En juin 2011, à Toulouse, je présentais une communication lors du colloque International MUSSI (Médiations et Usages Sociaux des Savoirs et de l’Information). Cette communication faisait suite à un premier travail, présenté l’année précédente sur l’apport des blogs consacrés aux réseaux sociaux en termes d’hybridation des connaissances.
L’hybridation des connaissances, c’est ce qui se produit lorsque des scientifiques puisent aux discours des non scientifiques, s’en imprègnent, font évoluer leur pensée en prenant en compte ce discours et lorsque, inversement, le commun des mortels (ou les bloggeurs, qui sont au dessus du commun des mortels… là, je provoque un peu) puise dans les résultats de recherche, dans les analyses des scientifiques pour construire sa propre pensée au delà des lieux communs.
Là, j’avoue que j’avais une conviction profonde. J’avais observé que les sites web d’intelligence économique ne servaient pas à grand-chose et qu’en revanche les blogs dédiés à l’intelligence économique étaient vivants, contributeurs. J’avais donc l’intime conviction que par eux passait une forme d’hybridation des connaissances. Je me disais que les bloggeurs, en gens ouverts, curieux, n’hésitaient pas à aller regarder ce qu’écrivent les chercheurs pour commenter, diffuser, intégrer cela dans leur discours. D’autant que nombre de bloggeurs sont des étudiants en intelligence économique qui cherchent à se mettre en valeur par ce moyen (ceux de notre master, entre autres). Je suis donc allé à la pêche des blogs les plus référencés et j’ai épluché les billets mis en ligne.
794 billets en tout, quand même.
Et que croyez-vous qu’il arriva ? Déception sévère.
Voici la conclusion à laquelle mon étude m’a conduit : « contrairement à l’hypothèse formulée lors d’une recherche antérieure, les blogs français consacrés à l’intelligence économique ne suscitent pas une hybridation des connaissances scientifiques issues de la recherche en intelligence économique. Cela pose évidemment plusieurs questions :
– faut-il voir là une méconnaissance complète de la recherche en intelligence économique ?
– Un décalage fort entre les connaissances produites et les centres d’intérêt des bloggeurs ?
– Une conséquence du faible investissement du web 2.0 par les chercheurs pour la diffusion de leurs travaux ?
– Une rétivité des travaux scientifiques à la lecture par des non scientifiques ?
– Un souverain mépris pour la recherche en intelligence économique, comme certains commentaires de billets le laissent deviner ?
Les explications envisageables ne manquent pas, qu’il faudrait soumettre aux bloggeurs concernés. »
Un an a passé. Vous trouverez le texte de ma communication ici.
La balle est dans votre camp, bloggeurs passionnés d’intelligence économique. Pourquoi ne vous emparez vous pas de ce que les chercheurs en intelligence économique écrivent ?
Ne me dites pas que c’est inaccessible ! Je vais même vous donner des exemples de sites :
http://archivesic.ccsd.cnrs.fr « Archives ouvertes en sciences de l’information et la communication » relié au site du CNRS et soutenu par le CCSD (Centre pour la Communication Scientifique Directe). Une recherche sur cette base avec l’expression « intelligence économique » affiche au moins 25 réponses.
http://halshs.archives-ouvertes.fr/ Le projet Hyper Article en Ligne – Sciences de l’Homme et de la Société affiche son ambition : « HAL-SHS met à disposition des documents produits par la recherche dont le niveau scientifique attendu est celui d’une publication soumise dans une revue à Comité de lecture. HAL-SHS ne se limite pas aux documents publiés, ou même destinés à être publiés, mais le contenu scientifique doit être approprié pour un affichage dans HAL-SHS. »[1] Le dépôt est confié à la responsabilité du chercheur. La qualité des textes repose sur le respect par les déposants de l’esprit de la démarche. Une recherche avec « intelligence économique » dans le titre affiche 9 réponses. En incluant les résumés, plus de 45 réponses.
Christian Marcon