La réussite des bacs S et ES en Sciences Economiques

Vous n’êtes pas sans le savoir, Xavier Darcos a dénoncé le manque de débouché de la filière ES, en déplorant notamment que “la plupart des bacheliers ES s’engagent dans les facultés de droit ou de sciences humaines, où
« nous avons les plus grandes difficultés à les intégrer ».”

J’avais montré ici et que les affirmations de notre Ministre sur l’orientation et sur la réussite des bacs ES dans l’enseignement supérieur
étaient erronées.  Je complète avec un petit travail statistique sur les performances des étudiants inscrits  à l’UFR de Sciences Economiques de Poitiers, en distinguant selon la
filière du bac. Xavier Darcos n’a pas cité explicitement la filière Sciences Economiques, mais c’est un bon moyen de juger de l’aptitude des bacs ES à réussir dans leurs études post-bac. C’est
aussi un moyen de tester l’hypothèse souvent entendue (dans la bouche de lycéens, de profs (y compris d’éco) des lycées, de parents d’élèves, …)  selon laquelle  les bacs ES ne
peuvent pas réussir en éco pasque ya trop de maths.

Conclusion de mon (premier) petit exercice de statistique : si les bacheliers S obtiennent de meilleurs résultats que les bacheliers
ES en 1ère année de Licence, les écarts s’annulent en 2ème année, et s’inversent en 3ème année. Moralité : bacs S et bacs ES ont toute leur place en Sciences
Economiques.

Pour des précisions, vous pouvez télécharger la
note
.

J’encourage vivement les collègues d’autres UFR de Sciences Economiques à faire le même travail statistique, histoire de voir si les résultats obtenus à Poitiers sont généralisables. Si besoin,
je veux bien faire les calculs, il suffit de me transmettre les données.

18 commentaires sur “La réussite des bacs S et ES en Sciences Economiques

  1. Je cherche probablement la petite bête, mais il me semble tout de même préoccupant de voir que les ES faisaient 38% de l’ensemble la première année contre 35% pour les S alors que la deuxième année on a encore 38% de ES mais 43% de S… Ou plutôt 87 ES sont partis contre seulement 30 S. De là à penser que les ES  qui avaient des problèmes en maths sont partis à la fin de la L1 tandis que quasiment tous les élèves de S sont restés il n’y a qu’un pas. Ceci dit cette critique ne joue plus vraiment pour le passage de la L2 à la L3, ce qui montre peut-être que, passée la première année où on s’est fait aux maths ou non, les ES montrent tout leur talent. Si les gens d’Ecopublix étaient là ils commenceraient à appliquer des modèles de durée en s’inspirant des travaux sur la sortie du chômage, que d’amusement en perspective !

  2. Il me semble que ce genre de résultats – les S meilleurs en 1ère année, rattrapage des ES en 2ème année, et inversion de la tendance en 3ème année – se retrouve à un niveau plus général, c’est du moins ce que j’avais lu dans un vieux numéro d’Idees. J’essaierai de retrouver la référence exacte. En tout cas, merci de continuer à défendre les SES !  

  3. Olivier, ton travail va dans le bon sens ! Deux choses : 1-tout d’abord tu aurais pu t’éviter bien des calculs en contactant l’Observatoire de la Vie Etudiante de ton université qui normalement doit tenir à jour ce genre de calculs.2-ensuite, je vais militer pour ma paroisse, ou plutot pour celle de mon amie qui est en train de réaliser une thèse sur le sujet… elle n’a pas encore soutenu mais je ne manquerai pas de te faire part de ses conclusions une fois qu’elle aura soutenu et que ses résultats ne seront plus confidentiels… cela s’appelle en comm’ du ‘teasing’….

  4. “les écarts s’inversent en 3ème année”.
    C’est pas pour faire mon matheux ;-), mais sur un echantillon de ~90 personnes (etudiants ES ou S en L3), l’incertitude statistique est au minimum de 10% donc attention aux conclusions…
    Vivement les chiffres de tes collegues.

    De toute facon, doit-on juger une filiere sur ses debouches ? Doit-on supprimer l’ecole des Telecom parce que les X-telecom sont moins bons que les X-Mines ?

    Si les eleves d’ES se debrouillent globalement moins bien que ceux de S, est-ce la faute de l’enseignement (crypto marxiste) ou il y a-t-il une selection differente des eleves ? Dans la deuxieme hypothese (ah boooon ?) supprimer la section ne rendrait pas forcement ses eleves meilleurs ni plus “faciles a integrer”…

  5. Je ne pense pas tirer les mêmes conclusions que vous sur vos chiffres. En effet, l’écart des notes entre les filières ES et S n’est certes pas significatif (et ceci quelle que soit l’année).

    Cependant, comme le fait remarquer un autre commentaire, un indicateur plus pertinent (mais qui souffre encore de plusieurs biais) serait sans doute le taux de réussite en L3 d’un élève entré en première année. Pour ce faire, il faudrait disposer des chiffres sur 3 ans. Dans une première approximation, si on considère que les chiffres que vous donnez sont assez identiques d’une année sur l’autre, on ne peut que constater que 48% des élèves de la filière ES entrés en L1 se retrouvent en L3, alors que 65% des élèves en S y parviennent, ce qui est un écart significatif. Les notes entre filières se resserrent tout simplement à cause d’un effet de sueil, qui a éliminé les “mauvais” élèves de S et ES pendant les premières années.

    Comme le fait remarquer un autre commentaire, je pense qu’il est de toute façon assez vain de vouloir prouver que les ES réussissent aussi bien que les S, parce que ce n’est probablement pas le cas et que de toute façon la question n’est pas là. Il y a en effet un biais de sélection qui fait que “en moyenne” les meilleurs élèves choisissent la filière S et non la filière ES. Il y a sans doute plusieurs facteurs qui expliquent ceci, et en tout état de cause la qualité de l’enseignement dispensé n’est probablement pas le seul.

  6. @ Salviati: dans votre calcul, vous n’avez pas l’effet de la troisième année (l’obtention du L3 alors que vous calculez à partir de l’accès en L3) or il semble que c’est en troisième année que les résultats des ES sont meilleur, c’est ce qui explique en partie que vos résultats soient si défavorables aux ES.@OBO: je ne comprends pas trop comment est calculée la colonne totale du dernier tableau… j’aurais eu tendance à utiliser ce tableau pour calculer la proportion d’entrant en 1ère année qui obtiennnent un diplôme. Ca donne 31%  des ES et 36% des S… un écart réel, mais qui montre bien que, comme les all blacks, les étudiants de S sont des êtres humains…effectivement les lycéens de S sont meilleurs mais l’écart entre eux et les autres est souvent surévalué… la critique (des effets de sélection) participe du coup, du système qu’elle dénonce…

  7. Après des discussions préliminaires avec mon amie, il semble que le phénomène ne soit pas exactement le même su Bordeaux IV… mais là je dévoile déjà trop de choses ….la suite dans quelques mois…

  8. Effectivement, je n’avais pas vu que le deuxième tableau permettait d’obtenir un taux de réussite jusqu’à la fin de L3.

    En tout état de cause, je voulais surtout insister sur le fait que les notes obtenues en dernière année est un indicateur complètement biaisé à cause du fait que les moins bons sont éliminés pendant les premières années.

    Il faut aussi bien noter que les chiffres de 31% et 36% sont aussi très discutables pour plusieurs raisons. En particulier, on peut imaginer que les meilleurs élèves de S ne choisissent pas d’aller faire des études d’économie à la fac et donc que l’indicateur est biaisé en faveur des ES (ou alors on peut imaginer le contraire et alors l’indicateur est biaisé en faveur des S).

  9. Il faut également ajouter que la filière S en lycée est déjà sélective. Ainsi, les étudiants d’éco qui ont eu un parcours scientifique au lycée sont ‘structurellement’ sléectionnés : ce sont les meilleurs du lycée. Il semble donc normal que les deux premières années de la fac, ils réussissent mieux que les étudiants de la filière ES.Ensuite, il y a un phénomène logique de rattrapage (un peu comme la théorie économique : les pays les plus pauvres ont tendance à rattraper les plus riches) et d’ahrmonisation. Pour la L3, je pense que la réussite est supérieure pour les ‘ES’ car là aussi, les deux premieres années ont sélectionnés les meilleurs. On peut aussi gager que leur culture économique (l’enseignement en lycée) leur permet d’aborder la licence avec plus d’armes en main que les bacheliers scientifiques. La sélection par les maths étant surtout le fait du DEUG, les ‘ES’ qui surmontent cette sélection n’en sont que meilleurs (c’est très darwinien comme théorie, j’en conviens)

  10. Comme les autres, le problème de l’indicateur utilisé m’a sauté aux yeux : j’aurais &ssez naturellement utilisé comme mesure la probabilité pour un élève entrant en première année de finir avec son L3, pour mesurer le taux de perte (élèves qui quittent l’université sans diplôme), qui constitue le problème central du premier cycle. J’ajouterais à cela qu’il existe un biais de sélection : l’économie n’est pas un débouché « naturel » des bacheliers scientifiques. Dans les groupes de TD que j’ai encadrés (échantillon faible et ô combien biaisé), il s’agissait précisément des élèves de S rebutés par les disciplines scientifiques, à commencer par les mathématiques. Si ce biais est avéré (ie que les élèves de S venant en économie sont plutôt mons à l’aise en mathématiques que les autres élèves de S), l’existence d’un écart significatif de résultats serait vraiment inquiétant pour la filière ES. Je n’ai aucun a priori sur ce que pourrait donner une vraie étude économétrique là-dessus (n’oublions pas que contrôler par la profession des parents pourrait aussi expliquer pas mal de choses). est-ce que les Panels de l’Éducation Nationale ne seraient pas l’outil adapté pour gérer le biais de sélection au niveau lycée ?Dernier point, il y a une hypothèse supplémentaire à vérifier pour vraiment faire un sort à la déclaration du ministre : les destinées (professionnelles ou en termes de poursuite d’études) des étudiants une fois qu’ils sortent de L3.

  11. Olivier : merci pour ce petit travail d’économétrie qu’il serait bon de communiquer à Darcos (une fois un échantillon plus vaste testé !), néanmoins, j’ai quand même une petite remarque :Les élèves issus de SES ne devraient-ils pas réussir nettement mieux que les élèves de S dans ces filières en raison de la spécialité qu’ils suivent depuis deux ans ? Et imaginons que les résultats en licence de sciences eco soient exactement les mêmes pour ces deux populations : est-ce logique ? Je serai passablement inquiet d’apprendre que des élèves issus de SES aient les mêmes résultats que des élèves issus de S en licence de physique ! Pourquoi devrait-on trouver l’inverse logique ?

  12. Même critique que certains qui sont déjà passés par ici : les ES, s’ils se retrouvent avec un taux comparable ou supérieur de réussite en L3, ont connu une sorte de sélection les années précédentes. Même constat pour les STT d’ailleurs. :o)Par contre, on pourrait se demander le lien entre ces taux de réussite et les enseignements notés.En L3, me semble t’il, les notations étaient bien plus axés, pour ceux le désirant (Economie de l’entreprise…), sur des oraux et dossiers. En L1, l’absence d’une telle spécialisation force tous les étudiants à être confronté à un système de notation peu hétérogène… avec les inconvénients liés : afin de pouvoir étudier cetaines matières moins “abstraites mathématiquement”, il faut passer par la compréhension de certains modèles très abstraits et fortement formalisés d’un point de vue mathématique.Dès la L2, avec un parcours “sociologie” et une mini-spécialisation, et la L3, avec une spécialisation en économie de l’entreprise, il y a possibilité pour ceux galérant avec les mathématiques pures (Matière présente en L1-L2.) de se “rattraper”, et éventuellement d’étudier des domaines leur plaisant bien plus.On peut aussi comparer ce qui est demandé, entre la L1, L2, et la L3. Selon mes souvenirs, on voyait très peu où certaines matières de L1 nous emmenaient. Entre les bases de la microéconomie et celles développées plus tard, on voyait un fossé là où il n’y en avait pas. (Je prends mon exemple : j’ai pas mes notes sous les yeux, mais si je me rappelle bien, je galérais totalement sur la microéconomie très basique, alors que la micro un peu plus poussée me plaisait beaucoup. Idem pour les stats/probas et son évolution en matière “économétrie”.)Des mathématiques pures ou même la microéconomie “de base” pouvaient perdre ceux n’étant pas habitués à bosser pour des notes ou pour des modèles totalement abstraits. D’ailleurs, c’est l’un des grands avantages de la filière S d’un point de vue purement scolaire : que l’on comprenne ou pas le but de tel ou tel enseignement, il faut avancer. Pour en avoir bouffé pendant deux ans, de la S, et avoir bien vu le comportement de nombreux élèves à l’échelle de mon lycée, les meilleurs étaient ceux qui se posaient le moins de question et pouvaient aisément intégrer puis recracher des formules. Tandis qu’à partir de la L2 se trouvent plusieurs enseignements théoriques dont les débouchés ou les continuités sont clairement visibles. Ce qui doit en dérouter certains, mais plaire à d’autres : c’est déjà plus équilibré.Sans vouloir trop aller dans la généralisation sociologique de comptoir, je pense qu’il faudrait analyser le parcours “en notes” des étudiants provenant de chaque filière, et pour chaque matière.Exemple typique : l’oral de S5 (L3, premier semestre.) en économie industrielle et spatiale s’est -apparemment, selon votre billet à ce sujet- passé avec une hétérogéinité des méthodes de travail, réponses et résultats. A voir s’il existe une corrélation entre la filière d’origine et -par exemple- les notes à cet oral. Je ne suis pas sûr que ça soit les S qui se soient le plus démarqués à ce niveau-là. Ou, pour éviter d’aller trop dans la division entre S, ES, L, STT (Pour des raisons simples : il peut y avoir par exemple des “erreurs de parcours”.), déjà s’intéresser à l’évolution des notes de chaque élève en comparaison d’une classification des matières étudiées sur chaque année.Respectueusement,AJC

  13. M. Bouba-Olga :…et pas que les notes par matière, mais pour aller plus loin, la composition des compétences demandées par Master. :o)Une classification des matières serait pratique, non ? Ou au moins des comparaisons entre notes obtenues dans différentes matières et l’orientation/les notes obtenues par la suite.Cela pourrait expliquer les variations de réussite, et surtout donner un modèle applicable aux autres facultés : j’avais des contacts qui me parlaient de l’importance relative des mathématiques ou de la formalisation à outrance dans d’autres facultés. (Ce qui, j’ai l’impression, n’est pas le leitmotiv de Poitiers.)Rien qu’une telle hétérogéinité au sein des programmes serait ainsi “gommable”.Respectueusement,AJC

  14. vous parlez de la reussite des bac ES dans l’enseignement superieur.Ca n’a aucun interet et ca ne repond d’ailleur pas a la question.Il devrait vous sembler evident que la “reussite” et “l’integration” d’un etudiant dont parle Darcos n’ont rien avoir avec le fait qu’il quite l’universite sous les chaudes acclamations de ses professeurs. Il faut etre prof pour ne pas le comprendre.La reussite, c’est trouver un bon metier, ou le  diplome qu’on vient d’obtenir se revele utile.On peut reussir excellement son diplome de sciences sociales(et rentrer dans vos statistique de reussite), et finir caissier a Franprix, faute de debouches. Reussite, vraiment???Vous aimez les statistiques, vous devez doute savoir que le principale danger est de mal definir ce qu’on veut quantifier.Pour le faire, demandez a vos etudiants ce que c’est pour eux de connaitre la reussite. Et voyez combien evoquerons avant toute chose la reussite scolaire.

  15. @ charles e : j’adore votre ton péremptoire et définitif… * la réussite des étudiants dans l’enseignement supérieur a un intérêt. Ne serait-ce que pour ces étudiants qui y passent pas mal de leur temps. Et Darcos parle bien dans différentes interview de l’intégration des étudiants dans l’enseignement supérieur* il convient également de s’interroger sur les débouchés des étudiants après leurs études. Les enquêtes que nous menons auprès de nos étudiants montrent que les débouchés sont bons, et qu’il ne s’agit pas de caissiers à Franprix. Regardez l’étude récente de l’APEC sur le sujet, vous pourrez juger.

  16. Charles a en partie raison… mais je ne sais pas quel age il a mais je pense qu’il y a une différence entre un ‘jeune’ et un ‘vieux’ : demandons à un jeune de 15 ans ce qu’il entend par réussir ? Puis a un june de 25 ans, un homme de 40 ans puis un homme en fin de vie …Forcément la réponse ne serapas la même  : il s’agit d’un point de vue subjectif donc on ne peut affirmer comme le fait Charles ” demandez a vos etudiants ce que c’est pour eux de connaitre la reussite. Et voyez combien evoquerons avant toute chose la reussite scolaire.” la réussite dépend de l’age et du cycle de vie …

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