Optimisation de la mobilité pour l’’architecture régénérative

 

Réseaux Mobiles par Satellite : Défis et Solutions Innovantes

Avec l’arrivée des futurs réseaux 5G/6G satellitaires, nos communications ne se limiteront plus aux antennes terrestres. Mais connecter un smartphone via un satellite en orbite basse n’est pas si simple. Les satellites se déplacent à environ 27 000 km/h, ce qui bouleverse totalement l’architecture classique des réseaux mobiles.

Dans cet article, nous allons expliquer trois défis majeurs rencontrés par les réseaux mobiles par satellite, et les recommandations proposées par la 3GPP (TR 23.700-29).


1. Identifier les Zones de Couverture (TAI/CGI Report)

Sur Terre : le cas d’un gNB fixe

Dans un réseau mobile terrestre, lorsqu’un gNB (antenne 5G) s’allume, il se connecte au coeur de réseau et démarre la procédure de demande d’établissement.

  1. Le gNB s’allume et initie la procédure NG Setup.
  2. Il envoie un message NG SETUP REQUEST à l’AMF (Access and Mobility Management Function).
  3. Ce message contient :
    • L’identifiant global du gNB (Global gNB ID)
    • Les informations sur les cellules qu’il dessert (list of served cells)
    • Pour chaque cellule : la ou les TAI (Tracking Area Identity) associées
    • D’autres paramètres de configuration (comme les PLMN pris en charge)
  4. L’AMF répond par un NG SETUP RESPONSE (ou un FAILURE si quelque chose ne va pas).

Pour être plus précis :

1. Identification de chaque cellule :

  • NR Cell Identity (NCI) – identifiant unique de la cellule
  • Physical Cell ID (PCI) – identifiant physique pour la couche radio
  • TAC (Tracking Area Code) – zone de localisation

2. Caractéristiques radio :

  • Fréquences supportées (bandes de fréquences)
  • Largeur de bande (bandwidth)
  • Mode duplex (FDD/TDD)
  • Configuration des antennes

3. Capacités de la cellule :

  • Types de services supportés (eMBB, URLLC, mMTC)
  • Nombre maximum d’UE supportés
  • Débit maximum

Exemple pratique : Un gNB peut desservir :

  • Cellule 1 : Fréquence 3.5 GHz, TAC 100, PCI 1
  • Cellule 2 : Fréquence 28 GHz, TAC 100, PCI 2
  • Cellule 3 : Fréquence 700 MHz, TAC 101, PCI 3

Pourquoi c’est important :

  • L’AMF doit connaître toutes les cellules pour router correctement les UE
  • Permet la planification de la mobilité entre cellules
  • Nécessaire pour la gestion des handovers
  • Aide à l’optimisation du réseau

Dans l’espace : une couverture mouvante

Un satellite, contrairement à une antenne terrestre, change de zone toutes les quelques minutes :

  • À 10h00 : Paris, Lyon, Marseille
  • À 10h15 : Madrid, Barcelone
  • À 10h30 : Lisbonne, Porto

Dans ce cas, si on applique le même mécanisme que pour un gNB fixe, le satellite devrait :

  • Répéter une procédure de type « NG Setup Update » à chaque changement de zone
  • Envoyer en permanence une nouvelle liste de TAI correspondant aux régions qu’il survole

Avec des centaines de satellites, cela créerait un déluge de signalisation impossible à gérer pour le cœur de réseau.


La solution : le concept de Fixed Earth TAI

Pour contourner ce problème, on dissocie les TAI des satellites eux-mêmes et on les rattache directement à des zones fixes au sol.

  • Ancien fonctionnement (fixe ou mobile sans optimisation) :
    • Cellule = « Satellite-A-Cell-1 »
    • Les TAI changent au fur et à mesure que le satellite se déplace → signalisation énorme
  • Nouveau fonctionnement (Fixed Earth TAI) :
    • Cellule = « Zone-Europe-Paris-Nord »
    • Cette zone garde toujours le même TAI, quel que soit le satellite qui la couvre

La clé : la table de correspondance TAI ↔ zones au sol

Pour que cela fonctionne :

  • L’opérateur définit une table de correspondance entre les TAI et les zones géographiques fixes (Paris-Nord, Lyon-Centre, Madrid, etc.)
  • Le satellite, connaissant sa position et sa zone de couverture, sélectionne automatiquement le bon TAI dans cette table lorsqu’il survole une région

Ainsi, côté cœur de réseau, la vision reste stable et cohérente : il voit toujours les mêmes TAI fixes, même si en réalité ce sont des satellites qui se succèdent pour assurer la couverture.

Avantages :

  • Signalisation fortement réduite
  • Simplification pour l’AMF/MME qui n’a plus à gérer des mises à jour permanentes
  • Meilleure évolutivité pour supporter des constellations massives

2. Garder les Connexions Actives (TNL Connection Suspending)

Le problème

Lorsqu’un satellite sort de la zone de couverture, la connexion avec le réseau se coupe. Le protocole utilisé (SCTP) ferme automatiquement la session après 30 à 60 secondes sans signal.

Conséquences :

  • Connexion interrompue brutalement
  • Lors du retour du satellite, tout doit être réinitialisé (procédure lourde)
  • Avec une constellation entière, cela provoque une surcharge du réseau

La solution : suspendre plutôt que couper

Avant de sortir de couverture, le satellite envoie au CN : « Je pars, mais je reviendrai ».

  • La connexion est mise en pause plutôt que fermée
  • Le réseau sauvegarde le contexte : sécurité, sessions utilisateurs, paramètres actifs
  • Les minuteries sont allongées (par exemple, 10 minutes au lieu de 60 secondes)
  • Quand le satellite revient, la connexion reprend immédiatement

Résultat : continuité de service, moins de signalisation, meilleure fluidité pour l’utilisateur.


3. Retrouver un Utilisateur (Paging)

Le problème

Jean utilise son téléphone via un satellite au-dessus de Lyon. Puis il devient inactif. Deux heures plus tard, quelqu’un l’appelle. Mais le satellite initial est déjà au-dessus de l’Espagne !

Où chercher Jean ?

Le fonctionnement terrestre

Dans un réseau classique, le CN envoie un message de paging (appel général) à toutes les antennes d’une zone. Mais avec les satellites, les zones changent sans cesse → cela reviendrait à solliciter toute la constellation.

La solution : un paging intelligent

  1. On connaît la dernière position de Jean (ex. Zone Lyon Centre à 12h00).
  2. On connaît les trajectoires satellites : à 14h00, la zone « Lyon Centre » est couverte par Satellite-C et Satellite-D.
  3. On envoie le paging uniquement à ces deux satellites, pas à toute la flotte.

Et si Jean s’est déplacé ? Le réseau calcule une zone de probabilité selon :

  • Sa vitesse possible (train, voiture, avion)
  • Son historique de mobilité
  • Les zones adjacentes couvertes

Résultat : recherche ciblée, moins de messages, et appel plus rapide.


Bénéfices Globaux

Ces solutions apportent :

  • Réduction massive de la signalisation (jusqu’à 90 % en moins)
  • Moins de congestion dans le réseau
  • Temps de réponse améliorés pour les utilisateurs
  • Scalabilité : gestion possible de milliers de satellites

En clair, elles posent les bases d’un futur où nos téléphones pourront communiquer directement avec des satellites, sans rupture de service.

 

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