LRU

Beaucoup d’agitations dans les universités autour de la loi LRU, avec des arguments  parfois  (souvent) à côté de la plaque, selon moi. Jean-Pierre Gesson,
Président de l’Université de Poitiers, nous a transmis une lettre ouverte, qui permet de recadrer le débat. Je vous la livre ici, sans plus de commentaires :
 
Madame, Mademoiselle, Monsieur,
Cher(e) collègue,
Cher(e) étudiante,

De l’avis général, la formation, la recherche et l’innovation vont occuper à l’avenir une place de plus en plus importante dans notre pays. Dans ce contexte,
nous sommes nombreux à attendre depuis des années une loi donnant aux universités des capacités accrues de développement. Des capacités accrues, c’est-à-dire une organisation d’un autre ordre,
un mode de fonctionnement différent, mais aussi des moyens financiers et humains renforcés, car nous ne pouvons plus accepter que la dépense consacrée en France pour un étudiant soit inférieure
à celle qui est réservée à tout autre bénéficiaire du service public de l’enseignement, avant comme après le baccalauréat.

 La loi « Libertés et Responsabilités des Universités » (LRU) a été promulguée le 11 août 2007. Dans le code de l’éducation -code qui rappelle (chapitre
III du Livre Premier) les objectifs et missions du service public de l’enseignement supérieur auxquels nous sommes tous très attachés- elle modifie un certain nombre d’articles issus de la loi
du 26 janvier 1984.

Cette loi suscite aujourd’hui des discussions, des inquiétudes, des résistances. Les UFR de lettres et langues et de sciences humaines et arts sont «
bloquées » depuis plus d’une semaine et une grande partie des enseignements ne peuvent y avoir lieu. J’ai donc décidé de vous écrire cette lettre, d’abord pour corriger quelques erreurs qui
circulent, ensuite pour vous donner mon sentiment personnel sur cette loi : sans doute ne répond-t-elle pas pleinement aux attentes de la communauté universitaire, mais il est clair que
l’immobilisme ouvrirait une voie royale à tous ceux (personnes et établissements privés) qui souhaitent, eux, afficher d’autres modalités de gouvernance et de fonctionnement, et réaliser tôt ou
tard des projets concurrentiels.

*

En ce qui concerne l’information sur la loi, il est important que le débat qui s’est engagé à son propos (ou à partir d’elle) ne se perde pas sur de fausses
pistes : le texte de la loi LRU ainsi que celui de la loi de 1984 et un relevé des différences entre les deux textes figurent désormais sur notre site
(
http://www.univ-poitiers.fr). La simple lecture de ces textes devrait permettre d’en finir avec certaines craintes fortement exprimées :

– cette loi ne modifie rien quant au principe de la non sélection à l’entrée à l’université. Elle réaffirme au contraire la possibilité pour
chaque bachelier de s’inscrire dans la filière de son choix. Elle demande seulement que l’université puisse conseiller utilement le candidat à ce choix (procédure déjà mise en place dans notre
université à la dernière rentrée universitaire) ;

– cette loi ne modifie rien quant à la fixation des droits d’inscription, définis nationalement et par arrêté ministériel. Elle n’ouvre pas
plus le droit pour une université de décider, toute seule, localement, de droits d’inscription particuliers.

– cette loi ne modifie rien quant au monopole de la collation des grades et diplômes exercé par l’Etat. Les filières de formation offertes
par une université continueront donc d’être décidées à l’issue de la négociation entre l’université et le ministère (contrat quadriennal). La loi LRU ne change rien à ce mécanisme, qu’elle
renforce au contraire par la place centrale désormais réservée au contrat dans la loi.

*

Quels sont donc les points sur lesquels la loi LRU apporte des changements ?

Le président : la loi fait-elle vraiment de lui un super manager doté de tous les pouvoirs ? La lecture comparée du texte de la loi de 1984
et de celui de 2007 ne permet guère de l’affirmer. Au demeurant, j’ai observé que le CA, et c’est une nouveauté, exercera désormais un contrôle sur ses actions et ses décisions. Certes, et
c’est là la principale modification, aucune affectation (sauf pour ce qui concerne de l’affectation des agrégés de l’enseignement supérieur) ne peut désormais être prononcée s’il émet un
avis défavorable motivé. Ce pouvoir inquiète… et j’estime pour ma part qu’il aurait été sage de le laisser entre les mains du conseil d’administration… mais j’observe que les
directeurs d’IUT, qui disposent d’un pouvoir similaire depuis de nombreuses années, ne l’ont quasiment jamais utilisé (une seule fois en quinze ans à Poitiers) !

Le conseil d’administration : il comptera 30 membres à l’université de Poitiers, avec des proportions de représentation pas si
éloignées de celles de la loi de 1984. La représentation des étudiants, certes, va se trouver diminuée (14/60 dans le précédent CA contre 5/30 dans le nouveau) mais la présence de suppléants
permettra d’assurer une présence effective plus forte (actuellement, la présence des élus étudiants au CA est de l’ordre de 50 %). Un regret : la diminution relative des élus BIATOSS compte
tenu de leur implication dans la vie de l’établissement, diminution que compense imparfaitement la création d’un Comité Technique Paritaire. Quant aux 8 personnalités extérieures au lieu de 12
actuellement (dont, chez nous, 3 des collectivités, désignées par elles), elles ne pourront, à l’évidence, exercer aucune mainmise sur le CA : 73 % des membres de notre CA seront des personnels
ou des usagers de notre université !

La grande nouveauté m’apparaît être la suppression des secteurs pour l’élection des membres du CA : l’élection se fera sur un projet pour l’établissement,
non sur la représentation des composantes : à nous d’éviter les déséquilibres et de faire en sorte que le projet retenu par les électeurs prenne en compte la communauté tout
entière.

Les compétences nouvelles : les universités vont devoir assurer la responsabilité de la masse salariale et de la gestion des
ressources humaines dans un délai de 5 ans. La loi a prévu des garde-fous : plafonds de cette masse salariale, plafonds des emplois Etat et des emplois de contractuels… Les spéculations sur des
recrutements « massifs » de contractuels sont donc fort peu fondées. Dois-je rappeler que nous payons actuellement sur ressources propres 74 emplois « gagés » et 130 contractuels, hors
recherche (doctorants, ATER), pour environ 900 emplois Etat ? 

Les « comités de sélection » : ce point est plus préoccupant. Quel sera le mode de fonctionnement de ces « comités » qui se
substituent aux commissions de spécialistes ? La loi de 1984 ne disait rien sur ce point et les choses seront précisées cette fois encore par voie de décret. A titre personnel, je serais très
favorable au maintien de commissions internes, élues, nécessaires pour traiter des dossiers scientifiques (avis sur la soutenance et les jurys de doctorats et d’HDR, avis sur les promotions
locales …). Pour le reste, il nous appartiendra de définir les modalités de mise en place des comités de sélection qui devront, bien naturellement, être majoritairement constitués (comme la loi
l’indique) de spécialistes de la discipline, et pour moitié d’extérieurs (et cela dans le respect de deux exigences : que le dispositif garantisse la compétence scientifique des membres de ces
comités et que leur mode de désignation soit pluriel pour éviter tout arbitraire).

La modulation des services des enseignants-chercheurs et des enseignants est autre source d’inquiétude. Il ne s’agira pas pourtant d’une
mise en concurrence mais bien d’une reconnaissance des activités de chacun qui combinent de façon très variable les missions d’enseignement, de recherche et d’administration.
Nier l’évidence revient à dévaloriser certaines missions par rapport à d’autres ce qui est préjudiciable à la fois aux personnels concernés et à l’établissement. Bien entendu, la définition des
services ne pourra résulter que de procédures équitables prenant en compte les objectifs individuels des enseignants-chercheurs et les besoins de l’établissement. 

Les mêmes inquiétudes sont relatives à l’attribution des primes qui doivent relever de procédures similaires. L’Université de Poitiers a
atteint cette année son objectif de rattrapage du niveau des primes entre catégories de personnel des différents corps. Il est bien entendu qu’une politique de primes ne peut aboutir qu’avec
l’assentiment des personnels.

Fondation ? Sur ce sujet, je suis favorable, pour ma part, à la création (en partenariat avec des établissements voisins ?) d’une fondation
d’université qui serait une fondation reconnue d’utilité publique, sans personnalité morale, c’est-à-dire avec un pilotage assuré par l’université. Elle aurait pour objectif de soutenir le
développement de l’ensemble de l’université, mais il est bien évident que les financements qui peuvent être obtenus par ce canal ne peuvent être que très modestes par rapport au budget global
de l’université. 

*

Naturellement, nous sommes tous bien d’accord sur un point : l’ « autonomie » ne doit pas se traduire par un désengagement de l’Etat et nous devons continuer
de tenir un discours soulignant la nécessité de mener en parallèle le chantier de la réforme et le renforcement des moyens publics attribués aux universités. La loi LRU doit s’accompagner d’un
investissement accru de l’Etat. A ce sujet, le bureau de la Conférence des Présidents d’Université CPU) a été reçu hier par F. Fillon. Il a été proposé que la CPU signe dans les prochains jours
un accord (entre elle et le gouvernement) visant à acter concrètement l’engagement pluriannuel de l’Etat sur les moyens (le soutien financier de l’Etat aux universités sera de 1 milliard
d’euros par an durant 5 ans). Le budget de l’enseignement supérieur sera donc de 11 milliards d’euros en 2008, de 12 en 2009, etc., jusqu’à atteindre 15 milliards d’€ en 2012. La loi de
finances 2008 en cours d’adoption au Parlement s’inscrit dans cette perspective.  

Notre université va être néanmoins particulièrement attentive au financement du « plan licence ». L’objectif inscrit comme première priorité dans notre
projet de contrat quadriennal (2008-2011) est précisément l’amélioration de l’encadrement et de la réussite des étudiants inscrits en licence : nous avons demandé plus d’accompagnement
dans le parcours étudiant
, des volumes horaires plus importants dans les maquettes les plus basses, ce qui concerne principalement le domaine des Sciences humaines et Arts et celui de
Lettres et Langues.

C’est aux collègues et aux étudiants de ces deux facultés, aujourd’hui inquiètes de leur avenir, que je voudrais plus particulièrement m’adresser pour finir
: la loi n’est nullement dirigée contre leurs disciplines et l’université entend bien continuer de tirer sa force de sa pluri-disciplinarité. Le très gros programme d’investissement immobilier
prévu dans le cadre du Contrat de Projets Etat-Région 2007-2013 fait une place importante à la rénovation des locaux de l’Hôtel Fumé, à la bibliothèque du campus nord, à la création d’un pôle
musique et danse en centre ville. Cet investissement est le signe de la confiance que notre université continue d’avoir dans ces domaines qui n’occupent nullement une place secondaire dans son
développement.

J’appelle tous les étudiants et les personnels à examiner sereinement le contenu de cette loi et à s’en faire une opinion par
eux-mêmes.
S’il s’avérait que nos universités refusent encore une loi, quelle que soit l’appréciation que l’on porte sur elle, notre service public en sortirait affaibli
par rapport à d’autres filières, sélectives ou privées. Oui, je suis convaincu que nous pouvons, dans le cadre de cette loi, continuer d’être une université pluridisciplinaire, accueillant tous
les bacheliers et favorisant leur réussite, dotée d’une recherche d’excellence dans différents domaines et fonctionnant démocratiquement.

C’est à nous d’en décider.

 
Jean-Pierre Gesson

Délocalisations en Rhône-Alpes

Lors du Workshop “Trajectoires de délocalisation” de Bordeaux, Jean-Pierre Chanteau a présenté un papier intitulé “Quantification et analyse stratégique des délocalisations : une étude
empirique sur données d’entreprises”. Pour son étude, il s’est appuyé sur les données 1993, 1997 et 2003 de l’agence d’informations professionnelles Bref Rhône-Alpes, ce qui lui permet
d’aller plus loin dans l’analyse qu’avec les données Insee.

Ces données lui permettent d’abord d’évaluer la mobilité des activités productives en Rhône-Alpes : sur les trois années (c’est moi qui agrège), ce sont 908 agrandissements, créations ou déplacements qui sont recensés, dont 484 ont lieu en région Rhône-Alpes, 142 en France hors région, et 282 avec
l’étranger. Sur ces 282 évènements, 64 correspondent à des délocalisations. En pourcentage, on a donc 53,3% d’évènements infra-régionaux, 15,6% d’évènements infra-nationaux (hors région
d’origine) et 31,1% d’évènements internationaux, dont 7% de délocalisations.

On peut préciser sur les aspects délocalisations : i) sur les trois années étudiées, on dénombre 64 délocalisations pour 14000 établissements, soit une moyenne annuelle de 0,15%, ii) sur ces 64
délocalisations, on observe 46 déplacements France vers Etranger et 18 déplacements Etranger vers France, iii) sur les 46 déplacements France vers Etranger, on a 40 délocalisations d’entreprises
françaises et 6 relocalisations d’entreprises étrangères, iii) sur les 18 déplacements Etranger vers France, on a 8 délocalisations (en France) d’entreprises étrangères et 10 relocalisations
d’entreprises françaises.

On notera le ratio “délocalisations d’entreprises françaises/relocalisations d’entreprises françaises”, ici égal à 10/40, soit 25% (cf. sur ce point un billet précédent).

Economies d’envergure

Les économies d’envergure (ou de champ) sont des réductions de coûts résultant de la mise en œuvre conjointe d’activités
distinctes qui possèdent certains points communs
. On peut les résumer ainsi :

c(x,y) < c(x) + c(y)

la production conjointe de deux biens x et y (plus généralement n biens) est moins coûteuse que leur production séparée.

Ces économies d’envergure s’expliquent notamment par le fait que les deux produits utilisent les mêmes équipements productifs, plus généralement les mêmes ressources
imparfaitement divisibles, qu’ils peuvent bénéficier d’une activité de R&D commune ou encore d’une marque commune.

Joli illustration en ce moment avec Carrefour, qui passe
d’une stratégie multi-enseigne (Carrefour, Champion, Shopi, Proxi, 8 à 8, Ed)  à une stratégie centrée sur la marque Carrefour, ce qui permettra de ne developper qu’une marque distributeur,
qu’une carte de fidélité commune, et de ne pas multiplier les campagnes de publicité, notamment à la télévision.
Cette stratégie, déjà mise en oeuvre en
Espagne, aurait permis de faire progresser les
ventes de 30%
.

Externalités négatives

J’apprends via Division of Labor que le fait de montrer des photos de femmes blondes à
des hommes avant qu’ils passent des tests  de connaissance fait chuter leur score. Après “enquête”, il s’avère que  c’est Thierry Meyer, professeur de psychologie à l’Université de
Paris X-Nanterre, qui est à la base de ce résultat. Il explique dans Le
Soir
: « Les blondes font que les hommes se comportent de manière plus bête car ils imitent inconsciemment le stéréotype de la blonde stupide et s’y adaptent ».

références de l’article : Bry, C., Follenfant, A., & Meyer, T. (2007). Blonde Like Me: When Self-Construals Moderate
Stereotype Priming Effects on Intellectual Performance. Journal of Experimental Social Psychology (résumé ici).

Economie de la rage de dent


dent.jpg
Depuis
quelques années, je vais chez un dentiste d’un genre nouveau. Un dentiste schumpetérien, en quelque sorte, qui innove intensément, notamment d’un point de vue organisationnel. Explications.

L’autre jour,  mal de dent tenace, j’appelle mon dentiste. Il me fixe un premier rendez-vous, d’environ 15 minutes au cours duquel il pose un diagnostic et planifie les séances suivantes :
une séance de 1h30, pour réaliser un premier ensemble de soins, une deuxième séance de 30 minutes, pour finaliser le travail. La veille du rendez-vous d’1h30, son assistante me passe un coup de
fil, pour que je n’oublie pas de venir.

Ca n’a l’air de rien, mais ça change tout : alors que les dentistes, habituellement, enchaînent des rendez-vous d’une vingtaine de minutes et traitent ce qu’ils peuvent dans le temps imparti, lui
inverse la problématique, et planifie la durée du rendez-vous en fonction du travail à réaliser. Pour cela, il a dû au préalable chronométrer le temps d’intervention nécessaire pour chaque acte,
et introduire la possibilité de rendez-vous longs. Implication immédiate, quand on cale des rendez-vous long, si un client fait défection, ça pose problème : d’où l’idée de rappeler les patients
la veille. Ceci lui permet également de décaler éventuellement de 10 à 15 minutes les rendez-vous si besoin.

Les avantages de ce type de fonctionnement sont nombreux : i) en termes d’hygiène, d’abord, il est difficile voire impossible d’être irréprochable quand on enchaîne des rendez-vous courts, alors
que lui dispose de plus de temps,  ii) lorsqu’on anesthésie les patients ensuite, il peut se passer entre 5 et 10 minutes avant que le produit ne fasse effet. Or, quand vous avez 20 minutes
pour traiter un patient, vous n’avez guère le temps d’attendre, vous commencez donc les soins, et parfois, ça fait mal. La douleur n’est pas liée à l’anesthésiant (tous les dentistes utilisent
les mêmes), mais à ce problème organisationnel, iii) lorsque les soins sont assez longs et que vous fonctionnez avec des rendez-vous courts, vous devez endormir, commencer à soigner, mettre un
pansement provisoire, fixer un nouveau rendez-vous, réendormir, continuer à soigner, etc… Pas vraiment optimal, ne serait-ce qu’en raison de l’injection répétée d’anesthésiant, iv) si votre
temps de trajet domicile-dentiste est assez élevé, vous perdez un temps considérable (en temps de transport) à enchaîner les rendez-vous (problème fréquent en région parisienne, m’a-t-il dit,
pour y avoir exercé en début de carrière), vi) de son côté, il m’a dit avoir gagné considérablement en qualité de travail : il n’a plus à enchaîner les rendez-vous sans savoir à l’avance ce qu’il
va devoir faire, à se dépêcher de soigner, passer au patient suivant, etc.

Pourquoi tous les dentistes ne font pas cela, me direz-vous? D’abord car de nombreux dentistes travaillent seuls (la moitié de ceux installés), et que le simple fait de devoir rappeler les
patients devient impossible. Ensuite car l’inertie organisationnelle, chez les dentistes comme dans toutes les organisations, est plutôt importante. Il y a pourtant pas mal à y gagner, en termes
d’efficacité économique (meilleure qualité des soins) et en termes de conditions de travail (baisse du stress).

Et depuis, rassurez-vous (je vous devine inquiets), je n’ai plus mal à ma dent…

Gréviculture, petits compléments

Pour les poitevins, Centre-Presse a repris certains éléments de mon billet dans un article de l’édition
d’aujourd’hui.

 

Pour compléter, je vous conseille d’abord la tribune de François Doutriaux,  dans Libération du 14 novembre 2007. Titre : « le mythe d’un pays gréviste ». Avec  des chiffres convergents, et d’autres complémentaires de ceux que j’ai avancés. Trois idées fortes : i) diminution de l’ampleur et de la fréquence des mouvements sociaux en
France, ii) la France se situe plutôt en dessous de la moyenne depuis une quarantaine d’années, iii) les conflits localisés dominent largement sur la période récente (85% des grèves sur la
période 1990-2005), les journées d’action nationale pèsent peu (1% des grèves).

 

Voir également l’interview de Jean-Michel Denis, maître de conférences
en sociologie à l’université de Marne-la-Vallée et chercheur au Centre d’études de l’emploi, dans le numéro de Libération du 19 novembre.  Il est co-auteur notamment de cet ouvrage. Titre : « La conflictualité ne décline pas, elle se
transforme ». Propos tenu notamment sur la base du document de la DARES que j’avais mentionné
dans mon post. Il signale notamment que “Une forme de contestation a fortement augmenté : le refus d’heures
supplémentaires, ce qui est cocasse dans cette période où on demande aux salariés de travailler plus pour gagner plus.” La DARES nous apprend en effet que 9,6% des établissements enquêtés sont
concernés par un refus d’heures supplémentaires sur la période 2002-2004, contre 3,2% sur la période 1996-1998.

Beaucoup de grèves, de plus en plus de grèves…

En août 2006, j’avais écrit un petit billet sur le nombre de jours de grèves par
salarié, histoire de montrer que la France ne se caractérisait pas par une conflictualité débordante
(classement de 25 pays par conflictualité décroissante
sur la période 1998-2004)
:

conflit.gif

Figurez-vous que ce billet a été repris dans la revue des blogs de l’émission “Duel sur la 3”, dimanche
dernier (après la 55′). Comme ce billet date un peu, je ne peux m’empêcher de compléter, sur la base des données de la DARES, pour analyser l’évolution du nombre de JINT (Journées Individuelles Non Travaillées) dans le temps, pour la France. Résultat graphique
:

JINT.jpg

Ca m’a l’air de décroître sévèrement tout ça… Sur la base de ces éléments, on peut donc dire qu’il y a plutôt moins de grèves en
France qu’ailleurs, et qu’il y en a plutôt de moins en moins.

Il y a d’autres données intéressantes, notamment par région ou secteur (fichier excel ici). 
Ainsi qu’une analyse approfondie des conflits du travail sur la période 2002-2004 relativement à
1996-1998 : on y apprend notamment que les conflits du travail sont plus nombreux et plus diversifiés sur 2002-2004 que sur 1996-1998, mais que les formes qui progressent le plus (refus d’heures
supplémentaires et pétitions notamment) se font sans arrêt de travail.