par le parti nationaliste SNP. Son leader et le premier ministre de l’exécutif écossais, Alex Salmond, avait alors annoncé son départ. Son successeur Nicola Sturgeon, sera-t-elle, au soir du 7 mai 2015, le leader politique le plus courtisé? Le SNP, ayant perdu son pari d’une Ecosse indépendante, deviendrait-il le parti qui arbitre le gouvernement du Royaume-Uni honni?

Le Royaume-Uni au XXIe siècle : mutations d’un modèle

Je signale la parution d’un ouvrage complet sur le Royaume-Uni aujourd’hui auquel j’ai contribué : Le Royaume-Uni au XXIe siècle : mutations d’un modèle, ouvrage collectif, dirigé par Emmanuelle Avril et Pauline Schnapper. ISBN : 9782708013780, broché, 400 pages, Septembre 2014. 

J’ai signé deux sections (le système éducatif, la famille) de la deuxième partie : questions économiques et sociales.

Ci-dessous la présentation faite par l’éditeur:

Cet ouvrage propose un tableau dynamique du Royaume-Uni contemporain rédigé par les meilleurs spécialistes français des différentes questions abordées. Il est destiné à des étudiants anglicistes ou de droit et sciences politiques, en licence et master.

Le fil directeur en est une interrogation sur la pertinence et la permanence d’un « modèle » britannique qui concernerait aussi bien les institutions politiques (le modèle dit de Westminster) que l’approche libérale et néo-libérale de l’économie, le pluralisme social et les pratiques culturelles.
L’ouvrage aborde ces différentes questions en évoquant les tensions, clivages et mutations qui remettent en question ce « modèle » et en s’interrogeant sur ses capacités d’adaptation aux défis du nouveau siècle.

Table des matières :

Partie I. Politique et institutions
1. Un modèle démocratique en mutation
2. Les partis politiques : un paysage recomposé
3. Les dilemmes de la politique étrangère britannique

Partie II. Questions économiques et sociales
4. Quelle économie au XXIe siècle ?
5. Le modèle social britannique : réussite et limites
6. Les remises en question de l’état-providence
7. Le système judiciaire : entre sécurité et liberté

Partie III. Identités et pratiques culturelles
8. Quelle place pour les religions ?
9. Cultures populaires et cultures d’élite
10. Les médias britanniques à l’ère de la révolution numérique : diversification et nouveaux usages

Nouveau cocktail surprise? Les législatifs britanniques 2015

A cent jours de l’élection, en janvier 2015, le think-tank British Future sonde l’opinion.

En attendant le 7 mai 2015, et des analyses sur la situation aujourd’hui, il y a quatre ans, dans ce blog, j’ai publié le billet qui suit. Je le republie aujourd’hui car l’analyse tient toujours à la lumière des années de gouvernement par la coalition ‘ConDem’. Il va sans dire que la nouvelle donne que représente aujourd’hui UKIP ajoute une difficulté supplémentaire à la prédiction des résultats.

Un cocktail détonnant :– les résultats de l’élection 2010 – nouvelle donne mais pas sans précédent

Le gouvernement de coalition au Royaume-Uni, formé, avec difficulté, après les élections législatives du 6 mai 2010, a été salué comme un retour à un ultra-conservatisme rehaussé d’une pointe de modernisme, avec la nomination de membres à la droite du parti conservateur assortis d’une demi-douzaine de ministres issus du parti libéral-démocrate.

L’absence prévisible de majorité claire – le scénario d’un ‘parlement suspendu’ fut évoqué plusieurs mois avant que la date de l’élection ne soit connu – et l’absence de règles constitutionnels fixes, ou de pratiques anciennes pouvant servir de modèle, était connues.

Malgré cela, il a fallu quatre jours de tractations prolongées entre les conseillers de chacun des trois partis sortis des urnes avec un nombre de sièges suffisants pour figurer dans les négociations pour se résoudre à refuser l’offre des uns (parti libéral démocrate – parti travailliste) et accepter les conditions des autres (parti conservateur – parti libéral démocrate).

Néanmoins, le 12 mai, lors de la conférence de presse dans les jardins de la résidence officielle du premier ministre au 10, Downing Street, les journalistes, sceptiques, se demandant combien de temps cela pourrait durer (The Economist, 16 mai), ont comparé David Cameron, premier ministre, et Nick Clegg, vice-premier ministre, à un couple de jeunes mariés heureux, se chamaillant dans une évidente bonne humeur, sans doute la conséquence de l’euphorie de la victoire et du succès électoral enfin confirmé.

Un mois après ces événements de mai qui ont tenu les britanniques en haleine pendant une bonne semaine, et alors que la ‘lune de miel’ du nouveau couple semble assombrie par les questions d’argent – l’annonce de coupes sombres dans le budget prévu pour le 22 juin ne va rien arranger – que pouvons-nous en conclure ?

Indubitablement 2010 verra le paysage politique britannique changer autant qu’en 1997. Il y a plusieurs similitudes entre les deux élections de 2010 et de 1997. Elles ont toutes les deux amené au pouvoir une nouvelle génération de politiciens, jeunes (la quarantaine) et sans grande expérience ministérielle. Elles ont également toutes les deux été accueilli par une certaine liesse, liesse engendrée par la lassitude qui s’était installée quant aux précédents occupants des lieux.

Tony Blair est parti au moment où sa popularité pâtissait de l’engagement britannique en Irak et en Afghanistan. Son morne successeur était respecté pour sa gestion des affaires, mais sans charisme. Le jour où, sur le perron de 10, Downing Street, Gordon Brown a déclaré qu’il renonçait à former un gouvernement, il a, pour la première fois en une telle occasion, démontré son côté ‘humain’ et souriant, en tenant ses deux jeunes garçons par la main, comme si le fardeau de l’état venait de tomber de ses épaules, et annonçait qu’il quittait le deuxième poste le plus important de sa vie et qu’il chérissait encore plus le premier, celui de mari et de père.

Les deux élections de 1997 et 2010 se ressemblent également par la mise en œuvre immédiate de réformes profondes et attendues. L’effet d’annonce qu’opèrent les premières réformes indiquent clairement le cap que souhaite garder un nouveau gouvernement. En 1997, ce furent les domaines de l’éducation et de la réforme constitutionnelle qui comprenait l’autonomie des nations galloise et écossaise –devolution– qui ont été actés dès juillet annonçant tout un champ de réformes sociales et politiques. En 2010, ce sera le budget d’austérité qui primera.

Les commentateurs britanniques s’étonnent de l’aisance avec laquelle ce gouvernement de coalition fonctionne. Les comités, les ‘jumelages’ de postes, les visites en duo – Nick Clegg accompagna le ministre des affaires étrangères William Hague en visite officielle en Allemagne –, la présence de documents, et plus important, de politiques libéral-démocrates, sur les bureaux de ministres conservateurs. Les contraintes viendront de la façon dont David Cameron réussit à tenir ses troupes, à convaincre le parti conservateur, les députés plus âgés, les députés plus à droite du parti, à renouveler leurs pratiques, à accepter des compromis.

La donne est en effet nouvelle mais n’est pas sans précédent.

Avant 1997 le gouvernement britannique à Westminster fonctionnait selon le système politique traditionnel, avec des élections uninominales à un tour, produisant un gouvernement et une opposition officielle consacrée et un bipartisme fonctionnel. Depuis 1997, la mise en place des assemblées et d’un gouvernement ‘dévolu’ avec une autonomie relative quant aux affaires non-réservées au parlement de Westminster, avec un système électoral composé d’un mélange de vote uninominal à un tour et de représentation proportionnel ont changé la donne.

Les commentateurs rappelaient que le dernier parlement sans majorité nette remonte à 1974, lorsqu’il a fallu deux élections législatives en un an (février et octobre) pour asseoir le gouvernement travailliste de Harold Wilson. Ils se souvenaient aussi de l’alliance entre les travaillistes et les libéraux de 1978, destinée à maintenir au pouvoir le gouvernement travailliste en perdition de James Callaghan.

Les analystes du paysage politique britannique ont omis de considérer l’impact de cette nouvelle configuration. Nick Clegg a récemment déclaré qu’il fallait s’inspirer du succès des modèles européens de gouvernements de coalition. Venant du plus européen des leaders politiques britanniques, il n’est pas surprenant de le voir faire de telles comparaisons. Mais il en oublie de regarder les pratiques nouvelles à domicile, au sein du Royaume-Uni.

Les gouvernements de coalition ne sont pas étrangers à l’électorat
britannique
.

« 2007 a ouvert une nouvelle phase dans le jeu politique de la gouvernance territoriale à l’échelle britannique. En Écosse, le SNP (Scottish National Party) a remporté un succès historique, mettant un terme à la domination exercé depuis 8 ans par la coalition Lib/Lab, parvenant à former un gouvernement – certes minoritaire – pour la première fois de son existence. Au même moment, le pays de Galles passait d’une situation politique dominée exclusivement par les travaillistes à une coalition entre ces derniers et les nationalistes. En Irlande du Nord, après cinq ans d’interruption, le gouvernement décentralisé a été rétabli et une coalition politique formée de quatre partis s’est mise en place »[1], obligeant des frères ennemis, Ian Paisley (parti unioniste) et Martin McGuinness (Sinn Fein), à travailler ensemble à la tête de l’exécutif.

L’autonomie accordée à l’Écosse, au pays de Galles et à l’Irlande du nord, a donné l’occasion de s’habituer pendant une douzaine d’années à plusieurs composants politiques nouveaux : des scrutins proportionnels (les élections européennes sont une autre occasion, mais restent très marginales et distantes pour les électeurs); un gouvernement sans majorité ; la pratique du pouvoir consensuel, en coalition, parfois multiple, et non dans le schéma classique du bipartisme. Le prochain test électoral des ce nouveau cocktail se tiendra le 5 mai 2011 lors des élections aux législatifs dévolus en Écosse, au pays de Galles et en Irlande du Nord.  En ce sens, les élections législatives britanniques de 2010 sont non pas un retour en arrière, mais un pas de plus dans la reconfiguration du paysage politique au Royaume-Uni.

[1] Philippe Cauvet, Susan Finding, « La territorialisation et la gouvernance des identités minoritaires », Introduction, dans Susan Finding, Moya Jones, Philippe Cauvet, ‘Unfinished Business’. Governance and the four nations : devolution in
the UK.,
Bordeaux, Presses universitaires de Bordeaux, 2010,  p.29.

Rentrée scolaire sous pression au Royaume-Uni

Un titre dans la presse anglaise interpelle le lecteur – des classes de soixante-dix élèves, des enfants d’âge primaire obligé de faire quatre heures de transport quotidiennes, en mettant clairement en cause l’immigration : l’augmentation des naissances en Grande Bretagne (22% depuis dix ans) venant en particulier des familles d’origine étrangère (15% des naissances en 2001, 25% en 2011) (Tom Rawstorn, « Classes of 70, four-year-olds forced to commute for three hours and a roof turned into a playground: Why no one will admit immigration is the reason Britain’s primary schools are bursting at the seams “, Daily Mail, 29 août 2014). Interrogée sur cette information, un article sur Atlantico.fr « Classes à 70 élèves, cour de récré sur les toits ou scolarisation à 1h30 de chez soi… Quand le poids de l’immigration s’invite dans la rentrée britannique« 
rend compte de cet entretien.

Pour vérifier l’alarmisme du Daily Mail, journal à sensation à fort tirage dont les prises de position xenophobes et traditionalistes sont connues, les quotidiens ‘sérieux’ ont été consultés. Mais The Independent verse également dans le scoop et le scandale, sans toutefois le couplet sur l’immigration (Richard Garner, Lucy Mote, Juliette Ihler, “Exclusive: Nearly 2,000 families still without school places for their children”, The Independent du vendredi 29 août 2014) : « Des milliers », « près de 2000 », et plus loin « plus de 1700 » familles sont sans une école pour leur(s) enfant(s), et les chiffres seraient incomplets et susceptibles de croître.

Pour comprendre à la fois les faits rapportés et les réactions des deux journaux, sensibles aux soucis quotidiens de leurs lecteurs, il faut examiner la question de plus près. Rapporté au nombre total d’élèves scolarisés en Angleterre et au Pays de galles, 8.7 million, (voir le billet L’éducation au Royaume-Uni… sur ce blog) ce phénomène concerne à peine 0.02 % (ou vingt élèves sur cent mille, pour ramener les chiffres à la taille d’une ville moyenne française). Mais selon le syndicat des fonctionnaires territoriaux (Local Government Association), il manquerait 130,000 places dans le primaire, ce qui veut dire 1.5%, 1500 élèves sur cent mille, ce qui veut dire l’équivalent de plusieurs établissements scolaires.

La cause de cette bévue ? Un baby-boom sans précédent depuis les années 1970, qui a été mal anticipé. La fermeture de classes dans le primaire dans la décennie 2000-2010 correspondant à la chute des naissances, n’a pas été suivie de réouvertures alors qu’on savait que la courbe des naissances s’était renversée. De plus, comme les démographes le savent, l’augmentation n’est pas uniforme, et concerne certaines villes, voire certains quartiers, plus particulièrement. Il ne s’agit donc pas de politiques d’austérité ou répressives, mais d’une mauvaise gestion.

Les conséquences de cette incurie sont plurielles :

-classes surchargées, alors que pendant les gouvernements précédents, on s’était attelés à réduire le nombre d’élèves par classe, dans le primaire en particulier

-établissements de plus en plus grands, obligés d’absorber une population scolaire non pas en diminution, mais en augmentation. La plus grande école primaire, Gascoigne, à Londres (Barking & Dagenham) a plus de mille élèves. Il faut remarquer cependant que, pour l’Angleterre et le Pays de galles, qui ont une population dense, les établissements scolaires, y compris les écoles primaires, ont un nombre d’élèves assez élevé entre 180 et 250.

Gascoigne primary is the biggest primary school in England, according to the latest official statistics. In two years’ time there will be more than 1,200 pupils, The Guardian, 23 avril 2014

-établissements obligés d’ouvrir des salles de classe dans des bâtiments temporaires, de transformer des salles spécialisées (informatique, SVT, sport) en salles de classe, d’ériger à la hâte des salles sur les terrains de sport (Fran Adams, « The growth of the ‘Titan’ schools, The Guardian, 23 avril 2012) avec les conséquences qu’on imagine sur l’emploi du temps, sur les matières enseignées et sur les élèves.

Dès 2010, des alertes avait été données (Tim Ross, « 100,000 pupils crammed into overcrowded state schools », The Telegraph, 2012, à Londres et aux alentours, mais aussi en Écosse, des parents faisaient état d’établissements de 700 à 800 élèves, qui pourraient avoir à augmenter leur capacité de 100 élèves. Certains défendaient la qualité de l’enseignement et d’environnement présente dans ces écoles. D’autres signalaient des difficultés de circulation dans la salle de classe.

Face à ces difficultés, les parents qui le peuvent, réagissent :

-l’école publique est délaissée en faveur de soit les écoles privées (mais peu nombreuses pour le primaire) ou pour la scolarisation à domicile (environ 20,000 élèves)

Pour les parents, obtenir une place dans l’école de son choix, la plus près, et/ou la mieux cotée, relève d’une loterie.

Mais ce dernier état de fait ne date pas d’hier. Il est la conséquence logique de politiques mises en place il y a vingt-cinq ans, et jamais remis en cause par les gouvernements successifs depuis lors.

Depuis l’introduction du ‘choix parental’ par le gouvernement Thatcher à la fin des années 1980, les parents ont le droit de déposer des demandes pour l’école de leur choix pour leur enfant. La mesure était censé améliorer la qualité de l’enseignement dans l’ensemble des écoles par le jeu de l’émulation, de la concurrence. Les écoles les mieux cotées (rapports d’inspection des établissements et note publiés sur internet) sont ceux qui reçoivent le plus de demandes. Les écoles les moins bien cotées verraient les parents se détourner d’eux, perdraient des élèves et seraient obligées de rectifier le tir pour attirer des élèves et des crédits.

Le désespoir de parents qui, du fait que leur maison se trouve une centaine de mètres en dehors du secteur de recrutement, déterminée par le nombre de places et la demande, est de compréhensible. Le prix des résidences dans les secteurs des meilleures écoles prend une surcote parfois de 20 à 30%, alors qu’on sait que le coût de l’immobilier est déjà très élevé.

Quant à la conséquence de la forte natalité dans les banlieues à forte population issue des minorités, l’exemple de Londres est connu. Mais toutes les municipalités sont conscientes des enjeux de ce phénomène et ce aussi depuis une vingtaine d’années.

Les statistiques sur l’appartenance minoritaire, sur la langue maternelle, sur la religion professé, mais aussi sur les familles en difficulté, existent et sont utilisées par les autorités pour essayer de consacrer des efforts supplémentaires, que ce soit en matière de gratuité des repas à la cantine scolaire (mesure étendue à cette rentrée scolaire à tous les enfants de moins de 7 ans pour combattre le déséquilibre alimentaire et la pauvreté, mesure prônée par le vice-premier ministre, Nick Clegg), ou en matière d’enseignement (anglais comme langue étrangère, reconnaissance des fêtes culturelles des différentes minorités).

En 2012, les conseils municipaux dans les villes de Londres, mais aussi Birmingham et Bristol, ayant des populations issues des minorités importantes, mais aussi celles de Bournemouth et Winchester (vers la côte sud à l’ouest de Londres), qui ne sont pas des villes connues pour leur population ethnique, sonnaient l’alarme.

D’autres, face aux conséquences de la construction de quartiers nouveaux sur la population scolaire, ont considéré que l’absorption du surcroît enfants d’âge scolaire dans les établissements existants coulait de source, et n’ont pas intégré la construction de nouvelles écoles dans le plan d’urbanisme, mais ils ne sont pas les seuls. Le plan directeur général (National Policy Planning Framework) de mars 2012 était critiqué pour l’absence de considérations sociales et la décentralisation de la planification (Population Growth and Housing Expansion in the UK Some preliminary considerations, 2013, p.13).

La stratégie de développement du Grand Londres dévoilé fin 2013 par le maire Boris Johnson fait état du besoin de quarante mille nouveaux foyers par an pendant vingt ans, rien qu’à Londres, et propose des solutions pour combler l’écart entre croissance démographique et habitations, mais n’inclut pas de réflexion sur l’impact sur les services publics (santé, éducation, transport par exemples) qui devraient accompagner ces mesures.

D’autres phénomènes expliquent donc l’augmentation de la demande à Londres et dans le Grand Sud-Est. La tendance des jeunes couples chargés de famille de quitter les villes a ralenti, et le nombre de jeunes enfants présents dans les centres urbains a augmenté. A Londres, il manquerait 118 000 places dans les écoles primaires et secondaires. Le Conseil de Londres avait milité en 2009 pour une dotation supplémentaire pour pouvoir créer de nouvelles places, et réitère sa demande en 2014.

La situation était connue dès 2012 et donnait du grain à moudre à l’Opposition. (« Primary schools to rise to 1,000 pupils in places shortage », Sean Coughlan, BBC News, 12 mars 2012Jessica Shepherd, « Labour warns England will be 500,000 primary school places short by 2015 », The Guardian)

A primary school in Barking, east London. The authority is planning a school in a former Woolworths store, with two shifts. Photograph: David Levene for the Guardian, 2012

Le gouvernement Cameron a reconnu le problème posé par l’augmentation de la natalité, en annonçant que les investissements immobiliers pendant 5 ans seraient consacrés aux écoles primaires. En décembre 2013, un budget supplémentaire de 2.3 million de livres sterling pour créer des places dans les établissements scolaires était annoncé.

Les titres des quotidiens sont révèlent le malaise qui règne mais l’examen de la question fait ressortir le refus des autorités nationales d’intervenir dans le sphère de compétences des autorités locales, chargées de l’éducation, qui au Royaume-Uni, est bien plus décentralisé qu’en France (à titre d’exemple, les enseignants ont toujours été des employés territoriaux et non des fonctionnaires de l’État). Les leçons sont à méditer alors qu’en France le transfert des compétences vers les territoires (régions, départements, villes) et la refonte de ces mêmes territoires est en cours.

Références :

Tom Rawstorn, « Classes of 70, four-year-olds forced to commute for three hours and a roof turned into a playground: Why no one will admit immigration is the reason Britain’s primary schools are bursting at the seams “, Daily Mail, 29 août 2014

Richard Garner, Lucy Mote, Juliette Ihler, “Exclusive: Nearly 2,000 families still without school places for their children”, The Independent, 29 août 2014

Richard Garner, « Free school meals: Lib Dems promise to expand policy to all primary school pupils in next parliament », The Independent, 2 septembre 2014

Sean Coughlan, « Primary schools to rise to 1,000 pupils in places shortage », BBC News, 12 mars 2012

Jessica Shepherd, « Labour warns England will be 500,000 primary school places short by 2015 », The Guardian

Fran Adams, « The growth of the ‘Titan’ schools, The Guardian, 23 avril 2012

Tim Ross, « 100,000 pupils crammed into overcrowded state schools », The Telegraph26 octobre 2010

Homes for London, the draft housing strategy 2013, Greater London Authority, 2013

http://www.londoncouncils.gov.uk/policylobbying/children/schools/primarys

Population Growth and Housing Expansion in the UK Some preliminary considerations, Population Matters, janvier 2013

« Quatre mariages et un enterrement » – La politique familiale et la théorie du genre au Royaume-Uni

Après une brève intervention sur LCI le 4 février 2014 dans l’émission de Michel Field dédiée aux politiques familiales en France et ailleurs, après le report par le gouvernement de Jean-Marc Ayrault du projet de loi sur la famille, un rappel des principaux points concernant les questions de l’égalité des sexes, de l’éducation sexuelle, de la procréation médicalement assistée et du mariage gay au Royaume-Uni semble utile.

Depuis la loi de 1967, l’IVG est permise jusqu’à 24 semaines de grossesse, mais il est conseillé de le pratiquer avant 12 semaines. La suggestion de baisser la durée de la grossesse à 12 semaines en 2012, faite par le ministre de la santé, Jeremy Hunt, fut rejetée par la profession médicale et par ses propres collègues femmes au sein du gouvernement conservateur, y compris la ministre de l’Intérieur, Teresa May.

La loi de 1967 a été votée lors des réformes sociales initiées par le gouvernement travailliste sous Harold Wilson, en même temps que d’autres lois anti-discriminatoires promouvant l’égalité quel que soit le genre, l’orientation sexuelle, ou l’origine ethnique. En même temps la censure de la production artistique et les lois sur le divorce furent également repensées. Des lois pour promouvoir l’égalité des chances dans l’éducation, de salaire, de protection de l’emploi, ont progressivement été introduites et une commission parlementaire permanente pour l’égalité et les droits de l’homme (2006), veille à l’application de ces droits et à l’extension des domaines réglementés. Les lois anti-discriminatoires furent étendus à la religion et aux croyances, et à l’orientation sexuelle en 2006-2007.

Á peine dix ans après les réformes sociales des années soixante, la première bébé éprouvette au monde, Louise Brown, est née au nord de l’Angleterre (1978) et la procréation médicalement assistée devient possible dans le système de santé publique britannique. Toutefois elle reste moins pratiquée qu’en France, où deux fois plus de procédures sont lancées. L’utilisation de cellules humaines (cellules souches) dans la recherche médicale, et éventuellement pour la reproduction (cloning ou PMA) à des fins médicaux, a été débattu par la chambre des Lords en 2002.

Ce fut le gouvernement travailliste de Tony Blair qui introduit le PACS (loi de 2005, application depuis 2006) mais le gouvernement de David Cameron qui présida au vote sur le mariage gay en 2013, et ce, malgré une rébellion de nombre des députés conservateurs qui ont voté contre ce projet de loi et une pétition signée par 600000 personnes de confession chrétienne. Alors que la société britannique évolue, le parti conservateur a dû se moderniser en acceptant les nouvelles formes de famille (couples hétérosexuels non-mariés, familles recomposées, familles monoparentales, familles d’homosexuels, familles peu nombreuses ).

Ces questions sont devenues tellement pertinentes que les séries de télévision populaires les ont intégrées à leur storyboard – la mort en janvier 2014, d’un caractère de Coronation Street (ITV, 10 millions de spectateurs par émission), bien que centrée sur la question du droit de mourir, concerne le premier personnage transsexuel permanente dans l’histoire de la télévision (Hayley Cropper, née Harold Paterson) apparue sur les écrans en 1998.

La procréation assistée et les mères porteuses sont juridiquement protégées – et l’adoption par les couples du même sexe est devenue possible depuis la loi de 2002, loi qui permettait aux agences d’adoption catholique de ne pas l’offrir. Un des homosexuels les plus en vue au Royaume-Uni, anobli par la Reine, participe à toutes les célébrations royales : Sir Elton John, marié et père de deux enfants adoptés, nés d’une mère porteuse, a fait son coming out dès 1976.

L’orientation sexuelle et l’enseignement avait déjà fait débat dans les années quatre-vingt lorsque le gouvernement de Margaret Thatcher avait interdit la « promotion de l’homosexualité » dans les établissements scolaires publiques (1988). L’article de loi en question (Section 28 du Local Government Act) fut annulée en 2000 en Écosse, et en 2003 dans le reste du Royaume-Uni. Aujourd’hui, on reconnaît l’existence et la part des homosexuels dans la société britannique.

L’éducation sexuelle obligatoire fut l’objet de débats au parlement britannique en janvier 2014 avant d’être rejetée par la Chambre des Lords. L’éducation sexuelle fait partie de l’enseignement optionnel dans le cursus secondaire, mais devant le nombre élévé de grossesses d’adolescentes (45 conceptions pour 1000 filles de moins de 18 ans, la plus forte en Europe), et des cas qui ont fait la une des journaux à sensation (Baby-faced Alfie Patten is father at 13), de nombreuses mesures sont prises pour essayer d’endiguer ce problème de santé publique (dangers pour la mère et l’enfant) dont l’impact sur la vie des jeunes mères (scolarisation interrompue, pauvreté et exclusion sociale) (voir à ce propos l’ouvrage de Fabienne Portier-Lecoq, Sexualité et maternité des adolescentes : voix anglaises et écossaises, Rennes, PUR, Collection des Sociétés, novembre 2009, 329 p.)

Mais les opinions varient sur l’âge à laquelle un enfant doit recevoir de tels enseignements, si cela ne relève pas du domaine privé, si l’enfant ne doit pas rester ‘innocent’, ou encore, comment protéger les enfants de sites internet pornographiques. La presse écrite, notamment The Daily Telegraph et The Guardian, a relayé et parfois initié ces débats non-partisans.

Sécurité côtière et sécurité routière

Deux articles, l’un dans le Journal du Dimanche (dimanche 13 octobre) et l’autre dans le Daily Telegraph (vendredi 11 octobre) ont attiré mon attention sur un phénomène alarmant et attristant qui est passé quasiment inaperçu ces derniers jours.

La presse française et anglaise ce weekend consacre des pages à la perte de vies humaines au large de Lampedusa et de Malte, aux portes de l’Europe, cette semaine. Selon l’ancien ambassadeur de France à Malte, un quart des clandestins meurent en mer. Sans que cela soit clairement indiqué, nombre de ceux qui ont péri sont jeunes.

Sans que cela soit dans la même ordre de grandeur, le fait que dans la nuit du vendredi 11 au samedi 12 octobre, treize personnes ont perdu la vie en France et cinq autres sont dans un état critique, devrait également nous interpeller. Six accidents de la route se sont produits où par deux fois, quatre jeunes ont péri dans une seule voiture, et dans un troisième encore deux personnes de moins de vingt ans.

Or, à la une du quotidien britannique, on note l’annonce d’un projet pour améliorer la sécurité routière au Royaume-Uni qui consiste en une interdiction pour les jeunes conducteurs (moins de trente ans) de prendre le volant la nuit (entre 22h et 5h) et d’embarquer des passagers de moins de trente ans. Les conducteurs novices (moins d’un an de permis) de plus de trente ans seraient également interdits de volant la nuit et un taux d’alcoolémie moins élevé leur serait appliqué pendant l’année qui suit leur obtention de l’examen de conduite.
Au Royaume-Uni, la conduite accompagné existe depuis toujours. Á partir de dix-sept ans, et avec un permis provisoire, un jeune peut conduire avec à ses côtés un adulte de plus de 21 ans qui détient le permis de conduire depuis plus de 3 ans, sans suivi par les auto-écoles ni kilométrage/nombre d’heures imposés, en affichant un ‘L’ pour ‘learner’ (apprenti). Il n’est pas obligatoire de passer par une école de conduite avant de se présenter à l’examen pratique. Le test écrit du code de la route a été introduit en 1996. Seule mesure de précaution, les jeunes conducteurs (moins d’un an de permis) ont seulement six points (au lieu des douze accordés aux conducteurs expérimentés) avant un retrait du permis.

Si seuls 8% des permis sont détenus par des jeunes de moins de 24 ans, ceux-ci représentent un quart des morts sur les routes britanniques, et 20% des néo-conducteurs ont un accident dans les six premiers mois après leur permis. À présent, un système similaire à celui mis en place en France, avec un minimum d’heures de conduite (120 heures dont 20 de nuit) est envisagé. Depuis 2010, le nombre de décès de la route en France (3992) et au Royaume-Uni (2278), continue de baisser. Le taux de mortalité en 2012 dans les deux pays était de 5.6 pour 100.000 habitants en France et de 2.8 au Royaume-Uni selon la Commission européenne.

Pour mettre la sécurité routière en perspective, les fatalités routières, 1.3 million par an, sont une des premières causes de décès dans le monde (Washington Post, 18 janvier 2013). Depuis 2011, l’ONU et l’OMS, soutenues par la Fédération internationale de l’automobile, ont initié une campagne internationale pour la sécurité routière (voir la carte interactif de l’OMS).

Politiques familiales et politiques d’emploi « genrées » au Royaume-Uni et en Europe

Signalons la parution du numéro 14 (2013) de l’Observatoire de la société britannique consacré au « Politiques familiales et politiques d’emploi « genrées » au Royaume-Uni et en Europe » et dirigé par Susan Finding et Anémone Kober-Smith. ISBN 978-295404734. 204p. 12€.

Table des matières

1. Politiques familiales et politiques d’emploi « genrées » au Royaume-Uni et en Europe

Susan FINDING (Université de Poitiers) & Anémone KOBER-SMITH (Université de Paris 13)

2. Gendered Organizations and Working Lives: continuities, change and policy engagement

Susan HALFORD (University of Southampton) & Pauline LEONARD (University of Southampton)

3. Women’s and men’s career interruptions in Europe: the role of social policies

Rosy MUSUMECI (Università da Torino) & Cristina SOLERA (University of Turin)

4. Dual Earner Parents Strategies for Reconciling Work and Care in Seven European Countries

Pamela ABBOTT (University of Aberdeen), Corinne NATIVEL (Université de Paris XIII) & Claire WALLACE (University of Aberdeen)

5. Private Assistants in the Italian Care System: Facts and Policies

Giuliana COSTA (Politechnico, Milano)

6. La politique familiale à l’épreuve des stéréotypes de genre : une comparaison France – Royaume-Uni – Suède

Natacha Ordioni (Université du Sud Toulon-Var)

7. Emplois genrés et les services à la personne au Royaume-Uni : la petite enfance

Susan FINDING (Université de Poitiers)

8.   British women’s human capital and employment evolution under New Labour

Catherine CORON (Université Panthéon-Assas)

9. Gender, education and employment within the education system in Britain

Susan FINDING  (Université de Poitiers)

Contacts

Observatoire de la société britannique
Faculté des Lettres et des Sciences Humaines
Université du Sud Toulon-Var
83957 La Garde cedex
France

Commandes

Les commandes sont à adresser à à Gilles Leydier à l’adresse ci-dessus.
Les chèques sont à libeller à l’ordre de M. l’Agent comptable de l’Université de Toulon.