Pour la sixième année consécutive, je viens de participer au SEMIME à l’Université technologique de Lisbonne (UTL). Ce séminaire scientifique annuel porte sur le thème de l’exclusion numérique. Il est organisé dans le contexte du programme Erasmus Mundus. L’appel à communication est délibérément très ouvert tant en ce qui concerne les questions abordées que les disciplines éligibles. La nature des interventions est elle aussi très variable, de la communication du chercheur au témoignage du praticien en passant par la présentation de l’industriel, l’exposé de l’étudiant de master ou celui du doctorant. Le séminaire est quadrilingue (portugais, espagnol, anglais et français) et le panel d’intervenants très international (20 pays cette année).
Finalement ces six années et ces quelques centaines de communications offrent un regard intéressant sur l’évolution du regard porté sur la question de la fracture numérique.
Ce qui frappe en premier lieu, c’est la persistance de cette problématique. Elle préexistait largement à la première édition du SEMIME en 2006 et reste malheureusement d’une grande actualité. Et tout porte à croire que le SEMIME a un bel avenir.
Dans un deuxième temps, la juxtaposition des interventions fait apparaître des différences de point de vue qui relèvent largement autant de déterminants intimes des énonciateurs que de leur statut ou de leur positionnement épistémologique. Ainsi la fracture numérique procède-t-elle selon les cas de variables culturelles, géopolitiques, sociales ou individuelles.
A l’orée des années 2000, nous étions quelques-uns à montrer que la fracture s’expliquait de moins en moins par l’accès aux équipements et aux services que par la capacité à planifier et à mener à bien des usages finalisés des technologies numériques. Il faut bien reconnaître aujourd’hui que la question est plus complexe. Si les équipements se démocratisent, les laissés pour compte n’en sont que plus exclus. Quant aux usages, ils sont de divers ordres. Il y a ceux déterminés par la pression sociale et professionnelle et ceux que l’individu décide lui-même en fonction de l’utilité qu’il en perçoit. Dans tous les cas, il lui faudra non seulement disposer des équipements mais aussi des compétences requises pour les mettre en œuvre.
Et là, toutes les communications du SEMIME ou presque convergent. Elles pointent la responsabilité des systèmes éducatifs dans l’acculturation numérique des jeunes. Du moins celle que l’Ecole devrait assumer et qu’elle rechigne pourtant à endosser.