Faut-il prolonger ses études en période de crise?

C’est en quelque sorte la question traitée par l’Insee dans ce document qui vient juste de paraître. Avec plusieurs résultats intéressants :

  • les jeunes sont plus fortement affectés par la dégradation de la conjoncture (moins d’embauche, temps d’attente plus long, salaire moindre), ce qui pourrait les inciter à rester dans le système éducatif afin d’attendre des jours meilleurs,
  • ce n’est pas vraiment ce qu’ils font cependant : l’analyse empirique développée dans le document montre que seuls 0,4% des jeunes scolarisés de 16 à 24 ans prolongeraient d’un an leur scolarité quand le taux de chômage des jeunes augmente de 3 points. Le jeune est peu réactif, donc,
  • résultat essentiel : les effets d’une mauvaise conjoncture quand on entre sur le marché du travail s’estompent assez rapidement. Après quatre ans, les taux d’emplois et la part des emplois en CDI sont les mêmes, quelle que soit la conjoncture initiale,
  • différences hommes/femmes cependant : quand un homme de 15 à 24 ans entre sur le marché du travail, une hausse d’un point du taux de chômage baisse de 0,3% son salaire moyen. Pour les femmes, c’est 0,8%. Et alors que les différences s’estompent pour les hommes au bout d’un an, elles durent plus longtemps pour les femmes : cinq ans après leur sortie du système éducatif, elles sont plus fréquemment à temps partiel, notamment pour les plus diplômées. Dans ce contexte, ça peut valoir le coup de prolonger un peu…

L’absence (relative) de persistence des effets n’était pas gagnée d’avance. En effet, les résultats des travaux empiriques sur le sujet sont assez contrastés et varient selon les pays (voir ce document pour une revue de la littérature théorique et empirique). Dans certains cas, ce n’est pas top : effet de 6 ans dans une étude sur l’Allemagne, de 12 ans dans une autre étude japonaise, effet sur toute la période 25-36 ans de jeunes sortis entre 15 ans et 19 ans en Norvège. Ce qu’on peut expliquer par le fait que connaître une période de chômage peut être vu plus ou moins longtemps par les employeurs comme un signal négatif, ou par le fait que connaître une telle période de chômage, c’est accumuler moins de compétences que ceux qui, par chance, n’en connaissent pas et qui donc peuvent rester plus ou moins longtemps avantagés par rapport aux premiers.