Le péril de payer les fonctionnaires à la performance

Petit article sur ce sujet brûlant de Maya Bacache-Beauvallet dans les Echos daté du 17 novembre. Il résume une étude développée ici.

Juste un petit passage de l’article :

(…)L’exemple de la justice aux Etats-Unis est parlant. En 1987, une commission chargée de construire des indicateurs de performance du système judiciaire a défini 75 indicateurs. Ingérable, le système s’est réduit dans les faits à l’indicateur le plus simple, la durée moyenne du procès. Cette durée a baissé avec le suivi de cet indicateur, mais au prix d’une hausse des coûts privés supportés par les plaignants. Les avocats ont en effet augmenté leurs honoraires pour assumer l’augmentation des cadences. Rappelons que, dans le cadre de la LOLF, 63 indicateurs mesurent la performance de la mission justice en 2006…

11 commentaires sur “Le péril de payer les fonctionnaires à la performance

  1. C’est vrai que ce n’est pas la solution. Quitte à utiliser la rhétorique réactionnaire, les effets pervers de tels indicateurs sont supérieurs aux bénéfices attendus. Mais si l’on veut faire accepter par la population une pression fiscale plus importante et plus progressive,  – pour financer les déficits ou le système de retraite par répartition – les services publics, l’état vont devoir apparaître aux yeux des contribuables, comme plus performants. Ce ne sera pas facile dans la mesure où l’esprit de service public, miné par l’individualisme n’est plus ce qu’il était !

  2. Il est certain que tous les manuels de management précisent qu’indexer la rémunération sur la performance ne se conçoit qu’en maintenant la menace de licenciement sur toute personne tentée d’obtenir une performance indue par l’usage de procédés détournés, par exemple, en reportant des coûts hors de son périmètre d’évaluation.Payer les fonctionnaires à la performance revient donc tout simplement à pousser au crime. Ce qui est peut-être l’objectif recherché

  3. disons qu’un certain nombre de facteurs , dont celui de l’utilité sociale se réduisent difficilement à des camenberts excel … sont pas quantifiables ces saloperies … si l’on veut réformer l’état, il faut arréter de partir du principe que les fonctionnaires sont tous des feignasses , et s’interroger sur la complexification inutile des procédures, les dépenses inutiles générées par les effets de mode,  etc… et , qui sait  , les investissements d’oportunité électorale, même s’ils sont marginaux ….

  4. Quel réconfort de savoir que l’on cherche à optimiser notre bien-être, représenté par la fonction objectif W. Quel prestataire de services publics génial et perspicace que celui qui connaît les désirs intimes de chacun d’entre nous mieux que lui-même! Ceci est un merveilleux exemple des difficultés inhérentes à la planification centralisée de la production. L’entreprise est bien périlleuse et pourtant elle reste toujours aussi tentante. Si seulement on lisait encore Hayek…

  5. la critique est interessante mais il ne faut pas laisser dire que la LOLF prévoit de payer les fonctionnaires au mérite! aucun article de cette très bonne avancée administrative et politique ne le prévoit .Certains y pense pour les très hauts responsables de programme, c’est tout. Dire que les indicateurs sont difficiles à élaborer et parfois un porteurs d’effets pervers c’est vrai…mais l’absence d’information des citoyens et de leurs élus est encore plus grave.

  6. une petite vidéo qu’elle est amusante sur le sujet (de la sociologie comme je l’aime: tout est vrai dedans)http://www2.unil.ch/penombre/divers/11eme_Nocturne.html

  7. Un article et une étude intéressants mais qui me semblent insister un peu lourdement  sur les effets pervers de la prime à la performance alors que le modèle développé dans l’étude montre justement que l’abscence de prime a aussi des effets négatifs. La difficulté est justement d’arriver à trouver les indicateurs adéquats sur lesquels annexer la prime.Les spécificités du secteur publique montrent que la prime au résultat doit peut-être être moins importante que dans le privé. Cependant les arguments théoriques avancés mériteraient d’être validés par l’expériencet sont parfois discutables.- Déjà, je ne vois pas bien en quoi l’argument "multi-tâche" de l’article est spécifique au secteur public. – Sur la coproduction, le modèle théorique de l’étude me semble contestable : l’usager qui est coproducteur du résultat risque de réduire son effort parce qu’il perd une partie des bénéfices au profit du fonctionnaire (dont la rémunération augmente grâce en partie aux efforts fournis par l’usager). Dans la réalité, j’imagine assez mal qu’un élève décide de travailler moins parce que s’il réussit trop bien alors papa et maman paieront plus d’impôts pour que le professeur ait une prime. Cet effet est très exagéré dans le modèle car l’usager supporte la totalité de la rémunération du fonctionnaire. Dans la réalité, le professeur n’ait pas directement payé par les parents. D’autre part l’idée développée reviendrait à dire que si des parents paient des cours particuliers pour un de leurs enfants, alors il serait néfaste que le prix soit indexé aux résultats parce que les parents auront eux-mêmes tendance à diminuer leurs efforts pour ne pas avoir à payer trop cher … (ça paraît un peu absurde quand même, à moins que les prix soient vraiment très élevé)- L’argument de l’égalité de traitement (si un fonctionnaire est rémunéré au résultat, il aura tendance à adapter son effort en fonction de l’usager) est également discutable. Dans le modèle, l’inégalité de traitement est prise en compte par l’effort consenti par l’agent. Est-ce-vraiment une mauvaise chose qu’un professeur (ou l’école publique en général) fasse un peu plus d’efforts pour aider des élèves en difficulté plutôt que pour ceux qui n’ont pas de problème pour suivre en clase ? Cela ne me semble pas évident.

  8. Je ne vois pas bien la spécificité des fonctionnaires là-dedans.Dans le public comme dans le privé, un indicateur débile induira des comportements débiles, et ce n’est pas parce que les indicateurs mis en exergue dans l’article ne sont pas pertinents que la notion d’efficacité du service public serait vide de sens.

  9. La spécificité des fonctionnaires est que leur situation est légale et règlementaire, alors que celle des agents du privé est contractuelle. En d’autres termes, l’Etat, ou son représentant (le supérieur hiérarchique) peut décider de quelles seront les tâches à accomplir par un fonctionnaire donné, et celui-ci n’a rien à dire, ou presque. Inversement, le contrat de travail de droit privé doit stipuler la ou les tâches pour lesquelles le salarié reçoit une rémunération, et il est fondé à demander un complément pour tout tâche qui ne serait pas prévue dans son contrat.


  10. "Peut-on se fier aux indicateurs ?

    Piloter par les indicateurs. Les objectifs de santé, l’insécurité, la nouvelle organisation des lois de finances… De plus en plus, les objectifs politiques sont exprimés par des indicateurs chiffrés. Que représentent ceux-ci ? Qui les choisit ? Les responsables délaissent-ils ce que les indicateurs ne couvrent pas ? Adaptent-ils les comptes qu’ils rendent ? Retenir un indicateur redéfinit-il ce que la statistique observe ? Invité Jean-René Brunetière, président de Pénombre"

    Les indicateurs étaient le sujet du dernier café de la statistique :http://guerby.org/blog/index.php/2006/11/11/126-cafe-de-la-statistique-2

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