Dans quel contexte a été écrit l’Apparatus ad Biblia Sacra ?

Introduction à l’écriture Sainte / Bernard Lamy. – Lyon : Jean Certe, 1699 (Poitiers, Bibliothèque universitaire, Fonds ancien, M 7580)

Introduction à l’écriture Sainte / Bernard Lamy. – Lyon : Jean Certe, 1699 (Poitiers, Bibliothèque universitaire, Fonds ancien, M 7580)

Pendant tout le mois de janvier, la BU Michel Foucault expose l’Introduction à l’Écriture Sainte, de Bernard Lamy (1699).

En 1687, Bernard Lamy, prêtre, philosophe et mathématicien, publie pour la première fois son Apparatus ad Biblia Sacra. La Bibliothèque universelle et historique de l’année 1687 précise, au sujet de cet ouvrage, que « le P. Lamy se propose […] de donner une ouverture pour l’intelligence de l’Écriture sainte à ceux qui n’ont pas le temps de lire ou le moïen d’acheter les commentaires sur toute l’Écriture. Il leur donne ici la solution des principales difficultés qui les pourraient arrêter dans la lecture des livres sacrez. »

En 1696, l’Apparatus ad Biblia devient l’Apparatus biblicus, qui a fait l’objet de plus de soin et de travail que le premier. De nombreuses rééditions de ce texte latin sont proposées pendant tout le XVIIIe siècle. De plus, dès 1689, des traductions en français du premier, puis du second ouvrage sont publiées ; trois traductions anglaises paraissent également entre 1723 et 1728. Ces nombreuses rééditions et traductions témoignent du succès de cette publication. Le contexte dans lequel cet ouvrage a été publié et diffusé pourrait-il expliquer cet engouement ?

De nouvelles traductions de la Bible

L’École française de spiritualité, proche du jansénisme, accorde un rôle certain à la raison dans la foi et une place importante à la lecture des textes dans la spiritualité. Des traductions sont faites pour les laïcs. L’Oratoire, fondé par Pierre de Bérulle, en propose. En 1667, Louis Isaac Le Maistre de Sacy, avec d’autres jansénistes, publie un nouvelle version du Nouveau testament en langue vernaculaire, la « Bible de Port Royal » : elle est plus accessible que celles qui la précèdent en France et touche donc un public beaucoup plus large.

À la fin du XVIIe siècle, les laïcs français, du moins les lettrés aisés, ont une solide connaissance des Écritures saintes ; cette situation, très différente de celle des pays catholiques voisins, s’améliore encore dans la première moitié du siècle suivant. Mais si les bourgeois ont accès aux textes bibliques, le peuple en est éloigné et certains dévots sont hostiles à la lecture de la Bible par les fidèles ; certains clercs insistent en effet sur l’importance de la transmission orale de la foi par la communauté : pour eux, c’est avant tout dans la vie quotidienne que l’Évangile se vit.

Les débuts de la critique biblique en langue française

Richard Simon (1638-1712), oratorien, est l’un des premiers catholiques français à oser appliquer à la Bible les outils critiques que l’on emploie dans d’autres domaines. Il use d’une totale liberté d’examen dans ses recherches sur la Bible ; il cherche à connaître les faits objectivement par les méthodes historiques. Il se penche sur l’histoire des textes, des traductions et des commentaires et accorde plus d’importance aux textes originaux qu’aux versions autorisées. Il sépare inspiration et Révélation et distingue plusieurs degrés différents d’inspiration selon les textes. Dans son Histoire critique du Vieux testament (1678), publiée en français, il reprend les travaux de ses prédécesseurs et émet des doutes sur l’intégrité du texte de l’Ancien testament. Bossuet, qui considère qu’il ne peut y avoir de science qu’à l’intérieur de l’enseignement de l’Église, fait interdire la publication et Richard Simon est exclu de l’Oratoire.

Les interrogations sur le contenu de certains textes

La lecture du texte biblique est bien souvent encore très littérale : on pense par exemple que Jonas a effectivement séjourné dans le ventre de la baleine ; mais certains découvertes invitent à s’interroger. De nouveaux bréviaires et missels proposent une liturgie qui concilie critique historique et discipline du culte. De nombreuses publications, sous des formes diverses, avec ironie, éloquence et lyrisme, utilisent histoire, raison et sentiment pour défendre la foi catholique. Quand Dom Augustin Calmet propose en 1707 avec une grande prudence une synthèse apologétique des sciences bibliques contemporaines (Commentaires littéral sur tous les livres de l’Ancien et du Nouveau Testament), la mise par écrit des contradictions du texte biblique suscite bien des réactions.

Pour en savoir plus…

Bernard Lamy : 1640-1715 : étude biographique et bibliographique, textes inédits / Francois Girbal — Paris : P.U.F, 1964

Le Grand Siècle et la Bible / sous la dir. de Jean-Robert Armogathe — Paris : Beauchesne, 1989

Les Bibles en français : histoire illustrée du Moyen Âge à nos jours / sous la direction de Pierre-Maurice Bogaert — Turnhout : Brepols, 1991

Dieu en son royaume : la Bible dans la France d’autrefois, XIIIe-XVIIIe siècles : [exposition, Paris, 18 octobre 1991-15 janvier 1992], Bibliothèque nationale / [catalogue par] François Dupuigrenet-Desroussilles — Paris : Bibliothèque nationale : Ed. du Cerf, 1991

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *