L’Insee et Orange viennent de finaliser un travail très intéressant sur l’impact du confinement sur la mobilité de la population, qui permet d’actualiser ce que je disais dans un billet précédent. Vous trouverez les principaux résultats de leur travail ici et le détail de la méthode et des résultats là. Voici ce que j’en ai retenu.
Sur la méthode, d’abord : grâce à des données de téléphonie mobile, les auteurs ont calculé le nombre de nuitées passées dans les départements français 3 jours avant le confinement et 3 jours après le début confinement. Sur la base de l’adresse de résidence principale des personnes, de la localisation des personnes avant le confinement, et de leur localisation après le confinement, on peut calculer différentes écarts entre la situation après et la situation avant le confinement.
On peut commencer par calculer l’écart total de nuitées après/avant : 31 des 96 départements présentent un écart total négatif, c’est-à-dire que moins de gens y ont dormi après le confinement qu’avant. On y trouve deux types de départements : i) les départements hébergeant les stations de ski, qui ont fermé après le confinement (Savoie, Haute-Savoie, Hautes-Alpes, Hautes-Pyrénées, …), ii) les départements des grandes villes françaises (départements d’Ile-de-France, Rhône, Haute-Garonne, Gironde, Hérault, …).
Attention cependant à ne pas aller trop vite en besogne dans l’interprétation pour la catégorie des grandes villes, car plusieurs processus sont à l’œuvre. Les données collectées permettent notamment de distinguer dans les nuitées celles passées par les personnes ayant leur résidence principale dans le département, celles de ceux dont la résidence principale est localisé dans d’autres départements, et celle enfin de résidents étrangers.
Il s’avère alors que dans l’ensemble des 96 départements de France métropolitaine, seuls 2 voient baisser le nombre de nuitées passées dans le département par des résidents du même département entre avant et après le début du confinement : Paris d’une part (baisse de 209 000 nuitées) et les Hauts-de-Seine d’autre part (baisse de 20 000 nuitées). Dans tous les autres départements, l’évolution est positive, signe que de très nombreuses personnes qui résidaient avant le confinement dans d’autres départements (pour des raisons que j’évoquerai après) ont réintégré leurs pénates. C’est notamment vrai dans les grandes villes que j’évoquais plus haut, mais comme ils ont vu partir de chez eux encore plus de personnes dont la résidence principale est dans d’autres départements, l’écart total des nuitées est négatif. A noter également pour tous les départements concernés la baisse des nuitées des résidents étrangers.
Pourquoi dans les grandes villes accueillait-on de nombreuses personnes dont la résidence principale était située dans d’autres départements ? Parmi eux, on peut penser qu’il y a des touristes qui séjournaient dans les grandes villes, des personnes en emploi qui y résidaient pour leur travail, ou encore des étudiants dont la résidence principale déclarée à leur opérateur téléphonique est celle de leurs parents. J’en oublie peut-être, n’hésitez pas à compléter.
Quant à l’effet résidence secondaire, il joue à l’évidence, et de manière très forte, pour Paris (11% des parisiens résidaient hors de leur département après le début du confinement) et, dans une moindre mesure, pour les Hauts-de-Seine. Sans doute trouve-t-on aussi des parisiens sans résidence secondaire qui sont allé rejoindre le domicile de leurs parents, d’autres membres de leur famille ou bien d’amis. Pour les autres grandes villes, ces processus peuvent jouer, mais ils ne dominent pas le retour des habitants de ces villes après le début du confinement.
Pour preuve de cet effet, les cartes ci-dessus proposées par les auteurs montrent que la présence des parisiens dans les départements de province suit plutôt bien l’emplacement de leurs résidences secondaires.
Je m’autorise un oubli qui explique une part importante des departs du 75 et du 92 : les résidents étrangers qui ont rejoint leurs familles à l’annonce du confinement. Londres grouille de Français expatriés ; l’inverse est également vrai !
Merci Olivier pour ces travaux qui relativisent la culpabilisation excessive du comportement des Français !
Bravo Monsieur, c’est toujours un plaisir de vous lire. Étant moi même parisien (pour mes études), il est vrai que les parisiens se sont instantanément précipités dans les gares.
Merci de votre éclairage sur cette culpabilité que les chaînes d’informations en continue assènent sur les Parisiens.
Ping : Covid 19, épisode 17 : nouvelles variations sur les taux de mortalité | Olivier Bouba-Olga
Bonjour Olivier,
Ces statistiques participent bien d’une économie résidentielle….
Ping : Covid 19, épisode 20 : la mortalité 2020 a dépassé celles de 2019 et de 2018 | Olivier Bouba-Olga
Ping : Covid 19, épisode 23 : nouvel évaluation de l’impact économique de l’épidémie | Olivier Bouba-Olga