Qu’est-ce que le “rural” ? Analyse des nouveaux zonages

Au sein du service “Etudes et Prospective” du pôle Datar de la Région Nouvelle-Aquitaine, nous avons vocation à produire des connaissances utiles à l’action, pour l’institution régionale bien sûr (autres directions et services du Pôle Datar, autres Pôles, Directions et Services de la Région, …), pour les territoires infra-régionaux de Nouvelle-Aquitaine, pour d’autres partenaires extérieurs, et plus généralement pour toute personne qui peut trouver un intérêt à notre travail pour sa propre activité. D’autant plus que, autant que faire se peut, les études que nous produisons mobilisent des données statistiques France entière, qui permettent de situer les territoires néo-aquitains dans l’ensemble national, certes, mais dont les résultats peuvent être mobilisés par d’autres territoires et d’autres régions. Nous mettrons en ligne au fur et à mesure nos études sur le portail des territoires de la Région, au sein d’une rubrique “études et prospective” qui va rapidement s’enrichir. Vous pouvez y accéder en cliquant ici.

Dans cette perspective, nous venons de mettre en ligne une nouvelle note intitulée “Qu’est-ce que le “rural” ? Analyse des nouveaux zonages”, qui diffère de celle déjà parue sur l’impact de la crise à fin juin 2020, et de celles qui vont paraître par la suite (teasing : l’actualisation de l’impact territorial de la crise à fin septembre sur données Urssaf publiées fin décembre est prévue dans la semaine), en ce qu’elle est de nature plus méthodologique : il s’agit d’interroger la nouvelle définition du “rural” et d’en montrer l’intérêt par rapport à la façon dont il était traditionnellement défini. En voici le résumé :

L’objectif de ce document est de proposer des éléments de réflexion autour de la nouvelle définition du rural proposée par l’Insee, qui repose sur la grille communale de densité, et autour de la suggestion de combiner cette définition à celle du nouveau zonage en aires d’attraction des villes, pour distinguer différents types de territoires ruraux. Nous interrogeons également la méthode d’agrégation proposée par l’Insee pour définir des grilles de densité supra-communales. Les principales conclusions auxquelles nous parvenons sont les suivantes :

  • La nouvelle définition des territoires ruraux, qui repose sur la grille communale de densité, est bien meilleure que les définitions précédentes dérivées du zonage en aires urbaines et du zonage en unités urbaines : alors que ces deux dernières définissaient le rural « en creux » (est rural un territoire qui n’est pas urbain), la nouvelle définition est « en plein ». Elle s’appuie sur un critère morphologique, la densité, et considère qu’un territoire est dit rural s’il est peu dense ou très peu dense, et qu’il est dit urbain s’il est de densité intermédiaire ou très dense,
  • La part de la population rurale dans l’ensemble de la population, estimée à moins de 5% si l’on part du zonage en aires urbaines et autour de 20% si l’on part du zonage en unités urbaines, monte à 33% avec cette nouvelle définition, selon les données du recensement millésime 2017. En Nouvelle-Aquitaine, ces chiffres sont respectivement de 10% (zonage aires urbaines), autour de 34% (zonage unités urbaines) et 51% (zonage basé sur la grille communale de densité),
  • Cette définition du rural, dérivée de la définition proposée à l’échelle européenne, ne rend cependant pas compte de la diversité des mondes ruraux. Seules des études complémentaires permettraient d’intégrer cette diversité ainsi que les interdépendances entre les différents espaces. La proposition de la combiner au zonage en aires d’attraction des villes ne semble pas appropriée, pour différentes raisons,
  • La méthode d’agrégation de la grille de densité proposée par l’Insee permet d’identifier l’orientation rurale ou urbaine de territoires supra-communaux (EPCI, territoires de contractualisation, départements, …). Si elle peut présenter un certain intérêt, nous préconisons, plutôt que de s’en remettre à une distinction binaire rural vs. urbain, de prendre acte du fait que la population de la quasi-totalité des territoires supra-communaux est pour partie urbaine et pour partie rurale,
  • Il serait donc préférable dans la définition des politiques et dans l’orientation des fonds à destination du monde urbain ou du monde rural de partir non pas de l’orientation générale du territoire, mais de la composition précise du territoire en habitants dits urbains et en habitants dits ruraux.

J’insiste sur le fait qu’il ne s’agit pas d’une “simple” réflexion académique : de nombreuses politiques visent le monde dit rural ou le monde dit urbain, la question de la définition de ces espaces est donc essentielle, car cela peut tout changer en termes d’allocation des moyens. Vous pouvez télécharger la note au format pdf en cliquant ici. Toute remarque est bienvenue.

6 commentaires sur “Qu’est-ce que le “rural” ? Analyse des nouveaux zonages

  1. C’est intéressant (je me suis contenté du résumé) mais cela laisse de côté ce qui fait la spécificité des villes, les fonctions dont elles disposent. Se limiter à la densité d’un espace pour le définir, n’est-ce pas réducteur?

    • c’est un critère simple qui fait consensus, mais qui n’épuise pas le sujet. Comme indiqué dans la note, il conviendrait en complément de produire des analyses pour donner à voir la diversité du monde rural (et du monde urbain également, d’ailleurs).
      L’Insee propose un complément en distinguant le rural sous l’aire d’attraction des villes du rural hors are d’attraction, ce qui ne me semble pas satisfaisant, la note explique aussi en quoi.
      Des études plus intéressantes devraient sortir à ce sujet, on peut l’espérer en tout cas !

  2. Bonjour Olivier,
    J’ai parcouru avec intérêt cette note sur le “rural”. Bravo pour la réflexion proposée ici. J’ai noté avec satisfaction que tu évoquais les travaux déjà réalisés par “Hilal et al” en 2011. J’ai tout de suite pensé à la typologie des campagnes françaises, réalisée à l’époque pour la DATAR (la DATAR “nationale”, hé hé hé). Ce document m’avait épaté en son temps. Il évoquait une grande diversité de situations très nuancées. On en avait fait la pub au sein du réseau rural aquitain.
    Le terme englobant “le rural” est à mes yeux tellement réducteur. Je trouve dommage que sur les sites officiels nationaux (ANCT), on ne retrouve plus aucune trace de cette typologie. Comme si les gouvernements successifs (et leurs services) étaient frappés d’amnésie. C’est bien dommage.
    Merci à toi de “réveiller les anciennes réflexions du placard de l’oubli” ! Elles datent peut-être, mais sont frappées du sceau du bon sens.
    A très bientôt pour d’autres réflexions communes, 😉

    • Merci ! Je ne serais pas surpris que l’ANCT soit missionnée pour réactiver cela, ce ne serait pas mal ! Sinon, il faudrait qu’on tente quelque chose de notre côté je me dis…

  3. Bonjour, dans le cadre du partenariat Région NA et Cerema, nous avons en parallèle produit un autre type de note de synthèse en lien avec le pöle DATAR , qui n’ambitionne pas de rivaliser avec des travaux de recherche et académiques, mais apporte d’autres éclairages sur le vocable “Ruralité(s)”, sa diversité, ses acceptions, ses percetions, ses acteurs …assortie d’entretiens.
    https://www.linkedin.com/in/arnaud-valadier-8396b449/detail/recent-activity/
    https://www.cerema.fr/fr/actualites/ruralite-comment-saisir-sa-diversite-note-synthese-du-cerema

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