La direction du temps, rythme et continuité

La notion de rythme est conditionnée par la notion de temps. Si un temps n’est pas installé, impossible de percevoir une variation dans le temps. Le temps s’installe par la prise en compte d’une pulsation. Le battement du cœur peut être considéré comme la pulsation première. C’est l’exploitation de l’intervalle temporel que crée la pulsation qui permet la perception du rythme. On se pose la question de savoir comment l’on module cette perception et ce qui se passe si l’on casse cette régularité ?

Stabilité

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Le temps stable et clairement lisible et audible du deuxième mouvement de la 101è symphonie de Haydn, « l’horloge ». Le figuralisme du ‘tic-tac’ de l’horloge structure clairement le temps musical, rendant la partition plus claire à aborder.

Déstabilisation

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Le temps et sa mobilité par le point d’orgue. Le point d’orgue permet d’introduire une part d’aléatoire dans la musique dans la mesure où il donne une liberté temporelle au chef d’orchestre. Il est intéressant d’écouter ici la première minute de ces deux enregistrements de la cinquième symphonie de Beethoven par deux chefs totalement différents, appartenant à deux époques très différentes : Furtwängler en 1954 a un temps très étiré, long et insère un silence conséquent. Heinrich Schiff en 2010 a un temps quasi mesuré et direct. C’est la même musique. La rupture temporelle est vécue très différemment.

Rupture

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La déstabilisation du temps encore : le scandale du sacre du printemps. La danse de sacre, le décalage des accents, l’accès au temps tribal. On entre dans une utilisation qui se veut plus ‘primitive’ du temps : les croches scandées (3’17) donnent toute sa puissance à l’orchestration.

La notion même de temps remise en question

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Brouiller les pistes : trop de temps. Le poème symphonique de Ligeti écrit pour cent métronomes est construit sur l’idée que trop de temps tue le temps. Le métronome, objet symbole de la matérialisation sonore du temps qui passe est ici utilisé non comme un élément marqueur mais comme un phénomène sonore. Il est intéressant de constater que quand les cent métronomes jouent en même temps, l’oreille humaine ne peut percevoir aucun rythme. Le phénomène rythmique ne devient audible que quand il ne reste que quelques métronomes en lice, à partir d’une grosse vingtaine pourra-t-on juger.

Les minimalistes du 20è siècle

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Les glissements rythmiques : quand il n’est plus si simple d’attraper le temps. Dans les œuvre des minimalistes telles que le Triple quartet de Steve Reich, la superposition d’un nombre perceptible pour l’oreille humaine de rythmes créé un phénomène de décalage temporel. On se perd dans la hiérarchie des temps les uns par rapport aux autres.

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Piano Phase, de Steve Reich, première performance publique ici. Un pianiste joue seul sur deux pianos et se déphase par-rapport à lui-même en jouant simultanément les deux parties sur deux instruments différents.

Le temps est avant tout un phénomène lié à la perception humaine. Si l’on déstabilise, même de façon minime cette perception on peut faire chavirer la notion de temps en musique. C’est d’ailleurs ce que font les compositeurs actuels bien souvent.

Laure

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