“les métropoles sont-elles les villes les plus performantes ?” Echanges avec Denise Pumain

La revue Espaces et Sociétés nous a proposé début 2021, à Michel Grossetti et à moi, d’écrire un article relatif à notre analyse du récit métropolitain, en nous indiquant que Denise Pumain, grande dame de la géographie française, réagirait à notre texte.

Nous avons immédiatement accepté cette proposition, qui s’est traduite finalement par des allers-retours que la revue vient de publier (accès abonnés ici) sous forme d’un long article titré « les métropoles sont-elles les villes les plus performantes ? ». La première partie est composé de notre article, « métropoles : les dangers de la substantialisation d’une catégorie d’analyse », de la réaction de Denise Pumain à notre article, de notre réponse à sa réponse, puis, finalement, de sa réponse à notre réponse.

Ce fut un exercice particulièrement intéressant, qui nous a permis de clarifier différents points de notre argumentation, de constater des points de convergence entre notre analyse et la sienne (dès lors notamment qu’on s’entendait sur la définition de certains termes, les questions de définition ne sont pas les dernières dans les désaccords apparents entre chercheurs), mais aussi des points de divergence, qui demeurent.

Il me semble que le point principal de divergence concerne nos analyses respectives du processus d’innovation : Denise Pumain développe une analyse que je qualifierais d’épidémiologique, selon laquelle les métropoles seraient les lieux premiers d’apparition des innovations, qui se diffuseraient ensuite progressivement au reste du système urbain. Nous contestons ce point, sur la base, notamment mais pas seulement, de nos travaux de terrain, en considérant que les innovations naissent dans de très nombreux points de l’espace, elles ne sont pas limitées aux plus grandes villes, loin de là.

Ce n’est pas un hasard si c’est autour de cette question de la géographie de l’innovation que le débat demeure : il y a un large consensus autour de l’importance de l’innovation, mais c’est l’objet pour lequel, paradoxalement, on dispose du moins de données pertinentes. Les chercheurs approchent le phénomène pour l’essentiel en étudiant les dépenses de recherche, les brevets ou les publications, mais c’est un une façon très incomplète et très insatisfaisante de l’analyser. Difficile, donc, d’obtenir des résultats robustes sur les processus d’émergence et de diffusion des innovations, en dépit de leur importance.

Covid 19, épisode 3 : sur la mortalité

Petit billet un peu glauque sur le nombre de morts dû à l’épidémie et sur la mortalité en général, afin de mettre en perspective et un peu à distance le décompte anxiogène assené chaque soir.

Première point sous forme de question : savez-vous combien de personnes décèdent en France, en moyenne, chaque jour ? En 2019, on comptait 612 000 décès, soit 1 676 décès par jour (source ici). Dans le même temps, on dénombrait 753 000 naissances, soit 2 063 par jour (source ici).

Deuxième point : à côté des chiffres publiés par Santé Publique France, l’Insee a décidé de publier chaque semaine le nombre de décès quotidien toutes causes confondues, et de le comparer aux mêmes chiffres de 2018 et de 2019 (voir ici). La première livraison couvre la période du 1er au 20 mars 2020 pour les annonces dématérialisées de décès (qui arrivent plus vite à l’Insee) et du 1er au 16 mars pour l’ensemble des décès (transmis par voie dématérialisée et par voie papier).

Je me concentre sur ces derniers chiffres. Ils montrent que, pour l’instant, l’épidémie ne se traduit pas, à l’échelle du pays, par une surmortalité comparativement à 2018 et à 2019 (à noter la mortalité sensiblement plus forte en 2018 qu’en 2019, ceci notamment en raison d’une épidémie de grippe plus virulente et plus longue) :

Je dis bien pour l’instant, car il semble que nous soyons encore éloignés du pic épidémique. Je dis bien, surtout, à l’échelle du pays, car les chiffres de l’Insee par département montrent que certains connaissent dès à présent un nombre de décès bien supérieur à celui des années précédentes.  Neuf départements connaissent ainsi un nombre de décès supérieur de 10% ou plus à celui de l’année passée :

Libellé

décès 2020

décès 2019 écart Ratio
Mayotte 42                    30                    12 1.4
Haut-Rhin 417                  302                  115 1.38
Corse-du-Sud 88                    67                    21 1.31
Deux-Sèvres 182                  143                    39 1.27
Creuse 82                    70                    12 1.17
Vosges 219                  189                    30 1.16
Aisne 286                  249                    37 1.15
Oise 339                  297                    42 1.14
Haute-Saône 105                    93                    12 1.13

Parmi ces départements, certains sont fortement impactés par l’épidémie, comme le Haut-Rhin (290 décès recensés par Santé publique France au 27 mars), l’Oise (66 décès) ou les Vosges (56 décès). Mais d’autres, en apparence, ne le sont pas, comme les Deux-Sèvres et la Creuse : aucun décès recensé par Santé publique France en Creuse, 2 dans les Deux-Sèvres, toujours à la date du 27 mars. Sans que l’on sache, pour ces deux derniers départements, si l’écart est dû à d’autres causes de mortalité, où à des décès liés au Covid 19 non recensés par Santé publique France.

Métropoles rayonnantes ou métropoles repoussantes ?

L’Insee Ile-de-France vient de publier une note intitulée « Un rayonnement économique de l’agglomération parisienne plus intense vers l’ouest ». Note très intéressante, qui s’intéresse aux liens entre Paris, l’Ile-de-France et les territoires alentours, et qui montre notamment que les interdépendances sont plus fortes à l’Ouest qu’à l’Est de la région capitale.

Note intéressante, j’insiste, car l’enjeu, en termes d’analyse de la géographie économique, consiste à se focaliser sur les interdépendances territoriales, plutôt que de continuer à comparer des portions d’espaces géographiques considérées comme des entités en concurrence les unes avec les autres. Toute étude qui s’intéresse aux liens plutôt qu’aux lieux est donc bienvenue.

Le vocabulaire employé, cependant, m’a fait tiquer (d’où ce billet).

  • Le titre, d’abord, où l’on parle de « rayonnement », j’y reviens plus loin,
  • L’idée selon laquelle l’Ile-de-France « dégage plus de 40% de la richesse nationale » : on ne sait pas calculer la richesse générée par un territoire, dès lors qu’on dispose de données sur la valeur ajoutée à l’échelle de l’entreprise, pas des établissements. L’Insee s’en remet donc, pour approcher la richesse créée, aux salaires versés dans les établissements pour ventiler la valeur ajoutée. D’après les données disponibles, l’Ile-de-France concentre un peu moins d’1/3 des salaires versés, non pas 40%. Pas trop d’informations dans la note pour comprendre le calcul, j’espère qu’il ne s’agit pas de l’addition des valeurs ajoutées des sièges sociaux d’Ile-de-France,
  • L’emploi du terme de « redistribution », ensuite, dans cette phrase : « Les territoires de ce bassin sont interconnectés et reliés entre eux par des flux économiques, qui redistribuent les richesses via les flux salariaux et commerciaux ». Verser des salaires, ce n’est pas faire de la redistribution géographique des revenus, c’est faire de la distribution des revenus. Payer les gens qui ont bossé, quoi.

J’en reviens au point principal : l’idée de rayonnement. La même idée était défendue par Gérard Collomb, suite à une étude commandée à Laurent Davezies, indiquant que Lyon « redistribuait » 9 milliards d’euros aux territoires environnants. Paris et Lyon sont généreuses : elles versent des salaires aux gens qui y travaillent, mais qui n’y résident pas.

Petite histoire pour faire passer le message : Emmanuel et Jeanne se sont rencontrés sur les bancs de la fac de Bordeaux (vous pouvez modifier avec la grande ville de votre choix), ont décidé d’emménager ensemble dans le studio (un peu plus grand) de Jeanne, le temps de finir leurs études. Ils ont l’un et l’autre trouvé un emploi à la fin de leur master (comme la très grande majorité des diplômés de Master des universités françaises, soit dit en passant).

Chemin faisant, ils ont eu envie d’avoir un enfant : logement trop petit, il faut trouver un nouveau toit. Loyer prohibitifs sur Bordeaux, ils décident donc de s’éloigner et de prendre un logement sur Libourne.

Supposons que cette histoire soit représentative. Agrégeons ces histoires individuelles. On constatera que les personnes qui viennent travailler sur Paris, Lyon, Bordeaux, …, viennent de plus en plus loin. Non pas parce que ces villes « attirent », mais bien parce qu’elles « repoussent ». Avec une montée des processus de gentrification, au centre, qui interroge.

Mon sentiment est que l’évolution de la géographie de l’emploi est un produit des deux logiques : attraction de certaines catégories de personnes, éviction d’autres catégories. Il convient de mieux documenter ces processus, en faisant attention au vocabulaire employé, qui n’est pas neutre. Pour mieux cerner, ensuite, les enjeux en termes d’action publique.

Pour un nouveau récit territorial

Vient de paraître mon dernier petit ouvrage, intitulé “pour un nouveau récit territorial”. Vous pouvez le télécharger et le lire ici. Il fait suite à une conférence prononcée lors du lancement du programme de recherche « pour et avec les petites villes » (mais j’ai beaucoup retravaillé le texte, la conférence et l’ouvrage diffèrent sensiblement), conférence que vous pouvez voir ici (mon intervention se déroule entre 10’45 et 39’15).

 

La fusion des régions : inutile, coûteuse et irréversible

France Culture vient de mettre en ligne les résultats d’une enquête sur la région Occitanie, fusion des anciennes régions Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon, qui montre que les frais de fonctionnement ont explosé (dans une vidéo France Inter insérée dans l’article, on apprend que les frais de fonctionnement sont passés de 2,4 à 3,5 milliards). En fin d’article, il est également mentionné que, après fusion, les budgets régionaux restent tous petits : 30 milliards pour l’ensemble des régions françaises, contre 23 milliards pour la seule Catalogne.

Résultats tout sauf surprenant.

Cette fusion des régions, d’abord, était inutile : elle a été menée sous le prétexte que les régions françaises étaient trop petites, qu’il fallait absolument se rapprocher du modèle des länder allemands (les régions allemandes font rêver, pas la structure urbaine allemande, plus équilibrée que la structure française, soit dit en passant), car des régions plus grandes, effets “masse critique” obligent, seraient plus performantes. Pour réduire le “millefeuille” institutionnel français, ensuite, en supprimant la clause de compétence générale et en spécialisant les collectivités (les départements ne pouvant plus faire de développement économique notamment). Sur le premier point, après fusion, les régions françaises restent des nains, comme cela a été indiqué dès 2016. Sur le deuxième point, on ne peut pas dire que l’on ait beaucoup avancé, quand on observe la résistance des conseils départementaux pour continuer à exister sur le volet développement économique. De plus, rien n’empêchait de spécialiser les collectivités sans passer par une fusion des régions.

Une réforme coûteuse, ensuite, ce qui était également très prévisible : le cas de l’Occitanie est bien documenté par France Culture. Pour voir régulièrement ce qu’il en est en Nouvelle-Aquitaine, je dirais que le problème est au moins de même niveau, voire pire. J’ajouterais que le problème n’est pas que comptable : oui, les budgets de fonctionnement ont explosé après fusion, vu les déplacements que les agents doivent faire, mais en plus, ça épuise physiquement, ces déplacements. Ajoutons les problèmes de gouvernance liés à la gestion impossible d’organisations de si grande taille. Ce dernier élément est d’ailleurs assez cocasse : la plupart des réformes récentes dans la fonction publique visent à introduire des éléments de gouvernance dérivé de ce qui se fait dans le privé (définition d’indicateurs de performance, orientation des moyens en fonction de ces indicateurs, etc.), mais on oublie que dans le privé, vous ne trouverez plus d’entreprises de grande taille, vu les problèmes d’organisation interne que cela pose. Dans le public, que l’on parle des régions ou des universités, on fait strictement l’inverse, d’où un renforcement de la bureaucratie. L’idée selon laquelle en fusionnant on va disposer d’entités de plus grande taille qui vont pouvoir faire des économies d’échelle est de mon point de vue contestable : on aurait mieux fait de favoriser les collaborations interrégionales pour grouper certaines commandes publiques et profiter d’économies d’échelle sans faire tomber tout le monde dans un tel bazar organisationnel.

Inutile, coûteuse, mais irréversible : il en va ainsi de certaines réformes, on s’aperçoit assez vite de leurs lacunes, mais faire machine arrière coûterait plus cher, donc il faut s’en accommoder. Ce ne serait pas inutile, quand on décide d’une nouvelle politique, de mesurer son degré d’irréversibilité, et de ne mettre en œuvre ladite politique que si l’on a pris le temps d’évaluer précisément son intérêt. En l’occurrence, avoir mis en œuvre une politique à la fois inutile, coûteuse et irréversible, comment dire… ça relève de l’exploit.

Chère Noémie

Chère Noémie,

Alors que je me rends tranquillement à Sète depuis Poitiers (quand je dis tranquillement, j’euphémise, car le trajet est un peu long et pénible, un peu plus de 7h de train pour tout vous dire), je découvre le mail que vous venez de m’adresser :

Bonjour,

Nous sommes une start-up civique qui édite un journal innovant : Le Drenche. Il s’agit d’un journal de débat dans lequel vous pouvez lire le “Pour” et le “Contre” de chaque sujet. Le but de ce journal est de permettre aux lecteurs de se forger leur propre opinion.

Le Drenche, c’est également l’assurance d’une tribune qui ne sera ni modifiée, ni tronquée, et de toucher de nombreux lecteurs sur internet et les réseaux sociaux. Nous imprimons également une version papier tirée à 80 000 exemplaires et distribuée aux étudiants.

Pour vous faire une idée, vous pouvez visiter notre site : https://ledrenche.fr/ ou lire une de nos dernières publications : https://ledrenche.fr/2018/09/agriculture-sans-pesticides-possible-1557/

Dans le cadre du débat actuel, nous souhaitons traiter la question : “Allocations chômages : doivent-elles être dégressives pour les cadres ?”.

Étant donné votre légitimité sur le sujet, nous aimerions beaucoup que vous défendiez le “Pour” dans un article de 350 à 400 mots (environ 1/2 page word) qui paraîtra sur notre site Le Drenche et celui de LCI ; votre tribune est à remplir dans le formulaire word ci-joint. Vous aurez bien sûr un contradicteur qui défendra l’avis opposé.

Il nous faudrait votre tribune pour ce soir au plus tard, est-ce possible pour vous ?

Merci beaucoup, et n’hésitez pas à me contacter pour toute information complémentaire.

Bonne journée,

Je me permets donc de vous répondre ceci :

  • non, ce n’est pas possible pour moi : je vais arriver tard à Sète, j’ai autre chose à faire que de répondre à un mail reçu à 16h30 pour le soir même, mais je vous remercie pour la sollicitation, dites à LCI que je ne suis pas dispo, disons que j’ai piscine,
  • considérer que sur tout sujet, mettre en débat le “pour” et le “contre”, le livrer à l’ensemble des lecteurs, croire que cela permettra à chacun de se forger sa propre opinion, est une excellente idée. J’ai vu par exemple que vous aviez proposé comme sujet des choses sur la légalisation de la prostitution, ou le rétablissement de la peine de mort, je vous encourage donc à poursuivre. Peut-être que quelque chose autour de la lapidation des femmes adultères serait une bonne idée ? N’hésitez pas à me solliciter pour des contacts,
  • J’ai vu dès le début de votre message que vous étiez une “startup” éditant un journal “innovant” (sur votre site, j’ai pu voir que vous vous réclamiez de la “french tech” et de l’ “économie sociale et solidaire”, et à plein d’autres partenaires), j’imagine donc que vous récoltez tout un ensemble de fonds permettant d’assurer votre développement, ce qui est une bonne chose : que deviendrait notre beau pays sans des startups innovantes telles que la votre ?

La Catalogne, moteur économique de l’Espagne ?

Lors de sa déclaration d’indépendance-enfin-on-sait-pas-trop, Carles Puigdemont a affirmé que depuis la mort de Franco, la Catalogne était le moteur économique de l’Espagne.

Cet argument économique, même s’il n’est pas le seul, est souvent repris par les régions pour revendiquer leur indépendance. En gros, l’idée est la suivante : on en a marre de créer les richesses, de se les faire piquer par l’État central qui les redistribue aux régions pauvres peuplées de fainéants. Cf. l’Italie du Nord (vs. l’Italie du Sud), la Flandre (vs. la Wallonie), la Catalogne (vs. les autres régions espagnoles).

Mais, dans le cas de la Catalogne et de la période actuelle, est-ce le cas ? Pour en juger, on peut collecter des données sur les PIB, le nombre d’habitants, l’emploi, etc., calculer les PIB par habitant, les décomposer en PIB par emploi et emploi par habitant, en suivant la méthodologie que Michel Grossetti et moi avions proposé pour le cas français dans cet article de la Revue de l’OFCE.

C’est à cet exercice que nous nous sommes livrés avec Emmanuel Nadaud, en nous concentrant sur les pays de l’Union à quinze, soit 214 régions NUTS2, avec des données 2011. Nous en avons tiré un article présenté en juillet dernier à Athènes, qui insiste sur la diversité des contextes régionaux.

Source : Nadaud E., Bouba-Olga O., 2017, “La richesse des régions européennes : au-delà du PIB par habitant”, Colloque ASRDLF, Athènes, juillet. Lien : https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01533348/document

[Edit : paragraphe modifié, erreur de lecture de la carte, c’est corrigé (17/10/2017)] Les zones en rouge correspondent aux régions présentant les plus faibles valeurs de l’indicateur concerné (1er quintile), les zones en vert foncé présentent les plus fortes valeurs (5e quintile). La Catalogne est quant à elle dans une situation médiane (3ème quintile) pour le PIB par habitant et pour le ratio emploi par habitant. Deuxième quintile en revanche pour le PIB par emploi (la productivité apparente du travail). Plusieurs régions espagnoles sont visiblement dans une meilleure situation.

Je suis retourné aux chiffres précis, en rapportant les valeurs observées pour les régions espagnoles à la moyenne de l’Union à 15 pour construire des indices qui valent 100 si la valeur observée dans la région est égale à la valeur observée en moyenne.

Le PIB par habitant de l’Union à 15 est de 30 219€ en 2011, le PIB par emploi monte à 66 814€. La Catalogne est sensiblement en dessous, avec des indice de 89 pour le premier indicateur (le PIB par habitant de la Catalogne est donc égal à 89% du PIB par habitant de l’Union à 15) et de 87 pour le deuxième.

Surtout : la Catalogne arrive en quatrième position des 19 régions espagnoles pour le PIB par habitant, derrière la région de Madrid (indice de 103), le Pays Basque (99) et la Navarre (95). Elle passe même au 5ème rang pour la productivité apparente du travail : le Pays Basque est en première position (indice de 95), devant la région de Madrid (93), la Navarre (92) et la Rioja (88).

Difficile, dès lors, d’affirmer que la Catalogne est le moteur économique de l’Espagne.

C’est grave docteur ? Non. Comme expliqué dans mon petit livre, il faudrait sortir de ces analyses qui voient les territoires comme des entités en concurrence les unes avec les autres. Les processus productifs traversent les frontières, chaque territoire pouvant être vu comme un petit bout de petit monde, spécialisé de manière plus ou moins avantageuse sur des fragments de processus productifs. Plutôt que de penser ce qui sépare, mieux vaut comprendre ce qui relie.

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#Résolutions2017

Mes résolutions, déversées tout hier sur Twitter, reprises ci-dessous, pour cette année qui vient :

  1. Arrêter d’être pressé : à force d’être pressé, on n’a plus de jus #SlowScience #SlowCity #SlowLife #Tropicana
  2. Dire aux gens qui disent que « c’était mieux avant » qu’ils étaient mieux, avant #CestPasSur #OnPeutEtreConJeune
  3. Eteindre les réunions lorsque j’assiste à mon portable #JaiLaTourneQuiTête
  4. Arrêter de répondre en retard aux emails. Supprimer mes boîtes mails, donc. #DestructionSalvatrice #JosephAlois
  5. Courir n’importe comment. Ne plus courir avec application, en tout cas : ni #Runtastic, ni #Runkeeper
  6. Ne pas se moquer du Comue Out de #larochelle ni de #Orléans… #PasFacile #RhoLesConsQuandMême #OnRigoleDansLePwatoo
  7. Arrêter d’être énervé par des chercheurs qui disent n’importe quoi. Si pas possible, arrêter d’être énervé d’être énervé
  8. Ne plus rendre mes corrections de copies en retard. Se contenter de QCM à une question, pour cela #FaisonsSimple
  9. Aller à Paris plus souvent pour gagner en productivité #LaBêtiseEstDansLairConRespire #AtmosphèreJaiUneGueuleDAtmosphère
  10. Rester humble. Sur l’innovation, Moses Abramovitz a tout dit dans les années 50 #RabâcherCestExister
  11. Expliquer la tendance archaïque à vouloir avoir la plus grosse (ville, région, université) #CestQuoiTonProblème #Rocco
  12. Faire passer une idée à celui qui t’écoute. Qu’il la découvre lui. Lui donner l’envie de la découvrir par lui-même
  13. Apprécier une gorgée de bière, un morceau de musique, ce bref instant qui passe. Ces petits riens qui sont des petits touts.

Très bonne année à vous tous !

Dis, c’est quoi, un chercheur ?

–          Dis, c’est quoi, un chercheur ?

–          Un chercheur ? Quelqu’un qui se pose des questions…

–          Mouaif… je connais beaucoup de gens hors recherche qui se posent des questions… Beaucoup de gens dans la recherche qui ne s’en posent pas trop, aussi…

–          Pas faux…

–          …

–          C’est quoi, un chercheur, alors ?

–          Un chercheur ? Un vrai chercheur ? Quelqu’un qui se pose des questions sur les questions qu’il se pose…

Questions à Jacques Levy

Bonsoir, Jacques,

Dans votre contribution au numéro spécial de l’OFCE intitulée “nouvelle économie régionale et réforme territoriale”, vous expliquez que : “l’Île-de-France a généré en 2012 un PIB de 624 milliards d’euros, soit 30 % du PIB national avec une productivité par habitant près de deux fois supérieure à celle du reste de la France métropolitaine. Elle peut donc manifester sa solidarité avec le reste du pays tout en gardant les moyens de gérer son développement. Mais le peut-elle avec un budget régional de 5 milliards d’euros, soit 0,8 % de son PIB ?”

Comme expliqué dans le même numéro, dans un article co-écrit avec Michel Grossetti, le PIB par habitant est tout sauf un indicateur de productivité, il cache beaucoup de choses un peu complexes, que vous connaissez, sans doute.

Juste après, vous poursuivez : “Par ailleurs, malgré l’immense production de richesse à laquelle ils contribuent, les pauvres d’Île-de-France sont encore plus pauvres que ceux des autres régions. La cause en est un prélèvement massif, bien que silencieux, qui fait que, en fin de compte, les revenus des Franciliens sont simplement proportionnels à leur part dans l’emploi, leur surproductivité n’ayant pratiquement pas d’effet sur leurs revenus finals.”

D’où ma question : qui sont ces gens qui prélèvent l’argent des pauvres d’Ile-de-France pour le redonner aux pauvres des régions de province, tellement moins productifs ? Comment font-ils (qui est ce “ils”) pour que tout cela ne se voit pas, pour être si silencieux ? Comment accepter, mince, que leur surproductivité n’ait aucune incidence sur leur revenu final ? Parce que quand même, c’est un peu fort de café, ça ne me semble pas très juste.

Très bêtement, sans doute, je me dis qu’il faudrait en finir avec ces histoires de comparaisons entre régions, entre pays, ne plus jouer Paris contre la province, Bordeaux contre Lyon, la France contre le reste du Monde, accepter les interdépendances,  les spécificités, savoir quelle place on veut y prendre, ce qu’on peut apporter, plutôt que ce que l’on peut  y perdre. Faire un peu attention aux données, aux indicateurs, aux définitions, aussi, pour ne pas dire de bêtises.

Merci pour vos réponses, et veuillez m’excuser par avance pour la naïveté de mes questions.