Ce document présente Julien Villedieu, qui a animé la Conférence N°3 lors de la journée d’étude du 9 octobre 2014 « Enfants connectés, éduquer à l’ère numérique. Ecrans, école, famille : quels nouveaux enjeux de socialisation de l’enfant ? ». Il présente Julien Villedieu, impliqué dans le développement du Jeu Vidéo, ses positions, son parcours et les actions qu’il organise au sein du Syndicat National du Jeu vidéo.
Julien Villedieu :
Diplômé en droit des affaires à l’université Lyon III en 1997, il se spécialise dans le droit des réseaux informatiques puis il intégrera quelques années plus tard un premier cabinet d’avocats. Il fonde en 2001 sa première société de « Conseils et solutions juridiques pour les activités TIC ». Parallèlement il édite droit-jeux.com, un site juridique dédié aux paris et autres loteries en ligne.
En 2003 il crée la Société BECLYDE qui devient alors le 1er réseau national de livraison rapide de plis et colis à vélo et triporteur en zones urbaines.
De 2003 à 2008 il occupe le poste de Directeur Management au sein de l’association Lyon Game. C’est une association des industries du numérique & du jeu vidéo en Rhône-Alpes qui compte à son actif 250 adhérents.
Depuis 2008, Julien Villedieu est délégué général du Syndicat National du jeu Vidéo. Ce syndicat professionnel a pour objectif de promouvoir et de défendre les intérêts des acteurs de la production française de jeux vidéo et de programmes multimédia vis-à-vis des pouvoirs publics au plan national et européen. Le SNJV communique sur ses enjeux au travers des médias afin que les métiers du jeu vidéo et ses valeurs soient mieux compris du grand public.
LE SYNDICAT NATIONAL DU JEU VIDEO :
Le SNJV a été créé en 2008. Ce syndicat professionnel a été créé dans la continuité de l’Association des Producteurs d’œuvres Multimédia.
Il rassemble :
- Les entreprises de production de jeux vidéo et de programmes multimédia ludiques
- Les créateurs indépendants, les éditeurs, les distributeurs, les organismes de formation publics ou privés ainsi que les laboratoires de recherche, publics et privés, réalisant des recherches en matière de jeux vidéo.
- Les associations professionnelles régionales œuvrant au développement de la filière jeu vidéo
Le SNJV intervient dans tous les domaines permettant de préserver ou développer la compétitivité des entreprises du jeu vidéo implantées en France, à travers de nombreuses initiatives et contributions :
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- Mise en place de politiques publiques, afin de garantir la compétitivité internationale des entreprises de création de jeux vidéo
- Mise en place de dispositifs réglementaires et législatifs adaptés au développement de la filière
- Formation professionnelle
- Promotion de l’industrie française du jeu vidéo en France et à l’international.»
Questions préparées:
- Dans une interview du magazine « décision achats » vous définissez le Serious Game comme un jeu vidéo ludique et pédagogique, pensez-vous qu’ils pourraient être intégrés et adaptés dans le système éducatif français ?
- Selon vous, le jeu vidéo créée-t-il un fossé intergénérationnel ?
- Pensez-vous que nous, génération Y et futurs parents, sommes assez informés et encore assez “geek” pour devenir parents gamers et cassé l’aspect générationnel?
- Jugez-vous la communication destinée aux parents concernant les jeux vidéo et leurs risques en France suffisante ?
- Le monde du jeu vidéo est constamment persécuté, chaque échec fait l’objet d’un véritable débat et c’est très souvent l’occasion de mettre en avant tous les risques sur la santé des « gamers », ne pensez-vous-pas que cela entache l’image innovatrice du jeu français ? Quelles sont vos solutions pour y pallier ?! Cette situation n’est-elle pas la conséquence d’une mauvaise transmission d’informations auprès des parents ?
- L’éducation auprès des parents concernant la classification PEGI ne permettrait-elle pas de casser les aprioris ?
La conférence :
Le SNJV est une Organisation professionnelle qui réunit environ 200 maisons de production de jeux vidéo qui sont des contenus que l’on retrouve dans vos smartphones à l’ordinateur et sûrement bientôt dans les objets connectés. Le SNJV a pour but de développer les compétences des éditeurs de jeux. Pour le SNJV il est important d’intervenir à cette conférence car il s’agit d’un enjeu d’aujourd’hui mais surtout de demain.
Qui joue aux jeux vidéo dans cette salle ? Qui joue à Candy Crush ? Dans les années 90 le joueur était vu comme un adolescent, à lunettes de sexe masculin, aujourd’hui c’est un peu tout le monde. On n’est plus dans un rapport au jeu comme avant, c’est une véritable culture : en 1999 on avait 20% de la population qui jouait, en 2013 c’était 50%. Le JV a pris des formes, accès et plateformes différentes. L’âge moyen est passé de 19 ans à 35/40 ans.
La féminisation du jeu est due entre autres à la plus forte rapidité de la diffusion de l’information, il est désormais accessible partout et pour tout le monde, la répartition est plutôt équitable, on a autant de femmes que d’hommes qui jouent. Le jeu est le premier bien culturel en France et devance la musique, le sport… (Qui restent plus recommandé que le JV)
Joueurs occasionnels s’orientent plus vers des jeux d’aventure, de réflexion, de sport les autres joueurs s’orientent plus vers de l’action, les jeux de rôle…
On parle souvent des jeux violents… Seulement 18% des jeux vidéo sont réservés aux adultes. Il faut savoir gérer les pictogrammes qu’il faut encore savoir comprendre.
Le jeu vidéo a 40 ans. Le numérique a profondément changé le JV ; on est passé à un jeu devant sa télé à un jeu nomade. 50% de l’utilisation du smartphone est consacrée au jeu. Avant les jeux étaient des produits finis. Aujourd’hui c’est un service qui évolue en fonction des avancées multiplateformes. On commence sur sa tablette, puis smartphone et ordinateur. On a un véritable bouleversement des métiers. C’est une activité quotidienne.
Le Jeu Vidéo c’est le premier bien culturel en termes de chiffres d’affaires. C’est la version moderne du jeu de plateau. Le jeu est un partage, il se régénère et évolue. Cela peut être dangereux, on peut s’y perdre. C’est désormais un média dans lequel le consommateur est actif un « consommacteur » qui interagit dans un univers extrêmement interactif entre le jeu et le joueur. C’est ce qui fait la richesse de ce média. C’est aussi un sport. On aura peut-être même une épreuve de jeu aux JO. C’est une industrie de passionnés responsables car la plupart du temps lorsqu’on crée un contenu on est précautionneux. On essaie de ne pas placer d’incitations aux achats dans le contenu. Il informe de lui-même le consommateur sur ce à quoi il doit s’attendre (c’est d’ailleurs le premier média à faire cela de lui-même).
Ce n’est pas facile d’être parent et c’est pour cela qu’il est nécessaire de prêter attention aux contenus des activités de ses enfants. C’est à eux de s’intéresser à ces jeux pour ne pas les laisser se cloisonner dans leur chambre devenue « no man’s land » On est effarés de la façon dont les jeux vidéo sont perçus. C’est surement dû au fait que ces jeux empruntent le temps disponible du cerveau aux dépens de la télévision. C’est un bien générationnel. Il sera surement démocratisé comme le cinéma… D’ailleurs rappelons qu’au départ le Rock, la BD, le Jazz ont été stigmatisés. Le jeu peut être un moyen pour éduquer les enfants au travers du serious game.
Qu’est-ce que la classification PEGI ?
La norme PEGI (Pan-European Game Information, système européen d’information sur les jeux) permet aux parents vivant dans plus de 30 pays européens d’acheter des jeux vidéo en toute confiance grâce à un système de classification par âge (3, 7, 12, 16 et 18 ans) et par code comme :
- La présence de violence
- La présence de sexe
- La présence de drogue
- La présence d’un langage grossier
- La présence d’une certaine discrimination
- Le contenu d’éléments pouvant effrayer le joueur
- L’incitation aux jeux de hasard
- La possibilité de jouer en ligne
Pegi est un système qui existe dans 31 pays avec des décrypteurs de contenus. Mais il y a la vigilance des parents qui ne remplace pas ces indicateurs. GTA est souvent cité pour décrire le jeu comme violent. Il existe une norme depuis Avril 2014 qui oblige les éditeurs à poser les indicateurs. La limite de 12 ans pour un film (Full Metal Jacket) représente une limite à 18 ans pour un Jeu Vidéo (GTA). Le contrôle parental reste néanmoins minime. Une autre initiative a été mise en place : « www.pedagojeux.fr », c’est un site français qui édite des conseils et des astuces tout public. Il y a également des initiatives en cours sur des chartes de bonnes pratiques qui visent à informer les professionnels afin qu’ils renseignent les joueurs sur les conditions de jeux. On a un syndicat de producteurs de jeux vidéo qui ont pris en compte l’anxiété publique.
- “ Bonjour, concernant la formation qu’il y a sur les jeux vidéo à Angoulême, il y a un cd qui a été mise en place et j’étais étonnée de voir qu’il n’y a pas de professionnel en psychologie pour se pencher sur le sujet.
- On a des praticiens en contact avec ce domaine sur un tas de sujets, mais il y a beaucoup de pour mais aussi de contre. Autour de cela on a des recherches en psychologie, et des professionnels qui étudient le sujet. Le Cepe va signer une convention avec le SNJV et le CEPE travaille sur le la thématique de la socialisation du consommateur au travers du jeu vidéo. On ne peut pas intervenir dans ce domaine si on n’a pas de connaissance. Jusqu’où peut-on mélanger contenu culturel et contenu éducatif. En fonction du produit, de l’enfant de la famille. Les enseignants chercheurs cette rencontre entre l’univers marchand et l’enfance est très ancienne. L’idéologie y est pour beaucoup.”
Notre enrichissement personnel
L’intervention de M Villedieu s’inscrit parfaitement dans la lignée des missions réalisées par le CEPE. Monsieur Julien Villedieu a souligné l’importance des enjeux sociétaux liés aux jeux vidéos afin d’informer les parents quant au rôle culturel de cette pratique. La protection de l’enfant et son développement sont donc plus que jamais d’actualité.
Le jeu vidéo n’est plus fixe comme autrefois où l’on jouait uniquement sur console de salon ou cloîtré dans sa chambre. Aujourd’hui, on peut jouer via son smartphone ou sa tablette quel que soit l’endroit où l’on se trouve : dans la rue, dans les transports en commun, entre deux pauses etc… Les jeux vidéo font partie intégrante de notre quotidien même si nous n’en avons pas conscience. Jouer à Candy crush ou à Farmville sont devenus des actes banals ancrés dans le quotidien et ces jeux sont disponibles aisément via les réseaux sociaux. La vitesse de diffusion des jeux vidéo grâce à leur dématérialisation est une mutation extraordinaire. Le jeu vidéo est devenu un média ancré dans le numérique et il subit des transformations quotidiennes : on est passé d’une pratique plutôt solitaire à une pratique interactive, sociale et sociabilisante. Ils sont disponibles sur console de salon, PC, tablette et smartphone. En somme, le jeu de plateau traditionnel s’est virtualisé, mais permet toujours de rapprocher enfants et parents et de créer des liens autour de l’engouement de l’enfant quant au jeu. Seule différence, ici l’enfant peut inculquer son savoir sur le jeu vidéo au parent. Partager sa passion avec sa famille peut aider l’enfant dans son développement personnel. A la différence des autres médias, l’enfant est actif grâce au jeu vidéo : il joue, partage, s’instruit et se sociabilise.
Les jeux éducatifs disponibles de façon dématérialisée permettent à l’enfant d’apprendre tout en s’amusant sans réaliser qu’il est en train d’apprendre grâce à un jeu vidéo, à l’image de l’adolescent qui n’a pas l’impression en jouant à Candy crush sur les réseaux sociaux d’être sur un jeu vidéo. 50% du temps passé sur le smartphone est utilisé pour jouer.
Comme nous l’explique le représentant du SNJV, cette activité est ainsi devenue une culture à part entière. En effet, les petits français y consacrent environ 12h par semaine, contre 6h pour la musique et 5h pour la peinture où l’activité de partage est moins évidente. L’enfant passe ainsi de consommateur à consomm’acteur.
En conclusion, cette conférence a été formatrice dans la mesure où notre vision du jeu vidéo est souvent réduite à celle d’il y a 20 ans. Mieux connaître cette pratique et ses enjeux sociétaux nous aide à avoir un regard neuf sur le marketing et l’attitude à adopter afin de devenir de futurs responsables soucieux du devenir des générations à venir. Sans oublier que l’école était il y a encore quelques années la proie de ces même marketeurs qui imposaient leurs marques sur les outils scolaires. En tant que futurs professionnels du marketing nous sommes amenés à nous questionner sur la responsabilité des éditeurs. Il est également important de se questionner quant aux frontières entre incitation à l’achat et éthique, compte tenu du fait qu’il est désormais plus rapide de télécharger et jouer plutôt que de se rendre en magasin, acheter et installer le jeu.
Compte-rendu rédigé par Elodie GAUTREAU, Cindy LEFEVRE et Florence MERCADA, étudiantes en M1 Marketing Plurimédia et Consommation.