L’enquête de 60 millions de consommateurs

Edit : billet complémentaire chez Dirtydenys.

Je vous l’avais signalé dans mon précédent billet, Christian Aubin, doyen de l’UFR de Sciences Economiques de Poitiers,  était l’invité de France Bleu Poitou pour une émission sur la hausse
des prix dans l’alimentaire. Pour préparer cette émission -notre doyen est consciencieux-  il s’est procuré le numéro de 60 millions de consommateurs. Voici le billet qu’il m’a fait
parvenir.

 

Et oui, c’est vrai, j’ai accepté de participer à une émission sur la fameuse enquête de l’Institut National de la Consommation, publiée dans le mensuel
« 60 millions de consommateurs », selon laquelle les prix des produits alimentaires ont explosé entre novembre 2007 et janvier 2008. J’ai un peu hésité de peur de n’avoir rien à dire
d’original car tous les médias s’en sont déjà largement fait l’écho. Et chacun d’y aller de son commentaire, parfois pour critiquer la méthode d’enquête, le plus souvent pour chercher les
coupables : la réglementation sur les marges arrières, la grande distribution, les producteurs, les pays émergents ou les méchants spéculateurs…
Bêtement, j’ai
commencé par acheter le magazine en question. Couverture sans appel : « 1055 produits passés au crible », « La liste noire des prix qui flambent », « des hausses
de 5% à 48% ».

J’ouvre le mensuel et le titre de l’éditorial confirme l’impression première : « Flambée des prix, gare aux spéculateurs ! ». Le contenu
est édifiant : « En janvier nous avons noté des augmentations de plus de 30% pour le lait et les fromages et de plus de 40% pour les yaourts, de plus de 30% pour les pâtes… Celles-ci
touchent toutes les familles de produits… » ; le reste de l’éditorial est sur le même ton et un intertitre précise « dans nos prévisions les plus sombres, nous n’imaginions pas
l’ampleur des hausses de prix que nous avons relevées entre la fin novembre 2007 et le début janvier 2008 ».

Je tourne les pages, impatient d’en savoir plus. Enfin, page 43, j’entre dans le vifs du sujet : je vais découvrir ces relevés qui « révèlent des
hausses inimaginables, atteignant jusqu’à 48% ! ». Comme bien des gens, je commence par feuilleter le dossier et j’admire l’à propos des titres qui accompagnent des tableaux de
relevés des hausses avec illustration des champions de la hausse : « Yaourts nature : ils se sucrent », « laits UHT : la vache ! »,
« camemberts : beaucoup trop coulants », « beurre : la grimace de la crémière », « céréales petit-déjeuner : quel tonus ! »,
« pâtes : il en faut du blé… », etc. Les titres sont accrocheurs et collent aux chiffres des tableaux qui recensent des hausses de 5% à 48%, comme annoncé sur la
couverture.

Arrivé à ce stade de mon survol rapide des titres et des images destinées à capter l’attention du lecteur pressé, il m’apparaît que les tableaux que je viens
de voir sont loin de reproduire les données pour les 1055 produits annoncés. Je fais le compte : les tableaux ne donnent les évolutions de prix que pour 58 articles… C’est un peu court, et
j’ai quelques doutes sur l’interprétation à donner à ce qui n’est pas un échantillon représentatif mais bien, comme l’indique le titre de l’article, une « liste noire des prix qui
flambent ». Alors je me mets à lire…

Yaourts : « presque 80% des références de ce rayon yaourts nature ont augmenté »

Laits UHT : « plus de huit articles sur dix ont connu une inflation ».

Camemberts : « un peu plus de la moitié des références a subi une hausse ».

Beurres : « les trois quarts du rayon affichent une hausse ».

Céréales petit-déjeuner : « seules 25% des références ont augmenté ».

-Pâtes : les hausses « n’ont touché qu’environ 60% des références ».

Biscuits au chocolat : « environ 15% des produits de la gamme ont augmenté ».

Biscottes et pains de mie : « 25% et 13% des produits ont respectivement augmenté ».

Riz : « pas de mouvement inflationniste général sur le riz ».

Jambon blanc et blanc de dinde : « trois produits sur dix ont augmenté » pour le premier et « presque un
produit sur deux » pour le second.

Au total, il semble bien que les hausses soient assez générales sur les laits, yaourts et beurres. Encore faudrait-il savoir de combien en moyenne
puisque sur les yaourts, il est précisé que « la moitié des yaourts nature enregistrent des hausses de plus de 10% », ce qui laisse des hausses de moins de 10% pour l’autre moitié…
Pour les autres produits, les choses sont moins nettes.

Un peu plus loin, le dossier fournit quelques données complémentaires par enseigne. A nouveau, les tableaux qui recensent les 20 plus fortes hausses
s’accompagnent de titres alarmistes. Mais ici encore, les textes d’accompagnement des tableaux contiennent quelques informations utiles. Pour quatre des cinq enseignes analysées, il est précisé
le nombre de produits surveillés et le nombre de ceux qui ont connu une augmentation. Une rapide addition donne les résultats suivants : sur 717 références suivies dans les quatre
enseignes, 122 ont subi une hausse…

J’ajoute que les produits suivis par l’enquête ont été choisis pour former « neuf familles de produits à base de lait et de céréales », une dixième
famille étant ajoutée, constituée « des jambons, blancs de dinde et de poulet (en tranches sous vide), porcs, dindes et poulets étant nourris aux céréales ». Il s’agit bien pour l’INC
de mesurer l’impact sur les prix à la consommation des fortes hausses enregistrées sur le lait et les céréales, hausses illustrées par deux graphiques en page 50 du dossier.

Au final, je me demande si le dossier aurait eu autant de succès si le magazine « 60 millions de consommateurs » avait titré : « Malgré
les fortes hausses du lait et des céréales, les prix à la consommation restent stables sur plus des trois quarts des produits dérivés ! »…

Au fait, les commentateurs en tout genre lisent-ils les articles ou se contentent-ils de regarder les images ?

 

Les dépenses d’alimentation : quelques chiffres

L’enquête de 60 millions de consommateurs a fait du bruit, avec sa “liste noire des prix qui
flambent”. La méthodologie a été critiquée par certaines enseignes. Le gouvernement a embrayé très vite derrière 60 millions de consommateurs, pour demander sa propre étude, qui semble confirmer certains points et en infirmer
d’autres
.
  Peu de choses sur le sujet sur les blogs, hormis cette brève  et  ce billet chez les éconoclastes. A lire également sur le sujet l’interview de Moati dans le Monde.

Petit complément, pour signaler qu’il existe des données Insee particulièrement intéressantes, accessibles gratuitement, sur la consommation des ménages depuis 1959, par produit d’une
part, et par fonction de consommation d’autre part. Une mine.

On peut par exemple calculer le poids de la consommation de chaque produit dans l’ensemble de la consommation des ménages, ce que l’on appelle un coefficient
budgétaire. Par grande fonction de consommation, ça donne ce tableau :

 
DESIGNATION DU POSTE 1959 1985 2006
Prod. alimentaires et boissons non alcoolisées 26,8 16,9 13,7
Boissons alcoolisées et tabac 6,2 3,1 3,0
Articles d’habillement et chaussures 11,6 7,3 4,7
Logement, eau, gaz, électricité et autres combustibles 10,8 20,5 25,2
Meubles, articles de ménage et entretien courant de l’habitation 9,3 6,9 5,9
Santé 2,3 2,4 3,4
Transport 10,3 14,9 14,7
Communications 0,5 1,8 2,8
Loisirs et culture 6,9 8,2 9,3
Education 0,6 0,5 0,7
Hôtels, cafés et restaurants 6,5 5,5 6,2
Autres biens et services 7,4 12,7 11,2
Dépense de consommation des ménages 100,0 100,0 100,0
 

 

 
Les dépenses alimentaires, qui représentaient près de 27% des dépenses de consommation, ne pèsent plus que 13,7%. C’est cette fraction du budget qu’une hausse du
prix du lait, pâtes, yaourts, … affecte. En simplifiant, une hausse de 10% des prix de l’alimentaire vous fait perdre 1,37% de pouvoir d’achat.

Sur longue période, vous noterez l’augmentation de la part des dépenses de logement, eau, gaz…, d’une part, des dépenses de loisirs et culture, d’autre part. Sur
les 20 dernières années, c’est le poste communication qui a le plus fortement augmenté (+53% entre 1985 et 2006).
L’impact de l’évolution des prix du logement
et des transports est potentiellement plus fort que celui des prix de l’alimentaire, car ces postes de consommation pèsent plus dans le budget.

On dispose de données à des échelles très fines. Par exemple, voici un graphique qui reprend l’évolution des coefficients budgétaires pour les sous-catégories de la
catégorie “industrie du lait”, elle-même sous-catégorie de la catégorie “Industries agricoles et alimentaires” :

 


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Vous noterez la chute du beurre et du lait, la hausse des yaourts et des glaces et sorbets. On vérifie que la France reste le pays du fromage.

Je précise qu’une baisse du coefficient budgétaire ne signifie pas une baisse de la consommation du produit, mais une augmentation moins rapide de cette consommation.

On peut également regarder l’évolution des prix de l’alimentaire, à comparer à l’évolution de l’ensemble des prix à la consommation. On obtient la courbe suivante
:


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On observe bien la déconnection des prix sur 2000-2006, avec un pic en 2003. Reste à en préciser les raisons, le débat tournant autour du poids respectif des lois
dans la grande distribution, de l’envolée des prix agricoles, de la PAC, …  
Sur le rôle de la PAC et des quotas laitiers décriés par Alexandre
Delaigue, j’aurais tendance à nuancer  (voir d’ailleurs certains
commentaires intéressants sur le billet d’Alexandre
) : les quotas ne sont pas atteints dans tout un ensemble de régions car il y a des productions aujourd’hui plus rentables, et aussi pour
des raisons socio-économiques : l’élevage est une activité beaucoup plus contraignante que l’activité céréalière par exemple. Sur la loi Galland, le débat est entre les partisans d’une
déréglementation rapide (Attali-Askenazy) et les partisans d’une déréglementation plus en douceur (Moati) pour éviter différents effets négatifs. Sur les prix mondiaux : d
ans tous les cas, leur évolution risque de continuer un certain temps, et de peser sur le pouvoir d’achat des ménages. Comme le rappelle Moati dans son interview au Monde, mesurer
le pouvoir d’achat des ménages consiste à suivre l’évolution de R/P, avec R le revenu nominal et P l’indice des prix à la consommation. On a tendance à se focaliser très fortement sur le
dénominateur (comment assurer la baisse des prix?), en “oubliant” le numérateur (comment assurer une hausse des revenus?), sachant que sur ce dernier point, d’autres débats émergent : est-ce un
problème de répartition des richesses? de croissance trop faible? etc. 

Pour finir, je signale que l’impact des prix de l’alimentaire n’affecte pas de la même manière les ménages, on observe notamment que le poids dans le budget des dépenses alimentaires décroît avec le niveau de revenu
:

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Le poids de l’alimentaire décroît tendanciellement pour tous les quintiles, mais les différences subsistent entre quintiles. Bon, il y aurait plein d’autres choses à
dire à partir de ces chiffres, je vous laisse vous amuser avec!

PS : Christian Aubin, doyen de l’UFR de Sciences Economiques de Poitiers, est interviewé par France Bleu
Poitou
lundi matin, entre 9h10 et 10h50 dans l’émission “Les Spécialistes”, sur la question hausse des prix/pouvoir d’achat. Vous pouvez poser des questions par mail ou par téléphone, infos
ici.

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L’enseignement supérieur à l’heure de la blogosphère

 Petit dossier sur
le site de l’étudiant, consacré à la blogosphère dans l’enseignement supérieur. J’en profite pour faire un petit point sur l’audience, 
après deux ans de
blog, avec le nombre mensuel de pages vues (PV*), échelle de gauche, et le nombre mensuel de visiteurs uniques (VU*), échelle de droite. Je mets des * car pour pouvoir comparer les chiffres
mensuels, j’ai ramené le nombre de PV et de VU à 30 jours (PV* = nombre de pages vues (PV) divisé par le nombre de jours du mois, le tout multiplié par 30). Soit un peu plus de 1200 VU par
jour et 5800 PV par jour sur les derniers mois. Ce qui fait beaucoup de monde (on est parfois serré), flatte mon ego (je vous dis pas), n’est pas un signe de qualité (je sais), etc…

 



 

 

Le billet le plus consulté en 2007 ? La TVA sociale anti-délocalisation anti-chomage non
inflationniste qui va faire payer les méchants étrangers
, suivi de Pourquoi, mais pourquoi donc n’avons-nous pas de meilleurs
journalistes ni de meilleurs politiques?
 , de Vieille
femme laide et handicapée d’origine maghrébine cherche emploi de cadre dans une grande entreprise parisienne…
 et de Darcos attaque (sournoisement) Sarkozy. Les visiteurs de ce blog viennent souvent (hors accès directs, moteurs de recherche, accès netvibes, …, qui représentent l’essentiel) de rezo.net, de chez les Econoclastes, du Libéblog ; ils sont majoritairement localisés en France, puis, loin derrière, en Belgique, aux Etats-Unis, au Royaume-Uni
et en Suisse. En France, les cinq premières villes sont Paris, Poitiers, Lyon, Courbevoie et Marseille. Les visites sont significativement plus nombreuses en semaine que le week-end, le jour le
plus creux étant le samedi.

 

Quelques remarques, sur l’intérêt de ce blog :

 

* pour les visiteurs : c’est un moyen évident de faire des ponts entre recherche académique et demande sociale. Si je me suis lançé dans cette aventure, c’est avant
tout pour ca et si je peux, ce faisant, chasser quelques idées reçues, faire que les gens se posent un peu plus de questions et perdent quelques certitudes, je pense que le jeu en vaut la
chandelle. N’hésitez pas à compléter.

 

* pour moi : une meilleure diffusion de mes travaux/idées, des commentaires et des renvois à des ressources intéressantes qui me permettent d’avancer dans ma propre
réflexion, une incitation à suivre de manière plus régulière les débats relayés par les médias et les travaux de recherche permettant d’éclairer ces débats, la découverte d’autres blogs, sur
l’économie bien sûr, mais aussi sur d’autres sujets,

 

autres remarques, sur le coût :

 

* activité chronophage s’il en est… Alexandre Delaigue estime à 15 à 20h semaine le temps qu’il y passe, difficile pour moi d’évaluer ce temps. L’écriture des
billets est assez rapide, mais le temps de la réflexion, de la recherche de statistiques, de documents, etc… est important. Comme je traite assez souvent de sujets en lien avec mes
recherches et enseignements, difficile de cloisonner le temps pour le blog et le temps pour mes autres activités. Il est clair cependant que pour concilier tenue d’un blog, activité
professionnelle et vie personnelle, mieux vaut être insomniaque, et, même dans ce cas, l’équilibre est difficile à trouver

* le fait d’aborder des sujets que je maîtrise moins équivaut à une certaine prise de risque. J’essaie de ne pas dire de bêtise, cela m’est arrivé deux ou trois fois
(peut-être plus?), mais tant que cela me permet d’avancer dans ma réflexion, je considère que c’est plutôt positif

 

* un regret : le sentiment que beaucoup de personnes surfent sur l’actualité, passent très vite d’un sujet à l’autre, et ne font pas beaucoup de cumulatif (je me
trompe peut-être). Pour pallier partiellement ce problème, j’envisage de créer des pages avec des ressources potentiellement utile, genre notes de lecture, ainsi que éléments de méthode sur mes
sujets de recherche (notamment sur le développement économique local), peut-être aussi des études de cas d’entreprises, je pense que cela pourrait être utile et complémentaire du blog
stricto sensu.

* inutile de dire que je réponds moins souvent aux commentaires que je ne le voudrais, que ma gestion des catégories est très approximative, que ce serait bien que je fasse une blogroll,
etc…

Bon, il y aurait plus à dire, je développe ultérieurement.

 
 

Pour finir, une petite précision : je reçois beaucoup de mails, de plus en plus de mails. Certains sont très intéressants, soulèvent des questions ou me font passer
des documents utiles, j’aimerais y répondre, je manque de temps pour cela. Prière de m’excuser, je fais au mieux. Pour d’autres, en revanche, notamment des mails de lycéens ou d’étudiants,
je signale que je n’ai pas vocation à traiter leurs sujets de dissertation ou de mémoire, par principe je ne réponds donc pas. Dernier exemple en date, reçu hier (anonymé) :

 

 

Bonjour professeur, je me présente. Je me prénomme X et je vais passer un grand oral d’ici quelques jours avec un exposé sur un sujet au hasard puis une série de
questions. Côté éco, je ne connais pas grand chose car je travaille dans la fiscalité ! 😉

 

Les sujets qui me posnt souci sont  :

 l’impôt : outil économique?

l’euro et la consolidation européenne

libéralisme économique et inégalités.

Je voulais savoir sivous auriez la possibilité de me communiquer une problématique rapidepour chq sujet car l’exposé dure 10mn. Je dois juste présenter une intro,
dégager une problématique et une conclusion.

Meri beaucoup (l’oral est pour mardi 19.2)

 

Sans commentaire…

économistes en vidéo

Philippe Moati, d’abord (j’en avais parlé ici et ), qui réagit aux propositions Attali de libéralisation de la grande distribution :

Philippe Moati, toujours, sur le décalage pouvoir d’achat perçu et pouvoir d’achat mesuré. Pour le rapport complet, voir ici.


Camille Landais, enfin, sur La vie des idées, qui explique pourquoi il y a, en France comme ailleurs,
des riches de plus en plus riches. Je n’ai pas pu remettre la vidéo sur mon blog, pour la visionner, cliquez ici.

Les blogs se mettent à l’éco

C’est le titre d’un article d’Alternatives Economiques, signé Boris Cassel, dans le numéro de
février 2008. Début gratuit ici, l’intégralité est disponilbe moyennant
paiement sur leur site, ou dans le magazine, à partir de demain dans les kiosques. Apparemment, on y parle des éconoclastes, de Gizmo, d’Etienne Wasmer et de votre humble serviteur, sans doute
d’autres blogueurs également. Bref, que du beau monde!

Carotte ou bâton?

Via Chris Dillow, je découvre un
texte intéressant qui montre que lorsqu’il existe à la fois de très fortes incitations positives (de grosses carottes) et de très fortes incitations négatives (de gros
bâtons), les premières sont plus efficaces que les dernières.

 

Plus précisément, le texte s’intéresse aux pratiques religieuses (je colle à l’actualité!) : les gens vont-ils à la messe ? prient-ils ? Il
montre, à partir de données sur près de 19 000 personnes issues de 28 pays, que : i) le fait de croire, que ce soit au Paradis ou à l’Enfer, influe fortement sur les pratiques (autrement
dit, les incitations comptent), ii) surtout : le fait de croire au Paradis (sacré carotte !) a plus de deux fois plus d’impact sur ces pratiques que le fait de croire en l’Enfer (sacré
bâton !), iii) symétriquement, le fait de ne pas croire au Paradis a un effet (négatif) double de celui de ne pas croire en l’Enfer.

Pour information, dans leur échantillon, 70% des personnes ne croient ni au Paradis, ni à l’Enfer, 21,6% croient au deux, 7,8% croient au Paradis mais pas à
l’Enfer, 0,6% à l’Enfer mais pas au Paradis (ces 0,6% sont étranges : penser qu’après la mort, c’est l’Enfer, ça doit vous pourrir la vie. Ce qui fait un total peu
réjouissant…).

Simpliste et réducteur

Les blogs tuent la démocratie.  C’est en gros ce que nous dit Cass Sustein (enseignant à l’Université de Chicago) dans un article du Financial Times. Son argumentation est la suivante :
avec le développement d’internet, des blogs et des réseaux sociaux, on assiste à la formation de groupes d’individus très homogènes (ceux qui se ressemblent s’assemblent en communautés
d’individus aux idées proches). Sur la base d’une expérience menée en 2005 dans le Colorado, Cass Sustein indique ensuite que des discussions entre des groupes d’individus homogènes émergent des
prises de position plus radicales, et que toute diversité intra-groupe tend à disparaître.

Ceci s’expliquerait notamment par le fait que l’échange d’information entre des individus proches ne permet pas d’accéder à des informations discordantes, et par le
fait que discuter avec des personnes partageant votre opinion vous rend plus sûr de vos positions, ce qui peut vous conduire à vous radicaliser. “Preuve” avancée par l’auteur de cette
homogénéisation via internet :
 

 

80 per cent of readers of the leftwing blog Daily Kos are Democrats and fewer than 1 per cent are Republicans. Many popular bloggers link frequently to those who
agree with them and to contrary views, if at all, only to ridicule them. To a significant extent, people are learning about supposed facts from narrow niches and like-minded others.

En fin d’article, l’auteur reconnaît que cette polarisation des individus existait avant Internet, mais qu’elle se renforce depuis, et que “c’est un réel problème
pour la démocratie”.

Voir le commentaire de cette analyse par Mark Thoma.

Les Syndicats contre la mondialisation. La résurgence des syndicats portera-t-elle un coup à la
mondialisation ? Pour Kenneth Rogoff, professeur à l’université de Harvard et ancien économiste en chef du FMI, c’est
oui
. S’il considère que « dans un pays relativement pauvre comme la Chine, les vrais syndicats peuvent contribuer à contrebalancer le pouvoir des
employeurs en apportant une amélioration des conditions de vie surpassant les coûts de la croissance », il pense qu’en revanche, « aux Etats-Unis et dans les riches pays européens, il
est douteux de soutenir que le renforcement des syndicats est plus profitable que coûteux » (…), les syndicats encourageant « trop souvent des modes de travail et des structures
salariales rigides ne récompensant ni le travail ni les compétences ».

Et de conclure : « il est plus probable que l’influence politique des syndicats devienne une force majeure de déstabilisation du commerce et de la croissance, avec des conséquences fort
incertaines. En voyant les dirigeants politiques de pays riches céder aux exigences des syndicats et dénigrer le libre-échange et l’immigration, il y a toutes les raisons de s’inquiéter pour
l’avenir. C’est pour cela que les syndicats seront l’un des grands facteurs imprévisibles de l’économie en 2008».

Ce n’est pas tout à fait l’analyse que je ferais après avoir entendu les propos de notre président (sur l’immigration, les délocalisations, les remparts qu’il veut
dresser via la CDC pour les entreprises françaises, etc.), à comparer aux déclarations de François Chérèque, hier sur Europe 1, se desespérant des discours anti-mondialistes de nos politiques et de la politique d’immigration de notre gouvernement.

Coup de pied dans le cul

Entendu hier soir sur France 5, dans un documentaire suivant Martin Hirch lors de la mise en oeuvre du RSA.

Martin Hirsch rapporte à une collaboratrice les propos d’un membre du gouvernement (pas sûr à 100%, mais j’ai peur de ne pas me tromper…). “[Machin] m’a dit  “ce n’est pas plutôt d’un bon
coup de pied dans le cul dont ils ont besoin les chômeurs?”

Réponse de Hirsch (de mémoire): “le problème, c’est que tu oublies qu’ils sont devant une porte fermée les chômeurs… si tu leur donnes un coup de pied dans le cul, ils vont s’éclater la tête,
ca va leur faire mal…. si tu leur redonnes un coup de pied dans le cul, ca leur fera toujours mal, et là ils vont se retourner et te donner une grande baffe… alors le mieux c’est de commencer
par ouvrir la porte… après, quand la porte est ouverte, tu pourras leur donner des coups de pied dans le cul si tu veux…”


J’adore, on dirait du Audiard…