Pourquoi les médias parlent-ils de Sarkozy-Bruni?

Tous les médias en parlent,  forcément, comme en témoigne la revue de presse des unes de quotidiens de Diner’s Room.
Ils en parlent, en citant comme source  un article de l’Express de Renaud  Revel, qui se justifie ainsi (repris aussi de Diner’s Room) :

Est-ce qu’il fallait le faire ? Oui, on est convaincu que oui, parce que ce qui touche au Chef de l’État n’est pas neutre, y compris sa vie privée. La vie
privée du Chef de l’État appartient un peu aux français.  (…) C’est quelqu’un qui affirme, qui affirme, avec beaucoup de décontraction et beaucoup de modernité sa vie privée, et ça, je
trouve, c’est plutôt une bonne chose. Et la presse, dans ce cadre là, ne fait encore que son métier.

Personnellement, j’avancerai une autre explication toute bête (on doit pouvoir faire mieux dans l’analyse, disons que c’est pour lancer le débat).
Supposons deux quotidiens A et B. Une information commence à circuler, dont on pense que le lecteur médian est friand. A et B s’interrogent chacun dans leur coin : faut-il en parler? Si
A en parle, mais pas B, A gagne 5 lecteurs au détriment de B et symétriquement. On a donc la matrice des gains suivantes (premier chiffre entre parenthèses = gain de A, deuxième chiffre = gain de
B) :

  B en parle B n’en parle pas
A en parle  (0,0) (+5,-5)
A n’en parle pas (-5,5) (0,0)


Plaçons nous dans la situation de A : si B en parle et que j’en parle, je gagne 0, si je n’en parle pas, je perds 5. Si B n’en parle pas et que j’en parle, je gagne 5, sinon je ne gagne rien.
Conclusion : quoi que fasse B, j’ai intérêt à en parler. Jeu symétrique, même raisonnement pour B, les deux en parlent. Notons qu’
on peut raisonner sur une
autre matrice, en supposant qu’une telle information permet d’accroître les ventes totales par exemple de 10. La matrice devient ((5,5) ; (10,0) ; (0,10) ; (0,0)), la conclusion est la même, mais
le gain collectif est non nul. Je ne sais pas quelle est l’hypothèse la plus pertinente.


Bref, inutile de chercher des arguments du genre “la vie privée du chef de l’Etat appartient un peu aux français”, ou “nous devions faire notre métier”, tout le monde est incité à parler de
l’info, même si tout le monde trouve stupide d’en parler. On a quelque chose qui ressemble à un comportement mimétique, non pas dans le traitement de l’information, mais dans l’information que
l’on traite (car rien n’empêche ensuite de se différencier dans le traitement de cette information). Et la force de Sarkozy en la matière consiste sans doute à avoir fait se diffuser une
convention dans les médias selon laquelle toute information le concernant est plus importante que n’importe quelle autre information. Non pas intrinsèquement plus importante, mais plus importante
car chaque média pense que chaque autre média la considère comme plus importante.

(bon, j’arrête là, sans doute à raffiner, j’attends vos commentaires pour ajustement)

Les Français (et les européens) sont-ils nuls en science?

On pourrait le croire après avoir vu la vidéo "qu’est-ce qui gravite autour de la terre". Mais on peut se rassurer un petit peu avec cette étude de l’Union Européenne, dont j’ai extrait le tableau suivant :

Sur le premier item "le soleil tourne autour de la terre", 29% de mauvaises réponses. Certes, 29%, ce n’est pas rien, mais on est quand même assez loin des 56% du jeu de la vidéo. Soit le public TF1 a de moins bonnes connaissances que la moyenne européenne, soit les français dans leur ensemble sont plus mauvais que la moyenne européenne, soit le terme "gravite" employé dans le jeu en a piégé plus d’un.

Sur la deuxième hypothèse (les français plus mauvais que les autres européens), c’est plutôt faux, les français ont une moyenne bonne réponse supérieure à la moyenne (69% contre 66%) :


S’agissant de l’hypothèse de mauvaise compréhension du terme "gravite", difficile d’avoir une preuve, bien que… Dans la même étude, on interroge les citoyens : "pour chacun des sujets suivants, dites-nous à quel point, selon vous, il est scientifique (sur une échelle de 1 à 5)." Pour la moitié de l’échantillon, on inclut comme item "astrologie". Pour l’autre moitié de l’échantillon, on remplace "astrologie" par "horoscope". Résultat des courses : 41% considère que l’astrologie est un sujet très scientifique (score 4 ou 5) … mais seulement 13% si le terme est "horoscope"! Bref, il y a un vrai problème de compréhension du vocabulaire utilisé dans les questions.

Pour finir, je vous signale que l’économie est considérée comme étant un sujet moins scientifique que l’astrologie (40% contre 41%)…

Et pourtant, elle tourne… enfin je crois…

On l’a vu dans un précédent billet, 56% des participants d’un célèbre jeu télévisé pensent que le soleil tourne autour de la terre. Il y a fort à parier que bon nombre d’entre eux n’ont rien trouvé de drôle dans cette publicité, ce qui pourrait conduire à une chute de l’action Bic (merci à Virginie pour le lien)…


Je reviens bientôt avec un billet plus sérieux sur les connaissances scientifiques des européens.

Et pourtant, elle tourne…

J’explique parfois aux étudiants que le développement des connaissances est cumulatif : on n’a pas besoin de redécouvrir à chaque génération l’ensemble des connaissances déjà développées, on s’appuie plutôt sur elles pour en découvrir de nouvelles. Comme le dit la formule, nous sommes des nains juchés sur les épaules de géants (voir ici et ). Je leur dit aussi, ensuite, qu’ils ont parfois du mal à faire du cumulatif, lorsqu’ils peinent à se souvenir de ce que je leur ai enseigné l’année d’avant…
Qu’ils se rassurent, il y a pire (trouvé ici)…

 

 

 

Sigmund Chirac



Lu dans le JDD hier, cette affirmation de Denis Tillinac, écrivain corrézien proche de Chirac :

Si l’on sentait, dans l’inconscient collectif, un besoin de Chirac, il se représenterait. Pour le moment, ce besoin on ne le perçoit pas. Mais cela pourrait advenir à la faveur d’un aléa comme une crise internationale ou si Le Pen n’avait pas ses 500 signatures.

Vu que 81% de conscients français ne souhaitent pas que Chirac se représente (même source), notre président prépare une réforme pour faire voter les inconscients. En Corse, les morts votent bien, remarquez…

Amis lecteurs, je vous propose de mettre vos inconscients en veilleuse pendant deux ou trois mois.

téléchargement illégal?

Dans son rapport, Denis Olivennes croît que la simple présentation des chiffres sur la baisse des ventes de CD suffit à démontrer  les
effets néfastes du téléchargement illégal. Mathieu P. indique que
l’argument est un peu court. Alexandre Delaigue complète dans un commentaire au billet de Mathieu P. :

 

Ce n’est pas la première fois que le chiffre d’affaires de l’industrie musicale baisse : il a diminué de 18% entre 1999 et 2006, mais il avait baissé d’autant entre
1979 et 1985. Ce n’est pas non plus la seule industrie cyclique : les ventes d’automobiles aux USA ont baissé de 22% dans la même période. Peu probable que ce soit parce que les
utlisateurs téléchargent des voitures sur internet…
(c’est moi qui grasse)

 

Télécharger des voitures, point encore, mais le vin, ca y est, c’est possible ! (merci Daniel pour le lien).

Le péril de payer les fonctionnaires à la performance

Petit article sur ce sujet brûlant de Maya Bacache-Beauvallet dans les Echos daté du 17 novembre. Il résume une étude développée ici.

Juste un petit passage de l’article :

(…)L’exemple de la justice aux Etats-Unis est parlant. En 1987, une commission chargée de construire des indicateurs de performance du système judiciaire a défini 75 indicateurs. Ingérable, le système s’est réduit dans les faits à l’indicateur le plus simple, la durée moyenne du procès. Cette durée a baissé avec le suivi de cet indicateur, mais au prix d’une hausse des coûts privés supportés par les plaignants. Les avocats ont en effet augmenté leurs honoraires pour assumer l’augmentation des cadences. Rappelons que, dans le cadre de la LOLF, 63 indicateurs mesurent la performance de la mission justice en 2006…