La triste histoire des bacs professionnels : supplément au Monde

L’éditorial du Monde daté de demain nous raconte la triste histoire des bacs professionnels. J’en rajoute une couche, car l’histoire est encore plus triste que ce que nous dit le Monde et j’aime bien faire pleurer dans les chaumières.

Le Monde nous dit que le bac professionnel est en apparence une réussite, 188 000 jeunes l’ont obtenu en 2012, ce qui a permis de tenir l’objectif de 80% d’une classe d’âge au bac. 47% souhaitent poursuivre dans le supérieur, soit en BTS, soit en IUT.

Sauf que, c’est là que l’histoire triste commence, ils ne parviennent que difficilement à accéder à ces formations courtes professionnalisantes, leur route étant barrée par les autres bacheliers (notamment en IUT, c’est moins vrai en BTS). Dépités, ils se tournent donc vers les filières universitaires hors IUT (car je rappelle que les IUT sont des filières universitaires) où ils échouent lamentablement, n’étant pas du tout préparés à ce type d’étude. Deuxième et dernière étape de l’histoire triste contée par le Monde.

Comme promis, je vous raconte le troisième épisode, oublié par le Monde, qui rend l’histoire encore plus triste : les autres bacheliers qui s’inscrivent dans les filières courtes professionnalisantes, qui barrent donc la route aux bacs pro, que font-ils une fois leur diplôme en poche? Ils vont sur le marché du travail? Que nenni! Côté IUT (je n’ai pas les chiffres, sensiblement inférieur je pense pour les BTS), 60 à 80% bifurquent vers les filières longues des universités! On forme donc en IUT des personnes dans l’optique qu’elles aillent rapidement sur le marché du travail, mais elles n’y vont pas. Pendant ce temps, ceux qui voudraient une formation courte du supérieur pour y accéder ne peuvent pas y aller.

On peut poursuivre encore un peu : en plus des bacs pro, les autres bacheliers aux dossiers les plus faibles, qui voudraient aussi accéder aux IUT/BTS pour faire des études courtes et entrer sur le marché du travail, voient tout autant leur route barrée. Ils viennent donc échouer sur les bancs de la fac. D’où le taux d’échec constaté. Plutôt que de remédier à l’organisation calamiteuse du système d’ensemble, on explique aux filières universitaires hors IUT que ça va pas, on injecte de l’argent (plan licence, tout ça), on se désespère un peu partout, côté étudiants qui échouent, côté enseignants-chercheurs qui ne savent pas gérer ce type de public mal préparé et qui n’a pas envie d’être là, côté parents qui s’arrachent les cheveux, etc.

Ce n’est pas la triste histoire des bacs professionnels : c’est la triste histoire de l’organisation du système de l’enseignement supérieur… Et encore, je n’ai pas parlé des classes prépas et des écoles, ni, en amont, de la triste histoire de l’orientation après le collège… J’aime bien faire pleurer dans les chaumières, mais pas trop quand même…

Percevoir des allocations décourage-t-il de travailler?

Question récurrente dans le débat public : est-ce qu’octroyer des allocations à des personnes sans emploi ne les inciterait pas à ne pas travailler (les petites feignasses, serais-je tenté d’ajouter) ?

L’Insee s’est emparé de ce sujet en se concentrant sur le cas du RMI et du RSA. Une des difficultés de ce type d’évaluation est que, pour pouvoir mesurer l’impact précis d’un dispositif, il faut pouvoir contrôler tout un ensemble de biais potentiels, chose souvent difficile à moins de recourir à des expériences contrôlées, consistant par exemple à tirer au sort des personnes bénéficiant du dispositif (groupe test) et d’autre personnes n’en bénéficiant pas (groupe témoin). Stratégie souvent difficile voire impossible à mettre en œuvre pour tout un ensemble de raisons que je ne développerai pas ici.

Une autre stratégie, adoptée dans le cas de cet étude, consiste à comparer deux groupes de personnes très proches. En l’occurrence, de comparer des jeunes sans enfant, d’un tout petit peu moins de 25 ans, ne bénéficiant donc pas du RMI ou du RSA, à des jeunes toujours sans enfant, d’un tout petit peu plus de 25 ans, pouvant bénéficier de ces dispositifs. Les deux groupes étant quasiment identiques aux abords de la limite d’âge, le premier groupe constitue donc un groupe témoin presque parfait tandis que le second, le groupe test, est potentiellement affecté dans ses choix par la possibilité de recourir au RMI/RSA.

Résultat attendu : si le RMI et le RSA désincitent à travailler, on devrait observer une rupture dans les taux d’emploi entre les deux groupes de personne. En l’absence de rupture, pas d’effet désincitatif. En cas d’effet, on peut également en mesurer l’ampleur.

Résultat de l’étude (résumé ici, étude complète ) : pas de rupture nette dans les taux d’emploi à 25 ans pour l’ensemble des jeunes sans enfant, ce qui indique que le RMI et le RSA n’auraient pas d’effet désincitatif marqué sur l’emploi des jeunes autour de cet âge. Une légère rupture dans les taux d’emploi est toutefois décelable pour les jeunes les moins diplômés (ayant au mieux le brevet des collèges) lors des premières années de l’étude (2004 et 2005), mais elle n’est plus repérable par la suite, en particulier après la mise en place du RSA.

Et la rupture est légère, j’insiste : “L’effet désincitatif du RMI sur l’emploi des jeunes célibataires sans enfant autour de 25 ans pour la période 2004-09 semble très faible et circonscrit à une population spécifique (jeunes célibataires sans enfant et non diplômés). Selon les spécifications, entre 1,7 % et 2,9 % de ces jeunes seraient découragés de travailler en raison du RMI, ce qui représente seulement entre 2,0 % et 3,4 % des jeunes allocataires du RMI de 25 ans, célibataires et sans enfant” (extrait de la conclusion).

Bien sûr ce résultat n’est pas généralisable à d’autres catégories de personnes, d’autres dispositifs, etc., mais, sur la base de ces résultats, la réponse à la question titre de cet article est claire : non.

Le graphique qui tue

Via Paul Krugman, ce graphique saisissant, sur l’évolution de l’espérance de vie de 1990 à nos jours, aux Etats-Unis :

Krugman y voit le rôle de l’éducation et des inégalités (“les inégalités ne sont pas seulement injustes : elles tuent”). Ok, mais je ne comprends pas l’évolution différenciée entre blancs, noirs et hispaniques…

Guillaume Duval évoque rapidement sur Facebook l’effet des politiques Reagan et Bush (j’aouterais Clinton 1993-2001 quand même ;)), mais idem, j’ai du mal à comprendre l’influence différenciée selon les groupes.

Vu les commentaires qui circulent autour de ce graphique, je me dis que certains ont tendance à y voir ce qu’ils veulent y voir. Personnellement, je trouve le graphique saisissant, mais côté explications, je ne vois pas…

L’Allemagne a du mal à reproduire “le modèle allemand”…

Document intéressant de Jacqueline Hénard, mis en ligne par La Fabrique de l’Industrie (Think Tank créé il y a quelques temps par Louis Gallois), intitulé “L’Allemagne : un modèle, mais pour qui?”. Il ne s’agit pas d’une nouvelle analyse, mais d’une synthèse de travaux récents, avec des sources côté français et côté allemand. Neuf chapitres courts, bien documentés.

Jacqueline Hénard rappelle notamment qu’il y a un peu plus de dix ans, l’Allemagne était considérée comme “l’homme malade de l’Europe”… Qu’il n’y a pas de “modèle allemand”, mais des réussites à l’échelle des Lander et des entreprises plus qu’à l’échelle du pays dans son ensemble. Que s’il y a un pays qui a du mal à reproduire le prétendu modèle allemand, c’est… l’Allemagne (dans l’ex-RDA). Que les caractéristiques du système économique allemand s’inscrivent dans l’histoire longue, parfois très longue pour certaines d’entre elles.

Conclusion forte, à laquelle je souscris totalement : quoique l’on pense de l’Allemagne, ce pays n’a pas procédé par imitation d’un modèle quelconque, mais plutôt par analyse de ses forces/faiblesses intrinsèques et mise en oeuvre ensuite de politiques jugées adaptées par les différents gouvernements.

Synthèse pas inutile, donc. Si on veut monter en généralité, on pourrait dire que ce document illustre l’intérêt des analyses en termes de diversité des capitalismes, qui rend stérile toute démarche procédant par tentative d’identification puis de reproduction d’un modèle prétendument supérieur. Il invite plutôt à un travail d’introspection ou, dit autrement, de prise en compte du contexte dans lequel s’inscrit le pays dont on souhaite la transformation : quels sont nos atouts? nos faiblesses? quelles solutions peut-on mettre en oeuvre? Quel est le coût économique ou social de ces solutions? etc.

Qui sont tes amis Facebook?

Voici les résultats de la petite enquête lancée il y a quelques temps, afin de dire des choses sur les réseaux socionumériques, en l’occurrence sur Facebook. Les trois questions clés de l’enquête étaient les suivantes, elles ont permis de définir trois variables :

  1. Combien avez-vous d’amis Facebook? variable X
  2. Parmi vos amis Facebook, combien résident dans la même ville que vous? variable Y
  3. Parmi vos amis Facebook, combien de personnes n’aviez-vous jamais rencontré physiquement avant d’être amis sur Facebook? variable Z
S’agissant de la deuxième question, j’aurai préféré demander aux enquêtés le nombre de personnes résidant dans la même région plutôt que la même ville, mais c’est plus compliqué à obtenir sur Facebook.

A partir des valeurs de ces variables, j’ai défini deux indicateurs :

  1. le degré de proximité relationnelle, égal à (X-Z)/X. En clair, il s’agit de la proportion d’amis Facebook que vous aviez rencontré physiquement avec d’être amis sur Facebook.
  2. le degré de proximité géographique, égal à Y/X.
217 personnes ont répondu (un peu plus, mais il y avait quelques réponses incomplètes que j’ai supprimé). L’échantillon n’a rien de représentatif, ce n’était pas l’objectif. Voici les caractéristiques de base des personnes interrogées, pour les variables quantitatives, d’abord :
variable modalité %
genre homme 59%
femme 41%
Ville Poitiers 34%
Paris 12%
Autres 55%
niveau d’étude <bac +3 28%
bac+4 ou 5 49%
>bac+5 24%
utilisation Facebook tous les jours 80%
moins souvent 20%
Puis pour les variables qualitatives :
variable moyenne
age moyen 31,9
nombre d’années résidence 10,1
nombre d’amis Facebook 199,7
nb années sur Facebook 4,1

Le degré de proximité relationnelle

Premier résultat essentiel : le degré de proximité relationnelle des personnes enquêtés est particulièrement élevé. Moyenne de 93%, médiane de 99%, premier quartile de 97%, premier décile de 80%. Résultat conforme à mes attentes : Facebook ne permet pas, pour l’essentiel, de se faire de nouveaux amis, il permet d’entretenir des relations avec des amis que l’on s’est fait hors ligne. Résultat conforme à cette étude américaine.
J’ai estimé un petit modèle économétrique, avec pour variable expliquée le degré de proximité relationnelle et pour variables explicatives les différentes variables disponibles. Voici les résultats (les étoiles indiquent que les variables explicatives sont statistiquement significatives) :
variable expliquée : degré de proximité relationnelle
Coefficient
age -0,49 ***
homme -2,64
<bac+3 modalité de référence
bac +4 ou 5 2,25
>bac+5 -0,49
autre ville modalité de référence
poitiers -1,89
paris -2,41
nb années résidence 0,07
nb amis -0,04 ***
nb années FB 1,75 **
FB intensif -7,71 ***
constante 116,86 ***
n 217
R2 0,26
 Les variables qui ressortent sont l’âge (influence négative sur le degré de proximité relationnelle) et des variables qui caractérisent le mode d’utilisation de Facebook. Le nombre d’amis et l’intensité d’utilisation de Facebook conduisent notamment à une proximité relationnelle plus faible.

Le degré de proximité géographique

En moyenne, la proportion d’amis Facebook qui vivent dans la même ville que les personnes enquêtées est de 19%. Voici la distribution du degré de proximité géographique :
Les résultats sont sensiblement différents selon la ville des enquêtés : la proportion monte à 27% pour les poitevins et à 29% pour les parisiens. Elle est en revanche de 12% pour les résidents des autres villes.
Ces “scores” sont-ils élevés? Plutôt oui, je dirais : si le monde était plat, la proportion d’amis Facebook des habitants d’une ville donnée devrait être égale au poids de cette ville dans la population mondiale, ou dans la population française si on raisonne simplement sur la France. Poitiers ne pèse pas 27% de la population française, Paris ne pèse pas non plus 29% de la population. En raisonnant à l’échelle des régions, les proportions seraient sans doute significativement plus élevées. Dans tous les cas, la géographie reste marquée et les liens locaux sont plutôt importants.
Résultat assez peu surprenant : on entretient sur Facebook des relations développées hors ligne, relations qui se nouent pour une part importante dans la proximité géographique. Résultat conforme là encore avec celui de l’étude américaine citée plus haut, qui montre que 90% des amis facebook des personnes interrogés (des étudiants de premier cycle universitaire) résidaient dans le même Etat US qu’eux.
Comme plus haut, j’ai testé un petit modèle économétrique, dont voici les résultats :
variable expliquée : degré de proximité géographique
Coefficient
age -0,05
homme 2,43
<bac+3 modalité de référence
bac +4 ou 5 -6,08 **
>bac+5 -6,42 *
autre ville modalité de référence
poitiers 13,29 ***
paris 18,36 ***
nb années résidence 0,52 ***
nb amis 0,00
nb années FB -0,67
FB intensif 3,59
constante 12,77 *
n 217
R2 0,29
Ce sont cette fois des variables qui caractérisent les personnes qui influent sur le degré de proximité géographique. Sans surprise, le niveau d’études influe négativement sur ce degré : les personnes ayant un niveau d’études supérieur à bac+3 sont plus mobiles géographiquement. Le nombre d’années de résidence influe logiquement positivement sur le degré de proximité géographique.

Conclusion

A ceux qui pensaient que les réseaux socionumériques étaient susceptibles de bouleverser le monde social, cette petite enquête, sur le cas d’un réseau spécifique (Facebook), montre plutôt le contraire. L’intérêt de Facebook est ailleurs : il permet d’entretenir à moindre coût des relations préexistantes. Un prolongement possible consisterait à s’interroger sur la nature de ces relations (liens forts vs. liens faibles, cf. Granovetter), pour voir le rôle éventuel d’un tel réseau dans l’activitation des liens faibles, dont le rôle stratégique est mis en évidence depuis longtemps par la sociologie économique.

Le classement des villes universitaires où il fait bon étudier (“L’Etudiant” bashing)

Je ne connais pas la progression des ventes ou des visites du site du magazine l’Etudiant, mais à mon avis, c’est plutôt positif. Il faut dire qu’ils se sont mis sur un créneau porteur : produire des classements. Des lycées, des écoles d’ingénieurs, des écoles de commerce, des prépas Math spé, des prépas commerciales, etc.

Dernier exemple en date : le classement des villes universitaires où il fait bon étudier. Classement toutes catégories, classement métropole, classement grandes villes, classement villes moyennes.

Je te vois venir, lecteur perfide : tu te dis que, “ça y est, encore un chercheur mécontent du rang de la ville universitaire où il travaille, qui va dénigrer bêtement le classement produit mais en fait c’est parce qu’il n’est pas content, tout ça, tout ça”. Ben non : L’Etudiant titre justement “la consécration pour Toulouse, Montpellier et Poitiers”. Poitiers est au premier rang des villes de taille moyenne. Youpi…

Ce n’est donc pas le problème. Le problème, c’est que ce classement, c’est du grand n’importe quoi. Il suffit de jeter un oeil sur la méthodologie et de mobiliser quelques neurones (un ou deux peuvent suffire) pour s’en convaincre :

  • 37 critères sont retenus cette année (tiens, l’an passé c’était 39 critères?!), classés en 9 thèmes. 37 critères auxquels sont appliqués des coefficients de 1 à 4 (on ne connait pas les coefficients appliqués), ce qui permet de définir 4 catégories… Critères, thèmes, catégories, coefficient… Vous suivez? Peu importe : seul le classement compte, on fait confiance à la déontologie du producteur du classement pour le reste…
  • liste des critères ensuite, avec, à l’évidence, plusieurs corrélés entre eux : nombre d’étudiants, nombre de fauteuils de cinéma, nombre de bars, nombre de formations supérieures. Plein de fois la même information, donc, et je vous dis pas avec le jeu des coef. ce que ça donne…
  • critères corrélés entre eux, mais, de plus, corrélés avec la taille des villes et/ou des Universités. Big is beautiful, apparemment (pour le lecteur non informé, je rappelle que le nombre d’étudiants à Harvard est le même que le nombre d’étudiants à l’Université de Poitiers),
  • un classement avec des évolutions radicales : Poitiers est passé du rang 3 au rang 1 des villes moyennes en 1 an, Bordeaux à gagné 5 places, Nancy, 6 places, Dijon en a perdu 5, etc. Quand vous vous intéressez à des éléments structurels, qui bougent lentement par définition, et que vous vous apercevez que le classement change très vite, une conclusion s’impose : votre “thermomètre” est pourri. Si vous voulez faire un meilleur boulot, il faut changer de thermomètre. Si les ventes sont bonnes, il faut le conserver.
Invité l’an dernier à intervenir lors d’une journée sur l’attractivité et le rayonnement des villes universitaires, j’avais déjà commencé mon topo sur ce classement pour faire les mêmes remarques. En amont de la préparation de mon intervention, en expliquant à l’un des organisateurs tout le bien que je pensais de ce classement, je m’étais exposé à la remarque classique “ah oui, comme vous êtes mal classés, etc” (d’où ma digression ci-dessus). J’avais également envoyé un mail à L’Etudiant, afin qu’ils me transmettent leurs données de base. Mail resté sans réponse.
Lors de la conférence, après mon intervention, la personne de l’Etudiant qui produit ce classement a réagi (elle était présente dans la salle, je ne savais pas). Pour me dire que oui, sans doute, ce classement avait des limites, mais que c’était juste de l’information donnée aux lecteurs, que c’était sans prétention, que les gens pouvaient ensuite en faire ce qu’ils voulaient, etc. Un côté naïf presque touchant, je dirais.
Bon, c’est pas tout ça, faut que je vous laisse : un article à réviser pour publication, histoire de faire monter mon Université dans le classement de Shangaï…

La géographie de Facebook ? La suite d’une longue histoire…

Toujours en train de préparer ma conférence de lundi prochain, où il sera notamment question de la géographie des réseaux sociaux, j’ai découvert une animation pas inintéressante : pour un pays donné, on peut voir dans quels autres pays, prioritairement, sont localisés les “amis” Facebook.

Sans surprise, on découvre que le monde n’est pas plat, que la géographie de Facebook est même très marquée, elle s’explique notamment par des effets de proximité géographique, des effets de proximité linguistique, qu’elle s’explique plus généralement par l’histoire longue des pays. Pour la France, ça donne cette configuration :

Je vous laisser découvrir les résultats pour le pays de votre choix : c’est ici.

Journalisme pas Net

Bon, c’est pas tout ça, faut que je prépare ma conférence pour la semaine prochaine… Les deux premières parties, ça va. Pour la troisième partie, il s’agit d’être efficace, je n’aurai pas beaucoup de temps…Trois ou quatre diapos max… Je vous rappelle l’idée : “Nous finirons par quelques réflexions sur la qualité des informations et des connaissances accessibles via les réseaux socionumériques, plus généralement via internet, suite au débat récurrent entre médias traditionnels et nouveaux médias (cf. les déclarations récentes de Frédéric Begbeider, Laurent Joffrin ou Aurélie Filippetti). Nous en montrerons la complémentarité et insisterons sur les enjeux d’éducation à l’utilisation des réseaux socionumériques, plus que de censure.”

Première diapo, déclaration d’Aurélie Filippetti, Ministre de la Culture et de la Communication :

“Si la presse abandonne la qualité, il n’y aura plus de différence entre les journaux, les magazines payants et la presse gratuite, notamment sur le Net où rien n’est éditorialisé.” (Aurélie Filippetti, source : http://www.polkamagazine.com/19/le-mur/polka-image/890)

Deuxième diapo, déclaration de Laurent Joffrin, Directeur de la rédaction du Nouvel Observateur :

« L’utopie babylonienne d’une bibliothèque universelle ouverte au monde entier, comme celle d’un journal planétaire permanent, libre et gratuit, trouve une soudaine incarnation. Personne ne songe, évidemment, à entraver cette marche vers l’avenir. Mais il faut rappeler que si le Net est un magnifique outil de diffusion, il ne produit rien. » (source : http://www.arretsurimages.net/vite.php?id=7694)

(j’aurai pu aussi prendre un extrait de ce papier plus récent, mais ça aurait été salaud :  http://tempsreel.nouvelobs.com/laurent-joffrin/20120827.OBS0520/la-commission-jospin-et-les-derives-du-web.html)

Troisième diapo, un exemple de production journalistique éditorialisé, avec un redac chef, des journalistes avec des cartes de presse, tout ça, tout ça :

Quatrième diapo, un exemple de contenu trouvé sur le Net, une sorte de non-production, non éditorialisé, par un anonyme qui se prétend avocat, mais on n’a aucune preuve :

Voilà, voilà… Bon, en fait, c’est cool : j’ai fini de préparer la fin de mon intervention. Une sorte de démonstration par l’absurde, je dirais.

Qu’apprend-on avec les réseaux socio(numériques)?

“Qu’apprend-on avec les réseaux socio(numériques)?” est le thème du Campus européen d’été de la Cité des Savoirs, organisé par l’Université de Poitiers et ses partenaires, du 17 au 21 septembre 2012. Toutes les informations sont disponibles ici.

C’est dans le cadre de ce Campus que j’ai été invité à assurer la conférence d’ouverture, le 17 septembre, de 11h à 12h30 (intervention d’une heure suivie d’une demi-heure de questions/réponses), à la MSHS de Poitiers. Titre de mon intervention : “Réseaux sociaux et réseaux socionumériques : quelques éléments de réflexion”. Voilà en gros de quoi je devrais parler :

L’objectif de la conférence est de s’interroger sur la distinction entre les réseaux sociaux tels que définis par la nouvelle sociologie économique, à la suite notamment des travaux de Mark Granovetter, et les réseaux socionumériques.

La nouvelle sociologie économique a en effet mis en évidence l’importance des relations sociales (liens familiaux, amicaux, anciens collègues, …) pour la coordination entre acteurs, qu’il s’agisse de trouver un emploi, initier un partenariat entre entreprises, développer des collaborations science-industrie, choisir les membres du conseil d’administration d’un groupe, etc. Dans tous les cas, les relations sociales seraient un mode essentiel de coordination car vecteur de confiance.

Sur la base de ces analyses, certains considèrent ensuite que les réseaux socionumériques sont un outil puissant de développement des relations sociales. En nous appuyant sur différents exemples, nous montrerons les limites d’un tel raisonnement : Facebook n’est pas un outil de développement de relations sociales, il est un moyen d’entretenir et d’activer des relations sociales préexistantes (liens forts et liens faibles). Viadeo et LinkedIn ne permettent pas plus le développement de liens sociaux, ils s’apparentent plutôt à des annuaires personnalisés. Twitter, de son côté, peut être vu comme un moyen de construire son propre système d’information. Leur vocation est donc moins de développer des liens sociaux que de réduire des coûts de transaction.

Nous nous interrogerons ensuite sur la géographie des réseaux socionumériques, en nous focalisant sur l’exemple de Facebook. Nous montrerons que l’émergence des réseaux socionumériques ne correspond pas à la « mort de la géographie » et à l’avènement d’un « flat world », mais plutôt à des structures de type « small world », au sein desquels se combinent et s’entretiennent différentes formes de proximité.

Nous finirons par quelques réflexions sur la qualité des informations et des connaissances accessibles via les réseaux socionumériques, plus généralement via internet, suite au débat récurrent entre médias traditionnels et nouveaux médias (cf. les déclarations récentes de Frédéric Begbeider, Laurent Joffrin ou Aurélie Filippetti). Nous en montrerons la complémentarité et insisterons sur les enjeux d’éducation à l’utilisation des réseaux socionumériques, plus que de censure.

Pour les deux premières parties, je m’appuierai notamment sur les travaux que je mène avec Michel Grossetti, ainsi, bien sûr, que sur ma petite enquête Facebook. Troisième partie plus exploratoire.

S’agissant de l’enquête, j’ai finalement 217 réponses exploitables. J’ai commencé à regarder, résultats pas inintéressants… Si vous êtes joueur, vous pouvez poster en commentaire vos pronostics :

Q1 : quelle est, en moyenne, le pourcentage d’amis des personnes interrogées qui résident dans la même ville qu’eux?

Q2 : quelle est, en moyenne, le pourcentage d’amis des personnes interrogées avec qui ils n’ont jamais interagis physiquement avant d’être amis avec eux?

Aux racines du déclin industriel

Débat intéressant ce matin sur France Culture, avec Benjamin Coriat, professeur à Paris 13, en invité. Philippe Manière dit pas mal de bêtises sur la fin (la Sillicon Valley est née de manière “naturelle”, “spontanée”), mais Benjamin Coriat lui a répondu efficacement.

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