Qu’est-ce qu’une marque d’imprimeur-libraire ? (1)

Lucerna inquisitorum hæreticae pravitatis / Bernardo da Como. - Venise : Marco Antonio Zaltieri, 1596 (Poitiers, Bibliothèques universitaires, Fonds ancien, XVI 795)

Lucerna inquisitorum hæreticae pravitatis / Bernardo da Como. – Venise : Marco Antonio Zaltieri, 1596 (Poitiers, Bibliothèques universitaires, Fonds ancien, XVI 795)

La prochaine Heure du Livre ancien, programmée au Fonds ancien les lundi 10 avril à 18h et vendredi 14 avril à 12h, sera consacrée aux marques d’imprimeurs-libraires. De quoi s’agit-il ?

Du colophon à la page de titre

Les marques de libraires et d’imprimeurs apparurent peu après l’invention de l’imprimerie. Placées sous le titre ou à la fin du livre, elles pouvaient être un simple signe analogue à celui que les imprimeurs mettaient sur les ballots de livre qu’ils expédiaient ou évoquer l’enseigne de l’imprimeur. Les premiers éléments de l’adresse, comme les lieu et date de l’impression, le nom de l’imprimeur-libraire, commencèrent à apparaître sous cette marque, sur la page de titre, à l’extrême fin du XVe siècle, alors qu’ils étaient jusque là placés à la fin de l’ouvrage, au colophon, selon l’usage en cours dans les manuscrits. Les marques permettaient de bien identifier l’imprimeur-libraire et les imprimés qu’il réalisaient. C’était également un moyen de lutter contre la contrefaçon. Elles se transmettaient souvent pour tout ou partie aux héritiers.

Les marques à la Renaissance portaient souvent des personnages religieux, le Christ, la Vierge ou les saints. Les animaux, comme les végétaux, étaient également très utilisés : ils pouvaient accompagner le motif principal ou apparaître en figure centrale, symbolique.

Les marques connurent leur apogée à la fin du XVIe siècle. Puis elles furent de plus en plus souvent remplacées par un fleuron ou les initiales de l’imprimeur-libraire.

Stimulus Pastorum / Bartolomeu dos Mártires. - Rome : Héritiers de Giulio Accolti, 1572 (Poitiers, Bibliothèques universitaires, Fonds ancien, XVI 831)

Stimulus Pastorum / Bartolomeu dos Mártires. – Rome : Héritiers de Giulio Accolti, 1572 (Poitiers, Bibliothèques universitaires, Fonds ancien, XVI 831)

L’utilisation de la gravure sur bois

Les marques étaient le plus souvent gravées sur bois, ce qui permettait d’insérer le bois encré dans la composition typographique correspondant à la page de titre. Le bois de fil, taillé dans le sens des fibres, ne permettait pas toujours un dessin d’une grande finesse et s’abîmait vite, ce qui explique la mauvaise qualité de certaines marques.

La gravure sur cuivre, qui permettait de produire des illustrations d’une grande finesse, était encore peu utilisée au XVIe siècle. Elle était par ailleurs moins pratique : nécessitant une pression très forte, elle ne passait pas sous la même presse que les caractères typographiques. La page de titre ornée d’une marque gravée sur cuivre devait donc passer sous deux presses différentes.

Satyræ / Juvénal et Perse. - Lyon : Jean Frellon, 1556 (Poitiers, Bibliothèques universitaires, Fonds ancien, XVI 108)

Satyræ / Juvénal et Perse. – Lyon : Jean Frellon, 1556 (Poitiers, Bibliothèques universitaires, Fonds ancien, XVI 108)

L’influence de l’art du temps

En dépit de ces difficultés, les imprimeurs-libraires voulaient avoir de belles marques, qui traduisaient les goûts de leur époque. Ils abandonnèrent peu à peu le style encore très influencé par l’art médiéval, avec des figures affrontées, qui avait pourtant peu à peu gagné en vie et en mouvement, pour le remplacer par des motifs d’une grande finesse.

Le cadre était lui aussi un reflet des goûts de l’époque ; il se laissa envahir par les motifs antiquisants et les grotesques que l’on avait redécouverts en Italie. Celui-ci n’était pas la propriété d’un imprimeur-libraire qui pouvait l’emprunter ou le donner, comme il le faisait pour les ornements typographiques, bandeaux, lettres ornées ou culs-de-lampe.

Certains imprimeurs et libraires faisaient appels à de grands artistes de leur temps pour le dessin de leur marque. Certaines marques étaient signées : pouvaient apparaître les noms du dessinateur ou du graveur.

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