Massive MIMO : Fonctionnement (Troisième Article)

Voici le troisième article sur le déploiement du Massive MIMO.

Se référer aux articles précédents :

Massive MIMO : Définition (Première Partie)

Massive MIMO : Description de l’antenne (Deuxième partie)

La spécification pour le LTE définit 8 modes de transmission, le LTE-Advanced en défini 10 et un onzième mode est rajouté dans la release R.11. A part le mode TM1 qui ne nécessite qu’une seule antenne en émission et en réception, les autres modes permettent :

  • d’apporter une meilleure robustesse du canal par de la diversité en émission ou par la gestion de faisceau ;
  • d’améliorer la capacité par une transmission MIMO. Dans le cas du MIMO, le nombre de couches MIMO dépend du nombre de transmission décorrélées entre l’émetteur et le récepteur. Soit H la matrice du canal de propagation, le rang du canal correspond au nombre de couches MIMO possible.

Il est donc nécessaire d’avoir une antenne avec une colonne d’éléments rayonnants, la polarisation cross-polaire permet de doubler la diversité.

Une antenne est alors configurée par :

  • un seul élément rayonnant ;
  • deux éléments rayonnant en cross-polaire ;
  • une colonne d’élément rayonnant (avec une seule ou deux polarisation) ;
  • de plusieurs colonnes, chaque colonne contient plusieurs éléments rayonnants (en nombre égal).

Dans le cas des antennes actives, plusieurs AE sont regroupés dans un TRX, et

On définit les caractéristiques de l’antenne par une lettre A à I :

Figure 14 : La configuration des antennes (extrait livre : « LTE-Advanced Pro, Une étape vers le réseau de mobiles 5G », LAUNAY, PEREZ)

Les modes de transmissions nécessitent une configuration d’antenne :

  • TM1 : SISO n’utilise qu’une seule colonne et une seule polarité
  • TM2 : Diversité en transmission nécessite 2 ou 4 colonnes d’éléments rayonnants. Elle peut donc utiliser la configuration d’antenne D (une colonne de polarisation +/- 45°), E, F, H ou I. Avec deux colonnes, le codage utilisé est le code d’Alamouti SFBC (Space Frequency Block Codes), avec 4 colonnes on rajoute de la diversité temporelle FSTD (Frequency Shift Time Diversity).
  • TM3 : SU-MIMO en boucle ouverte avec diversité CDD (Cyclic Delay Diversity) nécessite 2 ou 4 colonnes d’éléments rayonnants. Elle peut donc utiliser la configuration d’antenne B, D (une colonne de polarisation +/- 45°), E, F, H ou I.
  • TM4 : SU-MIMO en boucle fermée avec la configuration d’antennes B,D,E,F,H ou I
  • TM5 : MU-MIMO avec la configuration d’antennes B,C,E,F,H.
  • TM6 : Multiplexage spatiale pour la formation de faisceau avec la configuration d’antennes B,C,E,G (plusieurs colonnes) par précodage numérique (PMI)
  • TM7 : Multiplexage spatial pour la formation de faisceau et MIMO dans une direction donnée en exploitant l’angle d’arrivée (AoA) ou direction à l’arrivé (DoA). Le mobile ne distingue plus une antenne physique comme dans les modes précédents mais une antenne virtuelle (cf. figure 4) en s’appuyant sur des éléments rayonnants à égales distances (ULA : Uniform Linear Array) dont la distance est inférieure à lambda/2 (lambda est la longueur d’onde). Ce mode nécessite la configuration d’antennes B,C,E,G.
  • TM8 : Introduit dans la R.9, le mode TM8 est similaire au TM7 avec deux couches.
  • TM9 : SU-MIMO et MU-MIMO à 8 couches.

Pour le mode TM7, la spécification 3GPP introduit la notion d’antenne virtuelle AP5 : le terminal ne voit qu’une seule antenne virtuelle mais l’orientation numérique du faisceau est obtenue en apportant un déphasage et un gain constant sur chacune des antennes physiques. Une antenne physique est nommée dans cet article par antenne individuelle : le même signal est transmis sur 4 TRX avec une pondération différente, chaque TRX est connecté à une antenne individuelle.

Figure 15 : La connexion de l’antenne virtuelle et physique

Le standard 3GPP introduit la notion de port d’antenne, qui une nouvelle fois peut apporter de la confusion. Un port d’antenne est un port logique.

Tableau 1 : Les ports d’antenne pour la 4G

Comme l’indique la table 1, les signaux de références correspondent à un numéro de port d’antenne. Les ports d’antennes correspondants au UE Specific RS sont utilisés pour la formation du faisceau (obligatoirement supporté en mode TDD et optionnel en mode FDD).

Les signaux de références sont référencés à un numéro de port d’antenne, mais plusieurs ports d’antennes différents transmettent le signal vers la même antenne individuelle (antenne physique) ou transmis vers plusieurs antennes individuelles. La station de base gère la correspondance entre un port d’antenne et l’antenne individuelle.

Dans le cas de la formation d’un faisceau numérique (beamforming), le calcul des pondérations à effectuer sur chaque antennes individuelle (nommé aussi poids) est réalisé par la station de base en s’appuyant sur le rapport de retour d’état du canal 4G (CSI à partir des signaux de références) ou à partir des signaux de références sur le lien montant.

II-2) Les signaux de références

Un signal de référence (CRS ou CSI-RS) est une séquence pseudo-aléatoire transmise sur chaque antenne individuelle. La séquence pseudo-aléatoire permet au récepteur de séparer les différentes séquences CSI-RS et d’estimer la qualité du signal reçu au niveau de chaque séquence de référence.

Le récepteur n’a pas besoin de connaître le nombre d’antennes individuelles de l’antenne MIMO (ou Massive MIMO, il doit savoir combien de signaux de référence il doit mesurer. Il retourne ainsi l’état du canal de propagation ayant affecté chaque signal de référence. Pour que cette information soit utile, il est nécessaire que les signaux de références soient décorrelées. Ainsi, chaque signal de référence doit être transmis sur une et une seule antenne individuelle.

Dans le cas du LTE (R8, R9), le MIMO était limité à 4 antennes. L’exploitation de 4 signaux de références CRS suffit.

Si la release 10 augmente à 8 signaux de références CSI-RS, il est nécessaire de monter à 16 (R.13) puis 32 (R.14) signaux de références CSI-RS pour augmenter le nombre de chaîne de transmission TRX. Mais cela reste insuffisant pour fonctionner avec une antenne massive-MIMO 64T64R sauf si l’on transmet deux séquences CSI-RS sur deux antennes individuelles dont la polarisation est croisée (il s’agit ici d’une hypothèse, je n’ai aucune certitude sur ce point.)

Pour lever cette limitation, dans le cas LTE-FDD la station de base utilise la combinaison des signaux SRS et CSI-RS. Le signal SRS est le signal de référence émis par le terminal mobile vers la station de base. Ainsi dans le cas de la 4G TDD, il est plus efficace d’exploiter l’estimation du canal sur le lien montant.

Pour les modes TM7 et TM8 en 4G, la station de base utilise les signaux de références UE-RS. Pour la station de base 5G, la station de base s’appuie sur le signal de référence SRS du lien montant.

Dans le cas de la 5G à 3,5 GHz, les signaux de références du lien montant SRS suffisent à la station de base pour estimer la formation du faisceau.

Toutefois, le nombre de signaux de références CSI-RS étant limité, la 5G NR en mode FDD s’appuie sur deux méthodes :

  • Reciprocity based CSI : Il s’agit d’estimer le signal de référence CSI-RS à partir des signaux SRS
  • Closed Loop : Le terminal UE envoie à la station de base les informations du canal CSI

II-3) Le mode de transmission Massive MIMO en 5G

Pour améliorer les performances de la méthode Closed Loop, l’accès initial propose une commutation des faisceaux (beam switch transmission procedure) en utilisant différent blocs SSB. Au niveau de l’antenne, un réseau de calibration est nécessaire pour pointer dans la bonne direction. Ainsi, le terminal UE détermine le bloc SSB et renvoie les informations du canal pour chaque faisceau reçu à la station de base gNB. Ensuite, des informations complémentaires peuvent être transmis selon le type de configuration choisi :

  • CSI TYPE 1 : Normal (PMI) feedback dans le cas du SU-MIMO donnant la direction du faisceau le plus important
  • CSI TYPE 2 : Enhanced (explicit or codebook based) dans le cas du MU-MIMO en apportant plus d’information de retour par le terminal à la station de base.

ANNEXE

Reference 1 :

https://www.5gamericas.org/wp-content/uploads/2019/07/MIMO_and_Smart_Antennas_July_2013_FINAL.pdf)

Référence 2 : Livre « LTE-Advanced Pro, Une étape vers le réseau de mobiles 5G », Launay F, Perez A

(https://www.amazon.fr/LTE-Advanced-Pro-Fr%C3%A9d%C3%A9ric-Launay/dp/1784055778)

Massive MIMO : Description de l’antenne (Deuxième partie)

Suite de l’article : Massive MIMO : Définition (Première Partie)

I-4) La structure d’une antenne

Sur l’exemple ci-dessous extrait du site 5GAmericas (Reference 1), l’antenne est simplement constituée d’une colonne d’éléments rayonnants. L’antenne est équipée de 4 connecteurs coaxiaux, chaque connecteur est relié à une chaîne radio RF. Parmi ces 4 connecteurs, deux connecteurs permettent de fonctionner sur deux bandes différentes, et deux connecteurs sont utilisés pour l’exploitation de la polarisation cross-polaire (+/- 45°).

Figure 8 : Antenne 4G

Sur le schéma on observe 18 éléments rayonnants (Antenna Element), 10 éléments rayonnant sont conçus pour fonctionner dans une bande de fréquence avec une polarisation +/-45°, les 8 autres pour une autre bande de fréquence avec une polarisation de +/- 45°.

Il s’agit néanmoins que d’une seule antenne composée d’une colonne d’éléments rayonnants cross-polaire (single cross polarized column). Un panneau d’antennes (pannel antenna) représente un ensemble d’éléments rayonnants (AE) régulièrement espacés (Linear arrays).

Un circuit de connexion (feed network) réparti les signaux des connecteurs de la chaîne RF vers les éléments rayonnants correspondants (figure 8).

Figure 9 : Le circuit de connexion de l’antenne (feed circuit)

Pour reprendre les définitions précédentes : L’antenne dispose de 4 connecteurs TRX, deux connecteurs TRX fonctionnant sur une bande de fréquence, deux autres sur une autre bande.

Chaque antenne individuelle TRX se compose de 4 ou 5 éléments rayonnants. Chaque élément rayonnant fonctionnant sur une bande de fréquence et de même polarisation transmet donc le même signal RF. Si le déphasage apporté par le circuit de connexion est figé (feed circuit), on apporte un gain RF non contrôlé en temps réel (pas de possibilité d’orienter le faisceau RF de manière analogique, on peut toujours réaliser du beamforming numérique dans une bande donnée à partir des 2 antennes individuelles cross-polaires). Il s’agit d’antenne passive.

Le tiltage électronique peut être réalisé de manière mécanique soit par le contrôle d’un moteur DC soit par le déphasage apporté au niveau du circuit de connexion (signal RET e-tilt sur la figure 8).

Le faisceau commuté (switch beam) est une avancée vers l’antenne intelligente. L’objectif est de sélectionner le meilleur faisceau en fonction des conditions radios. Dans le cas de la matrice de Butler 4T4R, les 4 antennes individuelles sont toutes connectées à 4 éléments rayonnants avec une combinaison sur le déphasage de manière à transmettre 4 faisceaux différents.

Figure 10 : La commutation de faisceau

Chaque signal en entrée (4 signaux RF) peut donc être transmis dans une direction donnée.

Couplage du MIMO et du BeamForming : Pour transmettre le signal radio dans une direction donnée (Beamforming), il faut transmettre le même flux sur plusieurs antennes individuelles. Dans le cas suivant, l’antenne MIMO est une antenne 8T8R car elle est connectée à 8 chaînes radio RF. Chaque antenne individuelle est connectée à une colonne d’éléments rayonnant dans une polarisation donnée. La figure 11 montre 4 colonnes cross-polaires.

La directivité de l’onde nécessitant l’utilisation de plusieurs antennes individuelles de même polarisation, il est donc possible de générer deux ondes directives (nommés BeamForming BF1, BF2) à partir d’un poids de pondération à appliquer sur chaque antenne individuelle.

Il est donc possible :

  • de transmettre 8 flux identiques pour un seul utilisateur en exploitant les 8 antennes individuelles, dans ce cas on a un faisceau étroit et directif ;
  • ou de réaliser 4 flux MIMO pour augmenter la capacité et le ressenti utilisateur.

Figure 11 : L’antenne MIMO 8T8R

I-4) L’évolution vers le FD-MIMO.

Jusqu’à présent, la directivité de l’onde en élévation (vertical) était réalisée par un tiltage électronique (RET) lors du placement de l’antenne et cette configuration figeait la directivité dans la cellule.

Avec la technique FD-MIMO, il est possible de diriger le faisceau en élévation et en azimuth par l’exploitation d’un réseau d’antennes rectangulaires (ULA 2D) en temps réel.

Figure 12 : L’antenne ULA 2D

A partir de l’angle des signaux d’arrivé et d’un DSP intégré, l’antenne devient intelligente et peut contrôler la phase pour orienter le faisceau RF, on parle d’antenne active :

Figure 13 : Contrôle de la phase appliquée sur chaque AE de l’antenne individuelle

Les antennes Massive MIMO sont des antennes actives. La puissance de transmission  de l’antenne peut monter jusqu’à 120 W pour 128 AE et 180 W pour 192 AE lorsque tous les éléments rayonnants émettent à puissance maximales. La consommation électrique est bien supérieure, je n’ai pas les chiffres à ce jour.