« Au cours des cinq dernières années, avec l’aide d’une technique qui a rendu leur création et leur maintenance accessibles à des internautes non experts en informatique, les blogs se sont multipliés. Apparus vers 1996-1997, définis [Herring, Cheidt, Bonus & Wright, 2004] comme « des pages web fréquemment modifiées dans lesquelles les entrées sont listées dans un ordre chronologique inversé » les blogs sont désormais des espaces d’expression numérique aussi diversifiés que peuvent l’être les besoins de parole privée ou publique. Ils ont été rapidement compris par les entreprises comme de nouveaux espaces de communication. Tout aussi rapidement, les professionnels se les sont appropriés pour leur compte propre en tant que supports de leur identité et de leur réputation numérique et, partant, de leur développement d’affaires ou de carrières.
Dans le même temps, depuis 2003, la croissance rapide de la popularité des plateformes électroniques dites de « réseaux sociaux », en particuliers des réseaux sociaux professionnels (linkedin/2003, xing/2003, viadeo /2004, …) a fait émerger un discours laudateur abondant qui oscille entre ardente obligation moderne de présence, postulat d’efficacité informationnelle et productive, et confraternité recommandée. Fort logiquement, des blogs « professionnels » sont apparus sur la thématique des réseaux.
Parallèlement, depuis les années soixante dix, une abondante littérature scientifique a été produite sur le thème des réseaux relationnels. Elle se constitue de travaux parfois peu connus mais aussi de textes relativement populaires, ayant laissé une empreinte dans le vocabulaire dédié aux réseaux. Aux deux premiers rangs de ces travaux, loin devant les autres, il faut citer les fameux « six degrés » [Milgram & Travers, 1967] sur lesquels s’appuient la plupart des sites de réseaux sociaux en ligne pour justifier l’étendue du réseau potentiel de chacun (résultat contesté de manière parfois convaincante) et la « force des liens faibles » [Granovetter, 1973] que d’aucuns exploitent dans le même genre d’argumentation .
Notre interrogation porte sur le degré d’hybridation des connaissances entre les chercheurs, producteurs de connaissances scientifiquement éprouvées, et les professionnels développeurs de blogs tenant un discours soutenu sur les réseaux. Le dispositif info-communicationnel, que constituent ces blogs de professionnels qui animent principalement les débats sur les réseaux sociaux, joue-t-il un rôle d’hybridation des savoirs ? Les bloggeurs réfèrent-ils (et dans quelle mesure ?) aux travaux de recherche, aux concepts et découvertes des chercheurs ? Sont-ils des passeurs de connaissances ? Ou, pour poser la question trivialement : servent-ils à quelque chose de ce point de vue ? »
J’ouvrais ainsi une communication présentée en mars 2010 lors de la Journée Internationale du réseau MUSSI. Il s’agissait alors de présenter le résultat d’une recherche menée sur ce que l’on nomme l’hybridation des connaissances, autrement dit l’imprégnation croisée des connaissances, les scientifiques s’appropriant une connaissance de terrain portée par des professionnels, ces derniers puisant dans les résultats de la recherche scientifique pour penser et écrire leur analyse de terrain.
Pour lire la totalité de cette communication présentée lors de la Journée Internationale du Réseau MUSSI à Toulouse le 15 mars 2010 : MUSSI 2010 Hybridation des savoirs sur les réseaux_Marcon.
Deux ans après, où en est-on ? Le débat est ouvert.
Christian Marcon