Les Français (et les européens) sont-ils nuls en science?

On pourrait le croire après avoir vu la vidéo "qu’est-ce qui gravite autour de la terre". Mais on peut se rassurer un petit peu avec cette étude de l’Union Européenne, dont j’ai extrait le tableau suivant :

Sur le premier item "le soleil tourne autour de la terre", 29% de mauvaises réponses. Certes, 29%, ce n’est pas rien, mais on est quand même assez loin des 56% du jeu de la vidéo. Soit le public TF1 a de moins bonnes connaissances que la moyenne européenne, soit les français dans leur ensemble sont plus mauvais que la moyenne européenne, soit le terme "gravite" employé dans le jeu en a piégé plus d’un.

Sur la deuxième hypothèse (les français plus mauvais que les autres européens), c’est plutôt faux, les français ont une moyenne bonne réponse supérieure à la moyenne (69% contre 66%) :


S’agissant de l’hypothèse de mauvaise compréhension du terme "gravite", difficile d’avoir une preuve, bien que… Dans la même étude, on interroge les citoyens : "pour chacun des sujets suivants, dites-nous à quel point, selon vous, il est scientifique (sur une échelle de 1 à 5)." Pour la moitié de l’échantillon, on inclut comme item "astrologie". Pour l’autre moitié de l’échantillon, on remplace "astrologie" par "horoscope". Résultat des courses : 41% considère que l’astrologie est un sujet très scientifique (score 4 ou 5) … mais seulement 13% si le terme est "horoscope"! Bref, il y a un vrai problème de compréhension du vocabulaire utilisé dans les questions.

Pour finir, je vous signale que l’économie est considérée comme étant un sujet moins scientifique que l’astrologie (40% contre 41%)…

17 commentaires sur “Les Français (et les européens) sont-ils nuls en science?

  1. Quelques petites remarques… "Soit le public TF1 a de moins bonnes connaissances que la moyenne européenne, soit les français dans leur ensemble sont plus mauvais que la moyenne européenne, soit le terme "gravite" employé dans le jeu en a piégé plus d’un." Soit un biais était existant à la base en raison du fait que ces citoyens se trouvaient dans un jeu télévisé, et que beaucoup pouvaient considérer cette question comme stupide. C’est visible dans vos commentaires où certains sont apparemment hilares devant une telle vidéo : un type qui demande à une centaine de personnes en même temps si la terre tourne autour du soleil passe pour un con. J’imagine que beaucoup, dans un élan de citoyenneté, avaient envie d’enfoncer le clou… C’est sûrement pour cela que pour certaines expériences en psycho (Genre Milgram.) on tente de cacher ce que les chercheurs tentent de découvrir aux sujets : un biais existe nécessairement lorsque celui-ci a conscience d’être étudié sur un point précis. Concernant l’étude, maintenant… Alors… heu… j’ai sûrement mal lu, hein. Ou alors j’ai pas compris. Mais c’est moi ou ces enquêtes ont été fait auprès de 500 ou 1000 personnes maximum dans chaque pays ? :oD On pourra dire "une enquête auprès de 12 000 ou 24 000 citoyens de l’UE" pour faire bien, mais je ne suis pas sûr de la pertinence d’une enquête auprès de 500 ou 1000 sondés… (Selon les questions.)Sans compter les biais possibles liés au foutage de gueule de beaucoup d’enquêtés par rapport à leurs enquêteurs. (On l’a pas tous fait au moins une fois, ça ?) Je comprends largement  le fait  que les types  à qui on a pu refiler cette étude à faire n’avaient pas nécessairement le temps ni les fonds pour mener quelque chose de plus pertinent, mais bon… :o( L’indicateur de l’OCDE sur les connaissances en mathématiques de la population agée de 15 ans est fondé sur quel échantillon…? On critique les sondages en raison du "les Français pensent que…". Ici on constate que les "Français ont tel niveau en…" mais les bases du raisonnement et la pertinence des informations me semblent être les mêmes, non ? Quant à l’astrologie et l’économie… bah… :oD Au final, l’économie reste une "science très inexacte, fondée sur des postulats idéologiquement orientés". (Mix de ce que l’on a pu me sortir récemment.) Et il est difficile pour beaucoup de citoyens de croire que les spécialistes d’une même science peuvent ne pas être d’accord sur un même sujet. Alors que c’est le cas dans toutes les sciences. Mais évidemment, entre l’économie et la physique quantique, les citoyens sont généralement plus exposés aux désaccords des économistes que des physiciens. Respectueusement, AJC

  2. En 1989, deux auteurs, Huet et Jouarry avaient commandé un sondage sur les connaissances scientifiques des français dont ils avaient donné les résultats dans un livre "sciences : les francais sont ils nuls?".
    Comme à l\\\’occasion d\\\’un article , j\\\’avais présenté les principaux résultats de ce sondage, je me permets de vous indiquer le lien qui renvoie à cet article (Le travail de Huet et Jouarry est présenté à la page 55 de l\\\’article)
    Thierry Rogel
    http://webcndp.cndp.fr/RevueDEES/pdf/122/02406211.pdf

  3. @ AJC: complètement d’accord avec ton point 1, d’autant plus que dans le jeu, il me semble que si une personne est éliminée, on tire quelqu’un dans le public pour le remplacer et donc éventuellement gagner des sous. La tentation est donc grande, surtout quand le type a du mal dès le début, de le virer. J’imagine que quand la cagnotte est élevée, les gens ont plus de réticence à donner de mauvaises réponses.sur le point 2, on peut faire des choses avec des échantillons de 500 personnes, tout dépend en fait du type de tests, mais pour de bêtes tris à plats sur des questions où le nombre de réponse est très limité (true/false) tels que ceux exposés ici, il n’y a pas de problèmes de représentativité.sur l’astrologie… arg… voyons le bon côté des choses: nous avons fait docteur en sociologie une astrologue, nous pouvons donc penser que la sociologie est plus scientifique que l’économie… lol

  4. J’ai eu un fou rire quand j’ai vu que l’astrologie était perçue comme "plus scientifique" que l’économie ! Les économistes ont encore du boulot !
    @ AJC : l’économie reste une "science très inexacte, fondée sur des postulats idéologiquement orientés"
    => C’est Walras qui serait content ! Il aurait aimé qu’on précise economie pure ou économie appliquée
    http://egocognito.over-blog.com/

  5. @ AJC et clic : c’est en fait un peu plus compliqué : j’ai intérêt à "trahir" le candidat dans l’espoir de prendre sa place, mais j’ai intérêt à "coopérer" si je veux qu’au moment où je prend sa place, il ne me trahisse pas. Sûrement matière à un peu de théorie des jeux, si qqun a le temps pour dire qu’elle est la bonne stratégie…

  6. Clic :500 personnes suffisamment représentatives pour 40 ou 50 millions d’individus ? Mouais… heu…M. Bouba-Olga :Le souci est qu’on ne sait absolument pas -lorsqu’on est un candidat- qui vote quoi. Et cela représente une voix sur 100 autres individus.Le comportement de ces derniers devrait être étudié afin de savoir s’ils ont une "propension à trahir" importante ou non… mais vu qu’en général, ils donnent de bonnes indications (Ou ce qu’ils croient être les bons conseils.), ne serait-il pas plus simple de se dire qu’ils avaient, ce jour-là, une forte "propension à se foutre de la gueule du candidat" ? :oDComme déjà souligné par d’autres dans les commentaires de l’article présentant ce morceau d’émission, le public -qu’il vote ou non- ne vient pas pour voir quelqu’un réussir, mais pour admirer le ridicule d’une personne. On a remplacé le bouffon royal du Moyen-Age par des citoyens lambdas triés sur le volet avant de participer à une émission de télévision… me semble que si l’on désirait s’attaquer au problème des "fausses réponses", faudrait plutôt prendre cet angle d’approche…Franchement, ça n’est arrivé ni à Clic ni à vous de plaisanter grâce à la crédulité de quelqu’un en lui faisant prendre des vessies pour des lanternes ? C’est cruel, okay. C’est bête et méchant. Mais sur le moment ça fait rire. :oDAJC

  7. AJC : la qualité d’une estimation à l’aide d’un échantillon (aléatoire) dépend directement de la taille de l’échantillon utilisé, mais pas de la taille de la population concernée, ça semble étrange mais c’est comme ça.Ainsi, interroger 1000 individus issus d’une population de 10.000 ou d’une population de 1000.000 donnera une estimation du paramètre inconnu ayant les mêmes propriétés statistiques (centré sur la paramètre inconnu, et dont la précision s’améliore en proportion de la racine de la taille de l’échantillon)

  8. @ OBO et AJC: ça n’est pas de la théorie des jeux, mais voila ce que je m’étais imaginé:- si un candidat est nul, il faut le virer, de toute façon autant se marrer un bon coup. de toute manière, il le mérite. Et moi, je ne serais pas aussi nul que lui: je ne mériterais pas d’être traité de la sorte, lui oui.- si un candidat est bon, autant l’aider. C’est grisant de voir un type devant moi gagner beaucoup, surtout qu’avec les bonnes réponses qu’il a donné avant, il le mérite. Si je peux l’aider autant le faire. Si je suis dans la même situation, j’aimerais qu’on m’aide. J’espère que je saurais mériter cette aide.Ce qu’on peut résumer par "on ne prête qu’aux riches", étant entendu que les individus qui participent pensent qu’ils ont une chance de le devenir et ne s’identifient pas au boulet qui est à moment là avec Jean-Pierre.AJC, Pour le fait de répondre n’importe quoi à une enquête… Tu veux faire s’effondrer ma discipline? heureusement, les sociologues ont fait des enquêtes qui démontrent que les gens répondent honnêtement aux enquêtes… sans commentaire(c’est une blague, à ma connaissance, nous n’avons jamais fait ça, mais certains en seraient surement capables…hum… en fait, ce genre d’enquête doit probablement exister…)

  9. Antoine T :Il me semble que cette méthode statistique vaut uniquement lorsque la population totale équivaut à l’infini, non ?Je ne remettais pas le fait que l’échantillon puisse paraître petit par rapport à une population totale équivalente à l’infini. (X dizaines de millions d’individus…)Mais… 500 ou 1000 sujets au sein d’un échantillon, ça reste pas quand même relativement petit ?Clic nous dit que dans certaines études sociologiques, on utilise des échantillons comparables. Cool. Mais en attendant, il ne nous a pas dit dans quels types d’études et par rapport à quelle population totale. (Puisqu’il me semble que lorsque celle-ci n’est pas infinie, ça change la donne… mais je me trompe peut-être ?)500 individus ou 1000 par rapport à une population totale équivalente à l’infini, il me semble que cela ne donne pas une super précision pour les statistiques finales…Clic :Ton explication me semble déjà plus claire.J’attends de voir si M. Bouba-Olga sort une application de la théorie des jeux en comparaison… mais en attendant, avec mon faible niveau -j’suis étudiant, lui, prof- dans ce domaine, je trouve cela un peu "tordu" comme démarche.Sinon, désolé de te l’apprendre Clic, et je me trompe peut-être… mais il me semble que ta discipline fournit déjà d’excellents ouvrages de méthodologie par rapport aux enquêtes et aux biais pouvant découler de certains choix de questions. :oDEt il me semble, oui, qu’il existe déjà des études sur certains biais particuliers. Genre foutage de gueule. Faut regarder du côté des sociologues super tordus, qui font des trucs du genre sociologie de la sociologie, histoire de la sociologie, etc me semble t’il. (Je  n’ai des souvenirs fragmentés de discussions avec une copine sur le sujet, désolé.)A ce sujet, il a fallu qu’un prix Nob’ d’économie se penche sur le sujet, aussi :http://polsoc.over-blog.com/article-3393043.htmlIl attirait l’attention sur ce qu’il appelle the focusing illusion. (J’arrive pas à traduire en Français. Je pige le concept, mais j’arrive pas à traduire. Je me sens d’un coup comme Jean Claude Van Damne. Chouette.)Qui est par contre un biais "inconscient" des enquêtés.AJC

  10. j’ai eu quelque cours de bio évolutive, j’ai quelques restes:pour la théorie des jeux cela la dépend de la population..la stratégie gagnant/gagnant (on coopère avec celui qui a coopéré au tour précédent) est la meilleur pour "épurer” la population en éliminant les non coopérants, mais ensuite les stratégies qui sanctionne les coopérations sans raisons sont plus efficace.Au final il n’y a pas d’ESS (stratégie évolutivement stable, c’est à dire qui se maintiendrai indéfiniment dans le temps),On ne peut résoudre la théorie des jeux, car aucune stratégie ne peut toutes les battre.En bio évolutive ont aboutis à la notion de trade off, c’est à dire que l’on doit faire un choix de stratégie de comportement à l’avance, sachant qu’on ne peut pas être bon partout.

  11. AJC : lorsque la taille de la population est "grande" par rapport à un échantillon raisonable, ça ne fait pas trop de différence (un échantillon de 1000 sur une population de 1 million ne sera pas beaucoup plus précis qu\\\’un échantillon de 1000 sur une population de 100 millions : gain de l\\\’ordre de 0.05 %), voir http://christophe.benavent.free.fr/cours/stat/echant.PDFSinon, pour un échantillonage "parfait" et une question de type oui/non, un échantillon de 1000 donne une précision à 95% de + ou – 3 points de pourcentage (+ ou – 4,5 pour un échantillon de 500)

  12. Antoine T :Pour la première partie de ta réponse : oui, oui, j’avais parfaitement compris cela. :o) Je demandais surtout confirmation, vu que j’ai un peu la mémoire trouée pour ce genre de choses.J’ai justement un big manuel de statistique, chez moi. J’ai dû le ré-ouvrir. :oDDeux problèmes se posent :1. concernant les 3 points de pourcentage pouvant varier par rapport à la population totale, cela peut totalement fausser les conclusions de ce type d’étude…2. ces types de lois sont soumises aux méthodes des quotas, non ? Si ces derniers sont également faussés ou peu respectés…?AJC

  13. AJC :  "concernant les 3 points de pourcentage pouvant varier par rapport à la population totale, cela peut totalement fausser les conclusions de ce type d’étude."Je ne comprends pas bien ta phrase, l’intervalle de confiance varie avec la taille de l’échantillon, mais, pour une taille d’échantillon fixe, pas par rapport à la taille de la population (sauf si elle est vraiment petite), les 3 pts de % seront les mêmes qq soit la taille de la population.De plus les estimateurs restent sans biais, donc les conclusions ne seront pas plus ou moins faussées puisque la précision reste la même.Pour ton point 2, bien entendu si l’échantillonage est fait n’importe comment, ça marche plus…Par contre je t’accorde qu’ils auraient pu (dû) donner également les écarts-type estimés, qu’on se fasse une idée…

  14. Attention quand même à ne pas interpréter abusivement un résultat qu’on qualifierait hâtivement de décevant, pour affirmer que les Français n’ont aucune légitimité pour intervenir dans le débat public, a fortiori le débat public sur les techno-sciences (clonage, OGM, nucléaire, nanotechnologies etc.) Les conceptions sous-jacentes, qualifiées de "modèle de l’instruction publique" par les sociologues des sciences, ont fait leur temps

  15. Antoine T :Arg, me suis mal exprimé.Fallait effectivement lire "échantillon"… :oD Merci de me rectifier.Quant aux écarts-types, ça aurait été sympa, ouais… enfin j’ai pas plus fouillé dans les tableaux statistiques de la fin. (Me suis juste attardé sur les échantillons par pays.)Je reste tout de même assez sceptique par rapport à la pertinence de cette étude. Je pense effectivement que les Français ne sont pas nuls en science en raison de leur système éducatif et de deux-trois trucs mais… néanmoins, ce n’est pas pour autant que ce genre d’enquête me paraîtront *si* sérieuses que cela. (Même si elles apportent certaines informations et qu’elles ont le mérite de prendre une telle démarche.)Clic, toi qui doit savoir, y’a bien des sociologues qui ont dû se pencher sur la question, non ?AJC

  16. AJC : ils en parlent vaguement en page 131, mais un peu par dessus la jambe (après avoir sans doute glosé sur des différences d’1/2 point, donc largement non significatives… )Quant à la valeur ajoutée de l’enquête, il me semble que la hierarchie qu’on y retrouve correspond assez à l’intuition qu’on pourrait en avoir (pays nordiques en tête, plus on va vers le sud et l’est plus ça descend, etc.). Rien de bien transcendant, mais intéressant.

  17. Un peu à la bourre, mais correction importante : vous comparez des choux avec des carottes. Le graphique concerne l’ensemble des questions, et non la question sur la gravitation.L’étude affirme que seules 58% des personnes interrogées ont répondu correctement à la question (contre 39% de réponses fausses, et 3% de « je ne sais pas », cf tableau QA10.1 dans les annexes du rapport que vous citez). Ce qui fait 42% des gens qui ne savent pas. On est donc beaucoup plus proche des 56% de la vidéo.

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