Rue89 a publié un article sur la pauvreté dans les 100 plus grandes villes françaises, suite à l’étude de Compas disponible ici. Le taux de pauvreté est défini comme la part dans la population des ménages disposant d’un revenu, après versement des prestations sociales, de 60% du revenu médian. Pour un ménage composé d’une personne seule, ceci correspond à une somme de 954€ par mois.
Ce taux oscille de 7% à Neuilly-sur-Seine à 46% à Roubaix, avec une moyenne France entière de 15%. De manière générale, les plus grandes villes connaissent des taux de pauvreté plus importants, pour des raisons bien expliquées dans l’article et l’étude.
Centre Presse m’a demandé de réagir sur le taux observé pour Poitiers, qui est de 22%, sensiblement plus fort que la moyenne France entière. Taux qui m’a surpris au départ, mais après réflexion, on trouve plusieurs éléments explicatifs :
- Poitiers est une ville dont la population étudiante pèse beaucoup dans l’ensemble de la population, il s’agit même de la ville française dont le ratio étudiants/population est le plus élevé. Certes, tous ne résident pas sur Poitiers, mais ils sont nombreux à y être logés,
- Ce n’est pas la seule dans ce cas cependant : Dijon, de taille comparable, présente également un ratio élevé. Pourtant, le taux de Pauvreté y est beaucoup plus faible (13%). Comment expliquer cet écart entre Poitiers et Dijon?
- Première possibilité : la dynamique économique (chômage plus faible, croissance plus forte) et la structure des activités économiques (plusd’emplois à faible rémunération),
- Deuxième possibilité : l’étude a calculé des taux de pauvreté sur les villes, non pas sur les agglomérations. Or, sur Dijon, le taux de pauvreté est plutôt faible car les logements sociaux sont majoritairement localisés dans les communes alentours. Sur Poitiers, nous sommes dans la configuration inverse : les logements sociaux sont majoritairement situés dans la ville centre, non pas dans les communes alentours comme Saint-Benoît, Buxerolles ou Mignaloux.
Sur ce dernier point, un travail réalisé par la Communauté d’Agglomération de Poitiers est plutôt éclairant, j’en reprends une des cartes les mieux adaptées au sujet (page 34) :
Les personnes disposant de contrats précaires sont localisés dans la ville centre, elles sont même fortement concentrés dans quelques quartiers.
Autre point important : être pauvre à Poitiers ou dans des villes plus grandes (Paris, Bordeaux, Marseille, …), ce n’est pas la même chose. Prenons le cas d’une personne seule disposant d’un revenu de 900€ à Poitiers, comparé au cas d’une personne percevant le même revenu mais localisée sur Paris. Compte-tenu du fonctionnement du marché du logement, il est clair que le coût pour se loger ne sera pas le même. Que la localisation de la personne pauvre sur Paris risque de la reléguer en périphérie lointaine ce qui va peser sur leur budget transport, etc. En complément, l’article évoque des prolongements intéressants, en étudiant par exemple le lien entre pauvreté monétaire et pauvreté ressentie.