Suite du premier billet, avec une petite note de recherche sur l’industrie sur Châtellerault. Il s’agit d’un petit travail statistique co-écrit avec Marie Ferru,
doctorante, qui fait une thèse sur les échelles spatiales de l’innovation, et a notamment comme terrain d’étude le bassin châtelleraudais. Nous avons rédigé cette note pour préparer une
conférence grand public à laquelle nous avons été invités la semaine dernière, et au cours de laquelle nous avons fait passer un petit questionnaire (à remplir avant le début de la conférence)
pour savoir comment les personnes présentes percevaient le poids et l’évolution de l’industrie locale. La note est donc décomposée en trois parties : i) résultats de cette mini-enquête, ii)
quelques stats sur l’évolution des effectifs et de l’industrie en France (données Insee), iii) d’autres stats sur l’évolution de l’industrie sur la zone d’emploi de Châtellerault (avec
comparaisons Région/France). Toute remarque, critique, complément est bienvenu.
doctorante, qui fait une thèse sur les échelles spatiales de l’innovation, et a notamment comme terrain d’étude le bassin châtelleraudais. Nous avons rédigé cette note pour préparer une
conférence grand public à laquelle nous avons été invités la semaine dernière, et au cours de laquelle nous avons fait passer un petit questionnaire (à remplir avant le début de la conférence)
pour savoir comment les personnes présentes percevaient le poids et l’évolution de l’industrie locale. La note est donc décomposée en trois parties : i) résultats de cette mini-enquête, ii)
quelques stats sur l’évolution des effectifs et de l’industrie en France (données Insee), iii) d’autres stats sur l’évolution de l’industrie sur la zone d’emploi de Châtellerault (avec
comparaisons Région/France). Toute remarque, critique, complément est bienvenu.
PS : Cette note complète en quelque sorte des infos parues ce jour dans La Nouvelle République du Centre Ouest : un article reprenant les conclusions de l’enquête de la Banque de France
sur l’économie de Poitou-Charentes, une interview d’Alain Barrot (secrétaire
général FO) qui considère que “on ne nous dit pas tout”, et une interview
de votre économiste de service, moins alarmiste.
Quelques petites remarques… (Après utilisation de statistiques de l’Observatoire des Territoires, avec ses belles cartes et ses zoulis chiffres.)*** Tout d’abord, il me semble que les individus, même si vous leur demandez l’évolution salariale ou du système productif local sur X années, répondent généralement selon ce qu’ils ont perçu dans le passé récent. Or, c’est bien là que se situe le problème, comme vous l’avez souligné : de 2000 à 2006, les citoyens locaux ont pu constater une baisse de 1,9% des emplois liés à l’industrie.Néanmoins, ce qu’il est intéressant de souligner, c’est que le taux de chômage entre mars 2004 et mars 2007 a tout de même baissé de 1,6%. Effet de restructuration ? Radiations massives ?Ce constat s’oppose alors à la baisse de l’emploi salarié de 2001 à 2005 dans cette zone d’emploi : -6,3%… ce qui nous amène à penser que l’industrie ne fait pas tout : si une telle baisse de l’emploi salarié s’effectue dans une zone, qu’elle soit industrielle ou non, cela fait peur aux populations locales.Sur cette période, non seulement la baisse de l’emploi salarié est assez importante, mais de plus elle se retrouve à être la seule de toute la région. Et la seule zone d’emploi limitrophe à connaître une baisse se trouve être Chinon. (-0,5%)D’ailleurs, cela pourrait être lié à des départs massifs de la zone d’emploi, ou une baisse très importante du nombre d’actifs, mais celui-ci a augmenté de 1990 à 1999. (0,3%) C’est peut-être pas ultra-rassurant pour les citoyens de cette zone d’emploi, qui ont dû voir leurs voisins, amis et parents sans travail : l’effet de proximité jouant, que ça soit dans l’industrie ou dans d’autres secteurs, on imagine généralement que l’ensemble d’un système connaît des évolutions proches de ce qui nous arrive. Et ce sentiment, ainsi que cette dynamique, peuvent éventuellement s’accroître au fil du temps : en 2004, 9,2% de l’emploi de Châtellerault se trouve dans des secteurs considérés comme “fragiles”. (Uniquement des industries, si j’ai bien compris la typologie INSEE.)Après, savoir que Châtellerault constitue dans le passé, ou à l’heure actuel, une zone d’emploi fortement orienté vers l’industrie (avec un emploi sur cinq dans l’industrie), cela montre que oui, ils n’ont pas connu une “désindustrialisation” massive en raison des délocalisations, de la concurrence internationale, des vils extra-terrestres alliés aux Chinois exportateurs de textiles.Mais il est normal pour les citoyens – et sûrement les élus locaux – et peut-être même justifié d’avoir peur lorsqu’ils constatent une baisse de l’emploi local, le fait qu’un ouvrier sur dix se trouve dans une industrie fragile ou fortement exposé à la concurrence internationale, et le constat d’un “déclin” relatif dans l’emploi industriel qui a commencé. (Je pense que lorsque celui-ci diminue ces dernières années, le fait que Châtellerault ait connu une croissance de celui-ci si l’on prend une échelle plus grande permettant de compenser les pertes récentes ne rassure pas grand’ monde…)*** Le fait que dans votre ouvrage, et à l’aide de vos recherches, vous constatiez que nous devons parler de “transformation de l’industrie” plutôt que de “déclin industriel”, etc. C’était vraiment très bien, très éclairant sur la situation nationale.Malheureusement, le cas général ne vaut pas pour le cas particulier, et réciproquement. Si l’on observe une dynamique à l’échelle du pays, cela ne signifie pas que toutes les zones industrielles du pays vont connaître la même dynamique, ou même que Châtellerault a les capacités de s’adapter à celle-ci.Le fait qu’entre 2000 et 2006 le nombre d’emplois industriels connaît une baisse de presque 2% par an, tandis qu’il est positif à l’échelle de la région (et malgré la baisse de Châtellerault : il serait intéressant de calculer cette hausse en excluant cette zone d’emploi), montre peut-être que Châtellerault n’arrive pas à s’adapter, ou qu’elle n’a pas les atouts locaux pour garder une partie de son industrie.Et ça, qu’on explique aux citoyens locaux qu’ils n’ont qu’à s’adapter ou même que le déclin industriel n’existe pas, j’imagine que cela ne doit pas nécessairement les rassurer plus que ça…Respectueusement,Arnaud Lavalade
PS : Oups, je me corrige, c’est un peu moins d’un salarié sur dix qui se trouve dans un secteur dit “fragile”. (Qui sont généralement des industries.)Pas un ouvrier sur dix.En rapportant ce nombre à celui d’ouvriers qualifiés dans la zone d’emploi (20,7%) en 1999, cela amène, grosso-modo, à un ouvrier sur deux qui travaille dans un secteur fragile, ou je me trompe ?…Respectueusement,Arnaud Lavalade
@ AJC : * d’apèrs les stats unedic, on a -1,1% pour le tcam des effectifs sur 2000-2006. Sachant qu’on a un point bizarre sur les stats unedic, avec un pic en 2000. Dès lors, les stats qui prennent 2000 comme point de départ montre une baisse assez forte. Où avez-vous trouvé les -6,3% sur 2001-2005? * comme expliqué dans le doc, ne regarder que l’évolution de l’industrie est trompeur, compte tenu de l’externalisation et du recours à l’intérim. En prenant en compte l’intérim, notamment, on voit que la baisse de l’industrie est modérée. Bien sûr, ce n’est pas sans poser pb, mais ce n’est plus le même pb.* sur la coexistence d’un chômage faible et d”une baisse de l’emplois salarié : ca peut s’expliquer par le fait que des gens sur châtellerault travaillent de plus en plus sur d’autres zones d’emplois. Pas nécessairement pbmatique. Ca justifie que l’on raisonne à une échelle géo plus large* si vous pouvez me donner le lien vers les stats “territoires fragiles”, ca m’intéresse, je vais regarder comment ils ont construit leur typologie.
Concernant votre première et votre quatrième réponse, j’ai signalé au début de mon commentaire que tout cela venait de l’Observatoire des Territoires.http://www.territoires.gouv.fr/indicateurs/portail_fr/index_fr.phpTrès pratique et bourré d’indicateurs qui proviennent eux-même d’autres institutions. Et tout comme GapMinder, c’est joli.A noter que pour les secteurs “fragiles”, ils ont placé cela dans la catégorie “emploi – qualification – revenu” et les sources proviennent de l’INSEE et de la DARES principalement.Concernant l’évolution de l’emploi salarié, cela se trouve dans la même catégorie. (A noter que selon mes souvenirs, il ne s’agit pas d’un taux annuel. ‘fin c’est ce qu’il me semble, hein.)Néanmoins, je me demande si l’évolution de l’emploi salarié se réfère au nombre d’individus ayant un emploi dans cette zone, ou au nombre d’emplois actuellement pourvus dans cette zone. Selon vos explications, il s’agit de la seconde définition. J’avais compris cela comme soumis à la première définition…Et donc oui, vu comme cela, c’est relativement intéressant pour le territoire (Voir Davezies…), mais cela dénote néanmoins que la zone d’emploi se transforme : d’une base plus exportatrice, on pourrait passer à une base relativement plus résidentielle, non ?Jusqu’à présent j’ai surtout utilisé l’Observatoire des Territoires pour trouver par la suite des sources. “Où trouver les indicateurs”, en gros. Sur les secteurs fragiles, leur typologie m’a l’air assez imparfaite (excluant les innovations et la montée de gamme potentielle), mais ça reste intéressant, ça donne une idée en gros :“Les six secteurs considérés comme « fragiles » sont ceux dont l’évolution nationale des effectifs salariés a été la plus faible sur une période de référence donnée. Les secteurs concernés sur la période 1999-2004 sont : C1 Habillement, cuir F2 Industrie textile G1 Production de combustibles et de carburants C2 Edition, imprimerie, reproduction C4 Industries des équipements du foyer E3 Industries des équipements électriques et électroniques” La prise en compte de l’interim est intéressante, effectivement : on en revient à la flexibilité au niveau des travailleurs peu qualifiés. Mais la localisation des industries, de l’emploi, ou je ne sais quoi dans cette zone vise avant tout au bien-être de la population, non, si l’on s’intéresse avant tout à l’état de l’industrie locale ?Effectivement, ce n’est pas le même problème. Mais celui qui émerge est bien plus grave, non ? (Pour tous ceux qui, peu qualifiés ou arrivant sur le marché du travail en l’étant peu, sont désormais soumis à cette forme de flexibilité et de précarité…)Respectueusement,Arnaud Lavalade