Pauvre Europe…

Je crois que l’on a atteint des sommets que je pensais inaccessibles avec la déclaration de Herman Van Rompuy, Président de l’Union Européenne :

l’austérité est le fondement sur lequel nous devons développer une stratégie complète en faveur de la croissance

Je suggère à notre Président de réviser un peu son économie. Consulter un manuel de macroéconomie de première année d’Université devrait suffire. Il peut également lire cet article de Christina D. Romer (trouvé via Gizmo), Professeur d’Economie à Berkeley et Directrice du Council of Economic Advisers d’Obama, paru dans les colonnes du New York Times et justement intitulé Hey, Not So Fast on European Austerity. Il peut lire aussi, régulièrement, les tribunes de Paul Krugman, en commençant par celle-là, par exemple.

Vu la situation actuelle de l’Europe, prôner l’austérité en période de récession, c’est s’assurer de plus de récession encore. Avec un creusement encore plus important des déficits et de la dette, panne de croissance oblige. Que dire d’autre? S’en amuser s’en doute, comme le fait Maître Eolas sur twitter, en détournant la formule  : “La maladie est le fondement sur lequel nous devons développer une stratégie complète en faveur de la guérison”… Pour ma part, je proposerais bien quelque chose comme : “La stupidité est le fondement sur lequel nous devons développer une stratégie complète en faveur de l’intelligence”. Ça colle bien à l’Europe en ce moment, je trouve…

6 commentaires sur “Pauvre Europe…

  1. La stupidité… oh non, j’allais le twitter. 🙂
    Mais doit-on se préoccuper des déclarations de Van Rompuy. Il a aussi déclaré:
    “Je N’EXCLUS pas d’organiser un dîner INFORMEL des chefs d’Etat et de gouvernement des 27 afin de préparer le Conseil européen de juin”
    Quel esprit d’action et de décision!
    Je me demande ce que veux dire “informel”: ils peuvent venir en jeans?

  2. Une question demeure : Pourquoi l’UE continue-t-elle de proner l’austérité alors qu’il y a un large consensus, et de fortes voix qui se font entendre, pour dire que c’est absurde ?
    Quels intérêts, quelle rationalité se cache derrière le fait d’encourager une politique dont on sait qu’elle accentuera les problèmes qu’elle est censée régler ?
    Ca reste mystérieux…

  3. “Pourquoi l’UE continue-t-elle de proner l’austérité alors qu’il y a un large consensus […] Ca reste mystérieux”

    Au contraire, il existe un large consensus hostile à davantage de dépenses. Les 10% de déficit annuel sont intenables. Je vous rappelle que les économistes très marqués à gauche cités, et qui avaient conseillé Obama, ont dû réviser à la baisse leur projet de stimulus, faute de majorité au Congrès (les Démocrates contrôlaient pourtant la Chambre et le Sénat !), et que les Républicains ont triomphalement remporté les élections législatives de 2010 (emmenés par un Tea Party dont l’idée-force était de réduire la dépense publique).

    Quant à l’Europe, les pays sérieux, c’est-à-dire ceux qui ont fait des efforts d’assainissement, ont tout simplement peur de la voie dans laquelle ceux qui n’en font pas risquent de les mener (les alternatives telles que la monétisation de la dette, le défaut, l’inflation,… étant exclus). Car déjà, la Grèce a fait défaut, le Portugal et l’Irlande ne se financent plus sur le marché, et les taux italien et espagnol se sont envolés. L’Allemagne dispose aujourd’hui d’un levier pour contraindre ces pays à effectuer les réformes que, dans d’autres circonstances, sans ce couteau sous la gorge, elles se seraient refusées à entreprendre. Vous citez Christina Romer. Je vous invite à lire son article, elle est plus nuancée que vous : elle dit que des réformes structurelles à long terme sont une bonne chose (elle cite expressément le passage de la retraite en France de 60 à 62 ans). C’est cela, que veulent les Européens et les Allemands. Un changement de mentalité, de direction, une prise de conscience, afin que des réformes soient entreprises. Songez que la France n’a pas produit un seul budget en équilibre depuis 1974 !? Alors que la Belgique, entre 1993 et 2008, sous l’impulsion de Jean-Luc Dehaene et Herman Van Rompuy, a retrouvé l’équilibre budgétaire et fait passer sa dette publique de 133% à 80% du PIB. Il n’y a rien de “mystérieux” : l’Allemagne, que l’on sollicite aujourd’hui pour financer les fonds européens, a simplement compris que certains pays n’ont pas utilisé les fruits de croissance à la réduction de leur endettement ni réalisé les nécessaires réformes d’assainissement à long terme, et que ce n’est que dans la difficulté, le couteau sous la gorge, qu’ils réagiront. Ce qui se passe en Grèce, en Italie (avec Monti), au Portugal et en Espagne leur donne raison.

  4. Sur le blog de Bruegel on trouve de nouveaux éléments au sujet du débat sur l’austérité. http://www.bruegel.org/nc/blog/detail/article/756-blogs-review-new-facts-and-arguments-in-the-austerity-debate. Le travail de C. Romer est cité, ainsi que de nombreuses autres contributions. Avant cela, j’avais également fait une petite revue du sujet sur mon blog. Lundi 29/04 est sorti le Rapport sur le travail dans le monde 2012 : il dénonce lui-aussi l’austérité et la dégradation de la situation de l’emploi qui est lui est imputable. Lire mon petit compte-rendu à l’adresse : http://toupourleco.wordpress.com/2012/04/30/rapport-sur-le-travail-dans-le-monde-2012-le-piege-de-lausterite/

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