Ronald Coase s’est éteint à l’âge de 102 ans, preuve que l’économie conserve (je ne dis pas ça pour attirer des étudiants à la fac, mais quand même).
Beaucoup voient en lui un économiste libéral, défenseur acharné du marché, suite principalement à son article de 1960 (“le problème du coût social”) dans lequel il montre que, pour résoudre les problèmes environnementaux (problèmes d’externalités négatives disent les économistes), l’intervention de l’Etat n’est pas nécessaire, le marché peut faire aussi bien. Stigler en a tiré ce que l’on appelle désormais le “théorème de Coase” mais Coase n’était que moyennement d’accord avec ce théorème éponyme. En 1988, il écrivait ainsi (dans The Firm, the Market and the Law) : « Le Problème du Coût Social » (…) a été abondamment cité et discuté dans la littérature économique. Mais son influence sur l’analyse économique a été moins bénéfique que je ne l’espérais. La discussion a été dans une large mesure consacrée aux sections III et IV de cet article et s’est focalisée sur le ce qu’on appelle le « théorème de Coase », négligeant les autres aspects de l’analyse ».
En fait, Coase ne cherche pas à défendre mordicus le marché ou à le condamner. L’intérêt de son analyse est, au contraire, de sortir de ce type de débat, qui a longtemps structuré l’économie politique.
Dans son article de 1937 sur la nature de la firme, Coase montre que le recours au marché est coûteux, il fait supporter aux acteurs ce qu’on appellera après lui des coûts de transaction (coût de collecte de l’information, de passation des contrats, de surveillance). Si les coûts de transaction sont élevés, les acteurs ont intérêt à s’en remettre à un autre mode de coordination, par exemple la firme, mode de coordination centralisé régulé par l’autorité. Mais la firme aussi fait supporter aux acteurs des coûts, que l’on peut qualifier de coûts d’organisation interne. Dès lors, nous dit Coase, le choix marché/firme dépendra de la comparaison entre les coûts de transaction associés au marché et les coûts d’organisation interne associés à la firme.
Ce que nous dit Coase, donc, ce n’est pas que le marché est supérieur à la firme. Ni que la firme est supérieure au marché. Mais que l’analyse du choix marché/firme doit être contextualisée, qu’il convient de regarder précisément les caractéristiques des transactions, de comparer les coûts associés à chaque structure de gouvernance, et d’opter pour la structure de gouvernance permettant de minimiser l’ensemble des coûts.
Ces réflexions sur le cas du choix marché/firme sont généralisables à tout un ensemble de problème, notamment à la question de l’intervention de l’Etat en présence d’externalités négatives. Coase ne fait rien d’autre dans son article de 1960, quand il montre les limites de la stratégie pigouvienne d’internalisation des externalités (taxation des pollueurs, autrement dit recours à l’Etat). Contrairement à ce que laisse entendre le “théorème de Coase”, Coase ne défend pas le marché contre l’Etat dans cet article, il explique qu’en l’absence de coûts de transaction, la solution marchande est également mobilisable.
Mais Coase sait bien qu’il existe des coûts de transaction (voir son article de 1937) : son intention, encore une fois, est de montrer que pour traiter d’un problème environnemental, il faut recenser les différentes structures de gouvernance mobilisables (Etat, marché, structures hybrides, …), comparer leurs coûts respectifs, et opter pour la structure minimisant les coûts de gouvernance (ou ne rien faire si les coûts de gouvernance sont supérieurs aux coûts de la nuisance).
Personnellement, je trouve les analyses de Coase particulièrement intéressantes pour traiter de tout un ensemble de sujet très concrets (parfois futiles). Je m’en étais servi récemment au sujet des auto-entrepreneurs et il y a plus longtemps pour parler des tickets de métro.
Après Hirschman il y a moins d’un an, c’est un autre sacré bonhomme qui nous quitte.
Merci pour ce billet; je l’ai mis aussi sur mon blog
http://pierreratcliffe.blogspot.com
La découverte de Ronald Coase gâce à vous, me fait penser à l’histoire du crayon:
http://bit.ly/13cgKXa
et j’en profite pour vous signaler le blog de Frances Coppola dont le dernier billet est celui-ci:
http://bit.ly/17skIZb
Cordialement.
merci pour ce billet à l’occasion de cette triste nouvelle.
Notez qu’un article publié en décembre 2012 par Coase dans HBR critiquait le manque d’intérêt s économistes pour le monde réel des affaires: voir un résumé ici
http://hbr.org/2012/12/saving-economics-from-the-economists
On en apprend tous les jours. Je suis dirigeant d’entreprise en Tunisie avec un cursus éco et je n’ai jamais entendu parler de Coase.
Ping : Eloge de la différence | Olivier Bouba-Olga
Ping : Ronald Coase, les guêpes et le conteneur | Classe éco | Francetv info
merci bien pour l’article tres interssante
http://beaute-esthetique.blogspot.com/
merci bien pour l’article tres interssante
article très intéressent
Les dentistes Tunisien aussi sont spécialisés dans le dentisterie esthétique développées pour corriger les problèmes de coloration, de fissures, de fissures, de trous, de dents manquantes et de dents qui semblent tordues ou entassées.
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Je ne suis pas d’accord : défendre le marché ou le condamner ? la question ne se pose même plus. Le libéralisme est une véritable saignée pour les populations mondiales.