« A la découverte de la réalité augmentée », conférence animée par Armelle Prigent le 21 mars dans le cadre du Festival « Voix Publiques » placé sous le thème « Virtuel, réel, jusqu’où ? » à Poitiers.
La réalité augmentée est une nouvelle technologie qui suscite de plus en plus d’intérêt auprès des scientifiques comme du grand public. Sa capacité d’enrichir le monde réel par l’ajout d’entités virtuelles lui offre un grand potentiel et ouvre ainsi les portes à de nouvelles applications. Depuis quelques années, de nombreux systèmes de réalité augmentée ont vu le jour et placent le spectateur au centre d’une réalité mixte.
L’apparition des smartphones et de la haute technologie embarquée a ouvert de nouveaux usages pour la réalité augmentée pour s’ouvrir au grand public.
Qu’est-ce que la réalité augmentée ?
La réalité augmentée (RA) vise à ajouter des éléments virtuels au monde qui nous entoure, en offrant à l’utilisateur la possibilité d’être immergé dans cet environnement mixte.
L’objectif d’un système de réalité augmentée est de permettre à l’utilisateur de se déplacer librement dans un environnement donné, de visualiser et d’interagir, en temps réel, avec des données géo-référencées via des terminaux mobiles communicants. Ceci nécessite la mise en œuvre de nouvelles techniques de localisation 3D, de visualisation et d’interaction.
La réalité augmentée doit respecter trois règles fondamentales : combiner le réel et le virtuel, de manière interactive (en temps réel) et en respectant l’homogénéité perspectiviste.
Les domaines d’application
Les environnements de réalité augmentée constituent aujourd’hui des catégories importantes de la création numérique, elle trouve de nombreux domaines d’application : le secteur médical, le commerce, l’industrie, le secteur culturel et touristique pour des usages variés :
- L’apprentissage, dans le domaine de la santé il sera utilisé comme outil d’aide au geste chirurgical. En effet, dans l’enseignement de la médecine, la possibilité de voir “à l’intérieur” du corps du patient ou plutôt d’un mannequin permet de mieux se rendre compte des conséquences des gestes opératoires.
- L’art numérique, et le développement de visites virtuelles, il devient possible de visualiser en 3D des sites archéologiques, de combiner réel et virtuel en intégrant des éléments
- En Post production. Le premier film à avoir intégré de la 3D dans un univers réel date du tout début des années 80, avec le film Tron de Steven Lisberger pour pouvoir réalisé un tel film, il faut pouvoir intégrer les contraintes liées à la post-production, par exemple, certains types de mouvements de caméra sont plus faciles à retrouver que d’autres, la RA va permettre se simuler et de mieux prendre en compte ses contraintes.
Des exemples de réalité augmentée
L’atlas en réalité augmentée
Faire apparaitre le monde en 3D à partir d’un atlas en version papier devient possible !
Avec un logiciel de reconnaissance, en présentant une page de l’atlas à la webcam le monde s’affiche en 3D, les montagnes prennent formes. La réalité augmentée se fait alors support d’apprentissage.
A titre d’exemple, la collection Dokéo des éditions Nathan propose pour les enfants des encyclopédies intégrant la réalité augmentée, pour un aperçu des possibilités, visitez le lien http://tinyurl.com/3r8hu76
Augmented man
Il s’agit d’une installation artistique qui repose sur la représentation de l’émotion dans un univers virtuel.
Le principe : une vidéo stéréoscopique est projetée sur un mur qui permet au visiteur d’entrer en contact avec un homme virtuel, semblant avoir des émotions et cherchant à communiquer avec lui. Le visiteur se voit comme dans un miroir 3D, mais avec une nouvelle personne marchant à ses côtés. L’homme ajouté réagit à la présence du visiteur en l’approchant ou en l’évitant, et se comporte comme n’importe quel être humain, tantôt hésitant, tantôt courageux.
iParking

Retrouver sa voiture grâce à la géolocalisation et la réalité augmentée.
Il s’agit d’une application iPhone qui permet de sauvegarder l’emplacement de sa voiture afin de la retrouver facilement, elle repose sur le stockage de données GPS. Elle intègre des modes innovants :
– Un mode boussole, qui fait pivoter la carte pour aider l’utilisateur à s’orienter ;
– le calcul de l’itinéraire pour rejoindre son véhicule ;
– une alarme, qui prévient l’utilisateur qu’il est temps de regagner sa voiture avant d’avoir une amende ;
– Et un mode réalité augmentée, qui permet d’utiliser l’application tout en marchant.
Arhrrr ! de Georgia Tech
Ce jeu repose sur le mélange d’une vidéo en temps réelle et des graphismes déjà programmés.
Il nécessite un Smartphone équipé d’une caméra de 5 méga pixels, d’une carte graphique assez puissante pour rendre efficace le rendu 3D, et d’un plateau de jeu qui servira de support. Le joueur filme un plateau de jeu où vont apparaître des personnages en 3D animés, des zombies. L’espace nait à travers le terminal et le film réalisé à partir d’une photographie du plateau de jeu.
L’objectif de ce jeu est de survoler une ville avec un hélicoptère et de tuer des zombis pour sauver la vie des civils.
ARHRRR ! est un jeu très original et très dynamique, il met en relief la puissance des technologies de la réalité augmentée.
Pour un aperçu en images, une vidéo, en anglais, est disponible : http://tinyurl.com/nrhflb
L’essayage virtuel avec Zugara – The social Shopper
La nouvelle cabine d’essayage ! Avec cette application, l’utilisateur se prend en photo avec un marqueur visuel, il peut ensuite essayer virtuellement les vêtements et accessoires proposés sur le site. D’autres applications similaires existent, la valeur ajoutée de celle-ci basée sur le site de Zugara et sa simplicité et la possibilité de partager et de demander des recommandations sur Facebook. Ce type d’application vise à développer les achats en ligne des boutiques de prêt à porter et à faciliter la prise de décision.
Branchez votre webcam et testez par vous-même ! http://tinyurl.com/42lxets
Si vous êtes davantage amateur de chocolat, essayez sur cette même page, le Factory game de Nestlé !
Les techniques
Ce qui nous apparaissait comme réservé à la science fiction entre désormais peu à peu dans notre quotidien.
La RA repose sur un système de capteurs, l’utilisation de logiciels de calcul de la distance entre l’image et la caméra (grâce à des points de référence qui sont invisibles à l’œil nu mais détectables par ces logiciels) pour un rendu des perspective. Une webcam ou un appareil photo sera nécessaire pour prendre le tag ou semacode en photo ( le tag 2D est une technique maitrisée depuis une dizaine d’années, aujourd’hui on utilise davantage le tag de forme, à partir d’une forme 2D on fait apparaitre une représentation en 3D.)
Pour visualiser des lunettes spéciales 3D ne sont pas une obligation. A ce sujet, des expérimentations en naotechnologies se penchent sur la possibilité d’utiliser des lentilles de contact avec la technologie embarqué.
La réalité augmentée n’échappe pas aux nouveaux supports tels que l’iPhone ou Android, de nombreuses applications ont vu le jour que ce soit pour améliorer notre vie de tous les jours ou pour le plaisir du jeu.
A partir d’un smartphone, il est désormais possible de photographier un semacode est d’accéder à un univers mixte. Equipé de caméra, de GPS, de boussole, de puce RFID (passive ou active) , de gyroscope, le smartphone est capable de géolocaliser l’utilisateur : il sait où il se trouve et dans quelle direction il pointe, il devient un outil capable de donner une information immédiate liée au contexte, et parfois liée également au réseau social ou à l’historique.
La naissance du jeu ubiquitaire et pervasif
le jeu ubiquitaire et pervasif s’appuie sur la mobilité du joueur, plus largement des joueurs tout comme des non-joueurs et interagit avec eux dans des lieux non contrôlés par eux, via différents types d’objets. Grâce à la RA les éléments qui nous entourent nous donnent de l’information. La conscience du lieu, de son environnement s’atténue et la frontière entre réel et numérique devient difficile à percevoir.
Exemple du jeu : in memoriam (Viennot), l’un des premiers jeu ARG (jeu à réalité augmentée, on parle aussi de fiction interactive). Il s’agit d’un jeu d’enquête où le joueur incarne un chasseur de tueurs en série, pour avancer dans l’enquête, le joueur récolte des informations de par son environnement et les autres joueurs, en échangeant des courriels et des appels téléphoniques avec les autres joueurs.
Le joueur raisonne sur de nouvelles dimensions : spatiales, temporelles et sociales.
Une bande annonce et des extraits du jeu sont disponibles sur le site officiel.
Apparaissent également des jeux reposant sur l’utilisation de capteurs du rythme cardiaque, ce que l’on nomme l’Affective computing.
Un exemple avec le jeu Make your heart beat twin. L’espace de jeu : une ville. Equipés d’une ceinture ECG qui enregistre le rythme cardiaque, les joueurs doivent retrouver le plus rapidement possible leur « jumeau », c’est-à-dire le joueur ayant le même rythme cardiaque que lui. Les joueurs sont géolocalisés, et représentés sur une carte, ils doivent veiller à garder le même rythme cardiaque durant le jeu.
Quelques autres exemples :
- jeu avec caméra et GPS : Cell spelling utilisé dans le cadre de la visite d’une ville ;
- jeu de GO ubiquitaire (Rempulski). But du jeu : retrouver les autres joueurs dans la ville à l’aide d’un smartphone.
- ou encore le projet Plug (Cap Digital). Ici, quatre équipes sont en concurrence, et jouent à l’intérieur d’un musée avec une mission : retrouver des objets dissimulés. Pour ajouter une dimension sociale, les joueurs doivent s’échanger les objets trouvés, par le biais du bluetooth, pour accéder à de nouvelles informations et avancer dans le jeu.
L’enjeu de la réalité augmentée
Peu de chiffres existent à cause de l’hétérogénéité des sources et de la problématique du périmètre. En effet, la réalité augmentée ne constitue pas un ensemble autonome parfaitement identifiable. Il n’y a donc pas d’évaluation précise et récente de ce secteur qui reste encore marginal en termes de volume et de valeur.
Les modèles d’affaires restent incertains. Pour les usages liés au smartphone, un des risques est de voir les opérateurs téléphoniques qui ont les informations précises de localisation les céder à des tiers, à l’insu de notre plein gré. Un modèle économique reste encore à définir.
Armelle Prigent est maître de conférences en informatique. Responsable de la spécialité programmation du master Jeu Video et Médias Interactifs Numérique de l’ENJMIN (Ecole nationale du Jeu vidéo et des médias Interactifs Numérique) et membre du laboratoire L3I (Laboratoire Informatique, Image et Interaction) de l’université de La Rochelle.